Archives par mot-clé : film historique

The Last Duel, de Ridley Scott

Film historique de 2021. Dans la France du XIVe siècle, la dernière ordalie qui aura jamais lieu va impliquer deux chevaliers autrefois amis, suite à l’accusation de viol que la femme de Jean de Carrouges porte envers Jacques Le Gris. Le film va successivement nous montrer les points de vue de Jean de Carrouges, Jacques le Gris et Marguerite de Carrouges, qui se rappellent chacun les événements différemment

En soi l’idée était interessante, mais le film est réalisé à la truelle j’ai trouvé. On sent bien la patte Ridley Scott dans le côté médiéval-violent, mais la photographie est très sombre, le film se perd dans des longueurs, et si le côté « la vérité est relative » m’intéressait, il est malheureusement assez mal réalisé : si on voit bien les divergences de réminiscence entre le passé de Carrouges et de Le Gris, quand on en arrive à la question du viol – bon déjà j’ai pas spécialement envie d’un discours à base de « la vérité est relative » sur ce genre de sujet », mais le film évite quand même en grande partie cet écueil, seulement pour se jeter dans un autre : il ne fait pas de doute quand on voit le point de vue de Le Gris qu’il a violé Marguerite. Les deux personnages de chevalier sont très peu subtils et très peu sympathiques, ce qui rend Marguerite super appréciée par contraste, mais ça donne aussi du victim-porn à la The Handmaid’s Tale, à base de « ralala qu’est-ce que ça devait être dur d’être une femme dans ces conditions ». Je vois la volonté du film de porter un discours féministe, mais c’est avec une absence totale de nuances hélas.

J’ai conscience de descendre un peu le film en flamme dans le paragraphe précédent, mais il y avait aussi quelques bons éléments : toute la scène du duel lui-même est très réussie. La gestion du domaine par Marguerite et plus généralement les questions de gestion quotidienne des finances et des relations entre suzerains et vassaux sont intéressantes. Mais bon ça fait maigre sur un film de 2h.

Globalement, concepts intéressants mais réalisation ratée.

Spencer, de Pablo Larraín

Film sorti en 2021. L’action se passe à Noël 1991, sur les trois jours que la famille royale anglaise passe dans un château à la campagne, suivant scrupuleusement un certain nombre de traditions. Nous suivons le point de vue de Diana née Spencer (jouée par Kristen Stewart), épouse du Prince Charles et particulièrement mal à l’aise dans le cérémonial exigé d’elle par les traditions. Elle se retrouve perpétuellement en retard, à contre courant, incapable d’avaler quoi que ce soit durant les repas cérémoniels, voulant se promener alors que la Couronne veut contrôler chaque image que les paparazzi pourrait prendre, s’opposant à la chasse aux faisans traditionnelle… Elle lutte comme elle peut, consciemment ou non, contre l’impression (et la réalité dans certains cas) de ne plus avoir de contrôle sur sa vie, et plus elle se débat, plus des mécanismes se mettent en place pour contrôler plus finement son comportement : ça fait un film en tension perpétuelle, ou chaque acte est négocié.

En plus de Diana elle-même, on voit occasionnellement le point de vue de différents membres du personnel, qui sympathise plus ou moins avec la princesse de Galles, mais doivent aussi faire en sorte que le séjour se déroule comme il est supposé se dérouler. On voit le chef cuisinier, les différentes habilleuses de Diana, le chef du protocole. Diana a aussi des visions d’Ann Boleyn, épouse d’Henry VIII, qui a été exécuté pour que le roi puisse librement vivre sa liaison avec sa maîtresse : Diana se sent coincée dans le même rôle. Pour survivre à la tension, le film ménage quand même quelques échappées : les échanges de Diana avec ses fils, avec une de ses habilleuses – et le court séjour sur la côte qui s’ensuit – et l’échappée finale, quand Diana retourne à Londres et peut revenir à ce qui lui semble une vie normale.

J’ai bien aimé. La façon dont c’est filmé confine au film d’horreur par moment, ce qui est raccord avec le thème de l’héroïne coincée dans un environnement hostile et observée de toutes parts. Les décors sont très beaux dans le style château anglais pompeux et figé dans un paysage gris. Le film dure 2h, je pense qu’il aurait pu être raccourci un peu (mais tbh je pense ça de quasi tous les films de 2h).

Un peuple et son roi, de Pierre Schoeller

Film français de 2018. On suit une partie de la Révolution française, de la prise de la Bastille à la mort de Louis XVI. Le film suit à la fois les débats de l’Assemblée (nationale puis constituante) et le point de vue de parisien.nes du peuple : une lavandière, un souffleur de verre et un ancien paysan qui les rejoint en montant à Paris lors du retour du roi depuis Varennes. On suit notamment l’évolution des sentiments envers le roi, de « il faut lui faire quitter Versailles pour qu’il comprenne la réalité du pays, il est mal conseillé » à « il doit mourir pour que la révolution vive ». On voit les débats de l’Assemblée sur ce sujet, le vote solennel, les différents points de vue politiques, les moments de violence.

J’ai beaucoup aimé, c’était bien filmé et très intéressant. C’est difficile d’un point de vue de néophyte de juger de la réalité historique, mais ça avait l’air réaliste en tous cas, et ça recoupait d’autres récits qui je connaissais (mes souvenirs de cours, la bande dessinée Révolution, la série Netflix…)

Mudbound, de Dee Rees

Film historique américain de 2017. On suit en parallèle la vie de deux familles dans le Mississippi, une famille blanche qui possède une ferme, et une famille noire dont les membres sont ouvrier.e.s agricoles sur la ferme des précédents. L’histoire se passe durant et juste après la seconde guerre mondiale. Un membre de chaque famille a fait la guerre et ils vont devenir amis malgré le violent racisme du Mississippi.
La photographie est très belle, le contexte pauvre, la boue et la pluie permanente sont bien rendues, on n’a pas du tout envie d’être à la place des personnages. Mais on sait pas trop où le scénario va, on a l’impression que le film veut montrer trop de choses à la foi. Je soupçonne que c’est parce que c’est l’adaptation d’un livre et qu’elle est faite un peu trop scolairement. Il y a trop de points de vue différents, trop de voix off, ça fonctionne pas super bien sous forme de film, il aurait fallu resserrer un peu l’histoire.

Portrait de la jeune fille en feu, de Céline Sciamma

Film historique sortie en 2019. En 1770, une peintre, Marianne, se rend sur une île pour faire le portrait d’une jeune femme, Héloïse. Ce portrait sera présenté au potentiel futur mari d’Héloïse pour qu’il accepte ou non le mariage, et Héloïse refuse d’être peinte.

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Babylon Berlin, de Tom Tykwer, Achim von Borries et Hendrik Handloegten

Série policière historique allemande. On suit les tribulation de l’inspecteur Gereon Rath, détaché de Cologne à Berlin sous la République de Weimar, pour enquêter sur des films compromettants pour des hommes politiques (1ère saison) et un train d’armement illégalement importé depuis l’URSS (2de saison).
C’était assez cool de regarder une série allemande, pour changer de l’hégémonie anglophone. Et c’est aussi intéressant de voir montrée une période historique que l’on (que je, en tous cas) connait assez mal. La série a été dotée de bons moyens et ça se voit, les décors et les costumes sont beaux, les acteurs sont bons, et le scénar est globalement intéressant (un bémol à tout ça pour le final de la saison 2 où il y a des effets spéciaux dégueulasse pendant toute une scène, iels avaient peut-être épuisé leur budget à ce moment là).
Les personnages principaux que sont Lotte et Gereon sont intéressants, dans les personnages secondaires mention spéciale à Wolter. Globalement les personnages sont réussis parce qu’ils sont peu manichéens : le ~préfet de police lutte contre la conspiration monarchiste qui veut renverser la République, mais n’hésite pas à faire tirer sur les ouvriers communistes le 1er mai ; les policiers sympathiques défendent cependant l’institution ; etc.
La première saison était très réussie, la seconde est un peu plus confuse, mais globalement je recommande fortement.

Gentleman Jack, de Sally Wainwright

Série basée sur la vie d’Anne Lister, une propriétaire terrienne anglaise ayant vécu au XIXe siècle. Anne Lister est lesbienne et n’a pas peur de l’affirmer à une époque où le mariage hétérosexuel est la norme pour les femmes. De façon générale elle n’a pas peur de mener sa vie comme elle l’entend, de voyager seule, de gérer ses terres, de se former à la médecine, et de dire aux mecs d’aller se faire voir.
J’ai beaucoup aimé. Le personnage d’Anne est très intéressant, elle n’est pas présenté comme archétypalement bonne parce qu’elle est l’héroïne : c’est une propriétaire, elle est sans pitié avec ses gens, elle traite mal sa sœur qu’elle considère comme inintéressante, et en même temps elle se jette à corps perdu dans ses relations amoureuses.
C’est super bien joué, grosse recommandation.

The Favourite, de Yórgos Lánthimos

Film qui se passe à la cour de la reine Anne d’Angleterre. Il raconte l’ascension d’Abigail Hill au sein de la cour et la chute symétrique de Sarah, la confidente et amante de la reine, la relation entre les trois femmes, et les relations entre les membres de la cour. C’est assez difficile à décrire, comme film. C’était intéressant à regarder, c’est très bien joué avec de beaux décors, mais je sais pas vraiment quoi en dire de plus.

Le Retour du Héros, de Laurent Tirard

Comédie historique française. A l’orée des guerres napoléoniennes, un capitaine de l’armée se fiance avec Pauline Beaugrand. Il est mobilisé juste après, et Pauline, sans nouvelles, dépérit. Sa sœur Elisabeth décide alors d’écrire des lettres au nom du capitaine, auquel elle invente une vie rocambolesque et héroïque, avant de le faire mourir dans des circonstances tragiques. Mais plusieurs années après, le capitaine réapparaît et s’il est bien loin d’être à la hauteur de la réputation qui lui a été taillée par Elisabeth, il est bien décidé à en tirer tout ce qu’il en peut.

C’est sympa. Une bonne comédie française, un peu à la Jane Austen, avec ses costumes et son héroïne volontariste. Les deux rôles principaux écrasent un peu tous les autres cependant. Le film aurait pu éviter la romance finale entre les deux, même si elle reste très annexe par rapport au reste du film. J’ai passé un bon moment devant.