Archives par mot-clé : féminisme

Thelma et Louise, de Ridley Scott

Film de 1991. Thelma et Louise sont deux amies, respectivement femme au foyer et serveuse dans un bar. Elles partent en weekend ensemble, mais Louise tue un homme qui tente de violer Thelma. Une cavale en voiture commence, où les deux femmes tentent de rouler jusqu’à la frontière mexicaine alors que la police tente de les arrêter.
J’ai beaucoup aimé, les deux personnages principaux sont très réussis – et en avance sur leur temps – et les personnages secondaires sont cools aussi. Pas trop de surprise pour un film culte, mais je recommande.

Vox, de Christina Dalcher

The Handmaid’s Tale, mais en carrément moins bien.

Assez déçu. J’avais vu une jolie couverture en librairie, j’avais feuilleté le premier chapitre qui commençait bien – je pensais être parti pour une dystopie féministe intéressante. Et puis non. Si la prémisse est intéressante – un gouvernement américain fondamentaliste décide littéralement de réduire les femmes au silence, le scénario est totalement implausible, empilant facilité sur facilité. Les personnages ne sont pas crédibles (et particulièrement manichéns) et les coïncidences abondent. Et en plus c’est mal écrit, avec des passages qui se répètent.

Bref, je ne recommande pas.

The Testaments, de Margaret Atwood

La suite de The Handmaid’s Tale, publiée quelques 35 ans plus tard, suite au retour de hype du livre.

J’ai été déçu. C’est sympa à lire, mais ça souffre du même syndrome que Harry Potter and the Cursed Child : on dirait plus une fanfic de l’oeuvre originale qu’une suite. Il y a aussi en commun le côté « regardons ce qui arrive aux enfants de l’héroïne (resp. du héros) de l’oeuvre originale » qui fait qu’il faut qu’il arrive des aventures spécifiquement à ces personnages alors que c’est complètement artificiel. En plus spécifiquement dans le cas de The Handmaid’s Tale, en faire une saga familiale, c’est un peu le malaise.

En plus des deux arcs des filles de June, le troisième arc narratif est celui d’Aunt Lydia. Et il est franchement pas crédible. Les plans secrets sur 20 ans, perso je laisse ça aux archimages maléfiques dans la fantasy pas très bonne. Le livre met aussi vachement l’accent sur l’action individuelle là où The Handmaid’s Tale parlait du poids du système. Ici, quelques individus en position de pouvoir peuvent tout faire basculer et ont visiblement des moyens infinis à disposition.

Bref, on perd beaucoup de la charge et du style de l’oeuvre originale.

Le Deuxième Sexe, de Simone de Beauvoir

Tome 1 (recension du 27 août 2018)
Un peu déçu. On m’avait prévenu que le tome 1 était moins intéressant que le 2 donc je lirai le 2, mais effectivement le 1 est pas génial. Divisé en 3 parties Destin, Histoire et Mythes, le livre présente différents points de vues et données sur les femmes. De Beauvoir passe d’abord en revue les connaissances issues de la biologie et de la psychanalyse, et bon, tu sens que c’est daté dans les deux cas. Elle parle ensuite de la place des femmes dans les sociétés à travers l’Histoire, et pareil, c’est une vision très péremptoire et très de son époque de l’anthropologie. Enfin, la partie Mythes montre les différentes significations et symboliques attachées aux femmes d’un point de vue masculin. C’est un peu long mais j’ai trouvé que c’était la partie la plus pertinente, qui peut se résumer en : « l’Homme se considère comme le centre du monde, les femmes lui présentent une image d’une Altérité et d’un reflet à la fois : en tant qu’altérité on va lui coller toutes les altérités dessus (la Nature en premier lieu, d’où plein de métaphore de la Nature comme une femme et des femmes comme forces naturelles un peu mystiques »), et le signifiant de plein de couples de valeur (jour/nuit, bien/mal…), où l’Homme récupère l’autre et généralement le mélioratif. Comme Reflet, il va être attendu des femmes qu’elles valident les Hommes, les confortant dans leurs choix : l’Homme va les vouloir indépendantes mais concédant quand même à l’Homme qu’il a raison à la fin, dures à séduire mais cédant aux avances… (en gros, une imitation de personne indépendante, mais qui finit toujours par valider les choix et envies de l’Homme).
Bref, j’ai trouvé ça un peu long pour ce que ça disait. Après c’est peut-être que c’était fondateur et que ça a été beaucoup repris par d’autres ouvrages et autrices féministes depuis. Ou alors c’est que c’est un point de vue philosophique et que ce n’est pas ce que je recherche dans un essai féministe.

Tome 2 (recension du 17 septembre 2019)
Excellent début, qui détaille comment l’éducation des enfants selon leur genre va modeler les individus selon des stéréotypes de genre. Ça pour le coup c’est toujours très pertinent et très bien décrit, ça explique comment les comportements présentés comme innés sont au contraire inculqués avec force répétition et les réactions que ça crée.
Au delà de ce début vraiment très bien, je n’ai pas été transporté par le reste du tome. Y’a plein d’éléments pertinents mais que j’ai déjà vu ailleurs, et surtout il y a une approche très généralisante. De Beauvoir parle surtout de la femme blanche et des catégories supérieures de la population (même s’il y a des passages sur les ouvrières), et de façon assez péremptoire, comme dans le premier tome. En plus elle parle de la condition féminine blanche et bourgeoise des années 40, du coup y’a un certain nombre de choses dans la structure de la société qui ont évolué depuis.

Gentleman Jack, de Sally Wainwright

Série basée sur la vie d’Anne Lister, une propriétaire terrienne anglaise ayant vécu au XIXe siècle. Anne Lister est lesbienne et n’a pas peur de l’affirmer à une époque où le mariage hétérosexuel est la norme pour les femmes. De façon générale elle n’a pas peur de mener sa vie comme elle l’entend, de voyager seule, de gérer ses terres, de se former à la médecine, et de dire aux mecs d’aller se faire voir.
J’ai beaucoup aimé. Le personnage d’Anne est très intéressant, elle n’est pas présenté comme archétypalement bonne parce qu’elle est l’héroïne : c’est une propriétaire, elle est sans pitié avec ses gens, elle traite mal sa sœur qu’elle considère comme inintéressante, et en même temps elle se jette à corps perdu dans ses relations amoureuses.
C’est super bien joué, grosse recommandation.

Une culture du viol à la française, de Valérie Rey-Robert

Essai sur la culture du viol, par l’autrice du blog Crêpe Georgette. Un peu déçu parce que trop générique à mon goût. Je pense que je n’étais pas le public visé, le livre revenait sur beaucoup de choses dont j’étais déjà conscient. La partie sur les spécificités de la relation de la culture française à la culture du viol est finalement assez mince.

A Room of One’s Own, de Virginia Woolf

Essai romancé sur les conditions permettant d’écrire et plus généralement de se réaliser intellectuellement, et en quoi ces conditions ont majoritairement été refusées aux femmes.
La thèse que Woolf développe en partant de son propre cas est la suivante : pour écrire il faut avoir un espace à soi où être tranquille et une rente quelconque qui permet de ne pas se concentrer en permanence sur les conditions matérielles. Elle note au passage qu’en plus de ces conditions matérielles, les femmes ont pendant longtemps été écartés de l’accès à la connaissance (jusqu’à son époque où l’accès aux bibliothèques des universités anglaises nécessitait pour les femmes d’être accompagnées), considérées par la société entière comme inférieures, et leurs sujets d’intérêt comme moins pertinents que ceux des hommes.
Il y a quelques moments où elle se lance dans des considérations psychologiques sur le fait d’avoir une sensibilité masculine et féminine en soi qui m’ont laissé dubitatif mais sinon c’est très bien, j’aime beaucoup son style et la façon dont elle met en scène son raisonnement.

Sorcières, la puissance invaincue des femmes, de Mona Chollet.

Essai qui parle des chasses aux sorcières de la Renaissance, de la figure de la sorcière dans la culture générale, et partant de là explore les questions de la place des femmes âgées dans la société et des médias, des femmes indépendantes, du mariage et de la maternité comme institution, et globalement de la place laissée aux femmes dans la société et de la pression mise sur elles pour qu’elles soient dépendantes de pouvoirs extérieurs plutôt que de pouvoir décider de leurs vies par elles-mêmes.

Comme toujours chez Mona Chollet c’est fort intéressant même si parfois j’aimerai une structure d’essai plus classique avec des thèses bien énoncées et des petites conclusions partielles, c’est mon côté scolaire.

Ne suis-je pas une femme ?, de bell hooks

Essai afro-féministe de 1981. bell hooks analyse comment le racisme et le sexisme s’entrecroisent dans la vie des femmes noires aux États-Unis, pour générer une forme d’oppression spécifique aux femmes noires : elles ne subissent pas les mêmes oppressions racistes que les hommes noirs d’un côté et les mêmes oppressions sexistes que les femmes blanches de l’autre : elles sont en prise avec des stéréotypes, des violences qui leur sont propres. Par exemple pendant la période de l’esclavage, il y avait des violences sexuelles envers les femmes noires qui étaient considérées comme des corps à disposition des hommes blancs (amplifié par le fait que leurs enfants naissant esclaves, c’était avantageux pour les propriétaires…), leur valant l’hostilité des femmes blanches, les considérant comme sexuellement permissives, plutôt que de faire preuve de solidarité féminine.
bell hooks montre aussi que la prétention à l’universalisme des mouvements féministes initiés par des femmes blanches et bourgeoises qui prétendent parler au nom de toutes les femmes masque en fait un discours très situé socialement, et qui refuse (dans la plupart des cas) de prendre en compte d’autres problèmes que ceux de ces initiatrices (tout en se lamentant de ne pas réussir à intéresser d’autres groupes sociaux). Par exemple, la réclamation à l’accès au travail à certaines époques était en fait une réclamation de l’accès pour les femmes bourgeoises aux postes de direction : ça faisait longtemps que les femmes noires et des classes populaires travaillaient en usine sans se sentir particulièrement libérées par cet accès égalitaire aux emplois du bas de l’échelle sociale (par contre on retrouvait en plus du racisme dnas ces emplois, avec des vestiaires réservés aux blanches par exemple).

Un peu daté par certains aspects et focalisé sur les USA, mais très intéressant et très accessible, je recommande.

L’Origine du Monde, de Liv Strömquist

Bande dessinée féministe de Liv Strömquist, aussi autrice des Sentiments du Prince Charles.
L’oeuvre parle des organes génitaux et de la sexualité féminin.e.s, de la représentation qu’on en avait à travers les âges (identiques à ceux masculins, opposés à ceux masculins, complémentaires à ceux masculins, mais en tous cas toujours considérés par rapport aux masculins), au peu d’études scientifiques dessus par rapport à leurs pendants masculins…
C’est fort intéressant, et je lis en parallèle le premier tome du Deuxième Sexe, de De Beauvoir, qui parle des mêmes sujets avec une approche historique aussi, mais qui réussit beaucoup moins bien le fait de faire passer les choses de façon didactique (et qui souffre aussi de certaines conceptions datés de l’anthropologie, je pense).

Je recommande.