Archives de catégorie : Culture/Procrastination

Sans Transition, de Jean-Baptiste Fressoz

Essai français publié en 2024. L’auteur retrace l’évolution des différentes sources d’énergie utilisées depuis la Révolution industrielle. Il montre que si on présente classiquement l’Histoire des énergies comme un récit phasiste (avec un Âge du Charbon auquel succède un Âge du Pétrole puis un Âge de l’Électricité…), cette vision est fausse, reposant sur une étude des consommations relatives des énergies, mais s’effondre si on regarde les consommations absolues. Les énergies ne se sont pas succédées mais entraidées à croître.

Fressoz expose dans le détail sur plusieurs chapitres les synergies entre différentes énergies :

  • L’exploitation du charbon a nécessité celle du bois pour étayer les mines, faisant exploser les consommations et le commerce mondial du bois sur le temps long (au début des années 50, les mines européennes absorbent encore 10% du bois d’œuvre européen)
  • L’usage de la machine à vapeur et du charbon ont en retour facilité l’exploitation forestière et en faisant baisser le coût du bois, augmenté sa demande (et ses usages, avec les traverses de chemins de fer, remplacées fréquemment jusqu’à l’invention de la créosote), usage du bois et charbon de bois en remplacement du charbon de mine dans ces machines dans certains cas (notamment les scieries qui avaient la matière sous la main) : la sidérurgie brésilienne utilise actuellement 30 millions de m³ de charbon de bois par an (vs 1 million au pic de la sidérurgie US dans les années 80).
  • Le pétrole est fortement consommateur de charbon pour les infrastructures d’exploitation (acier des derricks et oléoducs) et de consommation (voitures, routes), mais aussi de bois à ses débuts (transport en tonneaux, le pétrole US consomme dans les années 1900 2x plus de tonneaux que l’industrie des boissons alcoolisées) et encore actuellement pour la fabrication d’acier : si est marginal par rapport au charbon, une seule entreprise française de production d’infrastructures pour l’exploitation pétrolière (Vallourenc) consomme actuellement 3 millions de m³ de bois/an, plus que toute l’industrie pétrolière à la fin du XIXe siècle.
  • L’énergie peu chère du pétrole va aussi favoriser le bâtiment et donc les coffrages, les panneaux de contreplaqué, les plaques de plâtre (avec un support carton intégré, donc consommatrices de bois), ainsi que la consommation domestique et donc les emballages et les palettes. La sylviculture va bénéficier des engrais azotés et de la mécanisation, faisant croître fortement les surfaces exploitées. Byproduct de cette exploitation, la consommation de bois de feu mondiale a doublé depuis 1960 (x7 sur le continent africain).

La transition n’a jamais eu lieu. Mais comment l’idée que c’était le cas (qui alimente l’idée que puisqu’il y a eu plusieurs transitions énergétiques déjà réalisées, une nouvelle transition hors des fossiles sera possible) s’est diffusée ? Ce discours sur la transition énergétique s’est diffusée en plusieurs temps :

  • Suite à la crise des années 30, des ingénieurs US diffusent l’idée que les équations logistiques (les « courbes en S » avec un plateau bas, une croissance brusque et un plateau haut) décrivent tous types de comportement, dont la production d’énergie : il n’y a pas de croissance infinie de la production, et une fois sur le plateau haut, il est nécessaire de transitionner vers une autre énergie pour continuer à subvenir à des besoins croissants.
  • Le rapport Energy for the Future rédigé en 1953 par Putnam pour l’industrie nucléaire introduit une étude de l’énergie sur le temps long (cadrage temporel plus facilement adopté par l’industrie nucléaire, en raison de la demi-vie de leur produit et des problèmes de gestion associés) : ce rapport affirme que les ressources fossiles seront épuisées à la moitié du XXIe, et que la transition vers le nucléaire (et la technologie des surgénérateurs) est nécessaire pour affronter ce problème de ressources. Ces réflexions sont couplées à un néomalthusianisme voyant l’énergie comme le goulet d’étranglement de l’Humanité (les engrais de synthèse apparaissant comme une réponse à la production agricole). C’est aussi des cénacles pro-nucléaires que les premières alertes sur le risque des gaz à effet de serre se font entendre, toujours avec en ligne de mire la solution de l’énergie nucléaire.
  • L’idée de crise énergétique se développe dans les années 70 en Occident (avant même le choc pétrolier de 73 qui va l’amplifier), d’abord comme backlash contre les environnementalistes, qui risqueraient de précipiter cette crise en menaçant le développement du nucléaire. Le choc pétrolier amplifie cette idée ainsi que celle de la transition énergétique qui permettrait une souveraineté énergétique. Puis ces concepts sont retournés par les mouvements écologistes pour argumenter en faveur d’un paysage énergétique sans fossiles ni nucléaire, avec l’argument d’une décentralisation (comparé au nucléaire qui doit être centralisé et géré par l’État) qui permettra d’économiser les coûts du réseau et de technos qui peuvent être portées par un marché libéral. La transition énergétique devient à partir de ce moment un terme attrape-tout revendiqué par tous et décrivant des stratégies contradictoires.
  • Jusqu’au début des années 80, la transition est donc un concept qui vise à gérer la raréfaction perçue des fossiles, pas leur trop grande abondance. Cesare Marchetti (scientifique atomiste), va diffuser l’idée que l’évolution de l’usage des énergies dépend de la diffusion des techniques permettant leur usage. Les énergies sortiraient du paysage par obsolescence quand de nouvelles technologies matures permettraient d’exploiter l’énergie suivante (vision très téléologique, et comme l’a montré la première partie, totalement fausse pour la disparition des énergies du paysage énergétique). Mais cette idée permet de parler d’une transition liée aux technologies disponibles et non aux stocks de ressources. La diffusion progressive des enjeux climatiques va mettre en évidence ce besoin de transition, au début perçu comme totalement compatible en termes de calendrier. Il était affirmé sans base que la transition prendrait 50 ans (en se basant sur une estimation du temps de découverte et diffusion des nouvelles technologies qui la permettrait, sans être clair sur ce que seraient ces technologies, excepté toujours les fameux surgénérateurs – qui n’existent toujours pas en 2024), ce qui laissait le temps de la faire bien avant que les enjeux climatiques ne soient prépondérant. Il était donc urgent d’attendre pour que les technologies puissent se développer. Mais ces estimations occultaient totalement le temps de déploiement sur le terrain des technologies en question en termes de formation des métiers et déploiement d’infrastructures : la transition imaginée effectuée durant les années 2010-2020 une fois les technologies matures n’était économiquement absolument pas viable.
  • Les modélisations plus sérieuses du système énergétique et de ses évolutions concluent à un changement climatique inévitable : éventuellement un peu repoussé par les mesures les plus audacieuses, mais jamais évité. Dans cette optique, promotion à la fin des 70s/début des 80s de l’adaptation, dans le cadre de travaux sous-estimant grandement (par rapport aux travaux + récents) les coûts des impacts du CC, notamment sur l’agriculture, et considèrent comme acceptable de rendre des portions entières du globe inhabitables.
  • Les mêmes experts vont passer de la modélisation de la crise énergétique à celle de la crise climatique, et y importer le modèle de la transition. Ce constat s’applique aux prémices du GIEC aux USA, en France et en Inde. Les mêmes modèles vont être appliqués, en considérant que la ressource limitée n’est plus les fossiles mais un climat stable. La création du GIEC visait initialement à redonner la main aux États sur les négociations climatiques, en tuant dans l’œuf l’initiative onusienne Advisory Group on Greenhouse Gases (AGGG), considéré comme trop indépendante (et qui voulait gérer les GES de la même façon qu’avait été traité le trou dans la couche d’ozone, avec des objectifs contraignants). Les USA notamment – mais pas seulement – vont notamment promouvoir via le groupe III du GIEC et la convention des Nations-Unies sur le Climat (UNCC) les solutions technologiques (pas de contraintes sur les émissions, pas d’assistance sous forme financière aux pays impactés, mais de l’assistance technique et des transferts de technologie).
  • À partir des années 2000, le GIEC infléchit ses positions suite à des batailles d’influence en interne. Le risque de carbon lock-in entraîné par une position attentiste est mis en lumière, les objectifs de limitation de l’augmentation des températures sont rehaussés, et une trajectoire de transition rapide devient plébiscitée (sur le papier). Mais comme dans le même temps les émissions n’ont pas décru, les trajectoires de réductions des émissions sont devenues ultra-raides, avec l’invocation de techniques de capture du carbone technologiquement non-matures pour permettre de rester sur la trajectoire. Ces technologies plus ou moins irréalistes ont servi de diversion pour ne pas parler de sobriété ni de décroissance, mots qui ne sont apparus dans le rapport du groupe III seulement en 2022.

Le discours de la transition énergétique a surtout servi à justifier l’attentisme et le fait d’utiliser les fossiles comme « énergie de transition » le temps d’avoir d’hypothétiques technologies propres : dans le vocabulaire actuel des majors de l’Oil & Gas ne domine plus le climato-scepticisme mais l’action en faveur de la transition (sans que la réalité du gros de l’activité ne change. La transition énergétique, basée sur une Histoire fausse, fait office de « futur politiquement correct du monde industriel ». Elle change le mal en remède, les industries polluantes en industries vertes et l’innovation en solution universelle.

Le Cœur cousu, de Carole Martinez

Roman publié en 2007. Dans l’Espagne et le Maghreb du début du XXe siècle, on suit la vie de Frasquita, femme issue de la paysannerie. Lors de la Semaine Sainte suivant ses premières règles, sa mère lui as transmis des prières permettant d’exécuter des miracles plus ou moins mineurs, et une boite contenant un don : dedans, Frasquita a trouvé un nécessaire de couture, qui va faire d’elle une couturière hors pair, un don qui ne va pas forcément lui porter chance. L’une après l’autre, toutes les filles de Frasquita vont trouver un don ambivalent dans la boîte, et on va suivre ces deux générations de femmes l’une après l’autre.

J’ai beaucoup aimé. C’est du réalisme magique très réussi dans son écriture, on est accroché à la vie de Frasquita et de ses filles, aux différentes péripéties qui rythment son mariage puis son errance, à la puissance de la magie qu’elle peut invoquer sans pour autant maîtriser ses effets.

Recommandé.

Tuca and Bertie, de Lisa Hanawalt

Série animée en trois saisons. On suit les deux personnages titres, deux amies qui sont des oiseaux anthropomorphiques trentenaires. Le dessin fait penser à Bojack Horseman (ce qui est tout à fait logique puisque c’est Hanawalt qui dessinait BH), mais dans un univers plus surréaliste/cartoonesque, et un point de vue qui n’est pas celui d’un acteur dépressif.

J’ai beaucoup aimé. Les personnages sont attachants, l’univers est beau et cool, et très imaginatif mais auto-cohérent. Les thèmes abordés sont traités avec finesse (et en même temps une approche très cartoonesque). Le côté « amies que tout oppose » fonctionne très bien avec Tuca ultra extravertie et Bertie beaucoup plus introvertie, mais dans un job stable là où Tuca enchaîne les petits boulots.

Je recommande.

Incroyable mais vrai de Quentin Dupieux

Film français paru en 2022. Je n’ai pas été très convaincu, c’est un Dupieux qui tombe un peu à plat pour moi. On suit un couple qui habite dans une maison où un passage permet de rajeunir de trois jours en disparaissant pendant 12h. La femme du couple va être totalement obsédé par cette possibilité et passer son temps dedans pour retrouver ses 20 ans (c’est un peu sexiste comme histoire, non ?) alors que le mec s’en fiche, plus inquiété par son travail dans une compagnie d’assurance, dont le patron s’est fait greffer un pénis électronique dont il est très fier. Voila.

Reservation Dogs, de Sterlin Harjo et Taika Waititi

Série télé étatsunienne de 2021. On suit la vie de quatre adolescents qui vivent dans une réserve indienne et qui s’y ennuient sacrément. Ils veulent partir en Californie, et réunissent de façon souvent illégale de l’argent pour payer leur voyage. Au delà des quatre personnages principaux, on suit la vie quotidienne de la communauté native-américaine dans la réserve, sous la forme d’une comédie. La série traite du mal-être des jeunes en milieu rural et visiblement encore plus dans les réserves native-américaines et des relations familiales. Les acteurs sont très bons dans leur rôle et c’est intéressant de voir un mode de vie différent – pas tant dans le côté « des amérindiens si exotiques » (même s’il y a des éléments spécifiques à la culture amérindienne) que « l’Oklahoma rural et son ennui profond ». Le décentrement du regard est réussi (scène très rigolote où deux texans blancs passent devant les personnages principaux de l’épisode en ne disant que « Taxes. Gay agenda. Return on investment! » et autres mots clefs). J’ai bien aimé l’inclusion d’éléments fantastiques en lien avec les traditions amérindiennes sans que l’on sache quel statut ils ont réellement : les visions de Bear, les souvenirs de la Deer Lady de Big, le rituel antitornade d’Uncle… C’était intéressant de les présenter comme des idiosyncrasies des personnages, aussi : si ses potes posent des questions à Bear sur ses visions (ce qui est un peu miné par la nature des visions avec son guerrier un peu tocard), Big et Uncle ont l’air un peu tout seul dans leur vision du monde, ce n’est pas présenté comme un paradigme (oui je sors tous mes grands mots dans cette critique) partagé par tous les personnages.

Bref, c’était cool, pas prise de tête et original, je regarderai avec plaisir la S2.

Saison 2

Une saison 2 un peu plus lourde émotionnellement. On parle beaucoup plus de deuil : celui de la mère d’Elora, de sa grand-mère, et surtout, celui de Daniel. Autant pendant la première saison le suicide de Daniel était juste un élément de l’arrière-plan commun des héros, autant dans cette saison l’enjeu du travail de deuil que doivent faire les personnages est beaucoup plus présent. Les visions des ancêtres sont davantage partagés entre différents personnages : la mère de Daniel, Bear toujours, Uncle, Elora avec sa grand-mère. On voit aussi toujours la vie de la communauté au delà des héros : la vie des femmes qui travaillent pour l’Indian Health Service (dont la mère de Bear), une aventure de Big avec Kenny Boy.
C’est toujours aussi bien, ça remue davantage émotionnellement. Les acteurices sont tou.tes très bon.nes.

Je recommande toujours.

L’Empire, de Bruno Dumont

Film français sorti en 2024. Dans les Hauts-de-France de nos jours, deux peuples extraterrestres se livrent une lutte à mort en secret : les Zéros, menés par Belzébuth, tentent de corrompre les humains et protègent le Margat, un bébé qui deviendra l’Antéchrist. En face, les Uns veulent tuer les Zéros et faire fructifier les bons aspects des humains. Les deux factions agissent en s’incarnant dans des humains. On suit en parallèle l’action sur les vaisseaux spatiaux des deux peuples, leurs interactions sur Terre et l’enquête (totalement inefficace) de la gendarmerie sur un meurtre lié au conflit entre les deux races.

On va commencer par le gros point noir du film : les rôles féminins sont assez nuls, avec les deux actrices principales qui servent d’intérêt amoureux et qui sont totalement sexualisées par la caméra, sans que ça apporte rien au film.

Ceci mis à part, c’était wtf dans le bon sens du terme. Une bonne partie des acteurices sont amateurs et ça rend bien dans l’ambiance du film, Lucchini est truculent, les vaisseaux spatiaux qui sont des palais ou des cathédrales sont très cools, les effets spéciaux rendent bien, la juxtaposition scifi/petite ville française fonctionne bien. La grande histoire de lutte millénaire entre le bien et le mal est un prétexte sans trop d’intérêt mais ça file un axe au film

The Case of the Golden Idol, de Color Gray Games

Jeu vidéo d’enquête, publié en 2022. Dans les années 1780, a travers une série de tableaux s’étendant sur une dizaine d’années, on va enquêter sur différents meurtres liés à une statuette potentiellement magique et l’ascension au pouvoir d’un nouveau parti politique.

C’était assez sympa mais assez court. Il faut enquêter dans les scènes présentées pour récupérer des mots qui permettent de compléter un texte à trou expliquant les circonstances de la mort. Les énigmes ne sont pas ultra complexes (pour le coup je pense qu’ils auraient pu rendre certains mots plus faciles à trouver mais augmenter le niveau d’intricacy des énigmes), mais l’ambiance années 1800, magie et conspiration est sympa.

Je recommande.

Techno-luttes, de Fabien Benoît et Nicolas Celnik

Essai français publié en 2023. Les auteurs retracent différentes époques de la résistance à l’implémentation de nouvelles technologies. Ils mettent en évidence que ce n’est pas une résistance dans l’absolu à toute technologie mais le plus souvent la proposition d’une alternative, d’un autre chemin technique et social. Ils insistent aussi sur le fait que présenter les technologies comme des outils neutres qui peuvent être utilisées pour le bien comme pour le mal est une arnaque : beaucoup de technologies contraignent des choix de société et ferment des chemins, elles ne sont pas neutres (pour prendre un exemple caricatural, la bombe atomique peut difficilement être vue comme pouvant être utilisée pour le bien. Et dire que c’est « le nucléaire » la technologie et qu’on peut l’utiliser pour tout n’est qu’une figure de style : déjà ce n’est pas en soi la même technologie, et le nucléaire civil est toujours lié aux programmes militaires). De façon plus générale, beaucoup de techno, notamment liées à l’électronique et au numérique enferment dans des choix de société mondialisées, très interdépendantes et exploitatrices : pas d’ordiphones sans des dizaines de composants chimiques extraits dans des conditions dégueu et aux quatre coins du globe. Le numérique, la gouvernance par indicateurs, dépossèdent aussi les gens de leur expertise pour en faire des exécutants qui doivent juste remplir correctement les tableaux (exemple des conseillers Pôle Emploi), puisque c’est le remplissage du tableau qui devient l’indicateur et donc le résultat attendu.

Face à ces évolutions, les auteurs proposent de suivre plutôt la voie des outils conviviaux proposés par Illich, Ellul et consorts technocritiques. Ils donnent l’exemple de l’Atelier Paysan qui permet aux agriculteurices de construire des outils pas connectés du tout mais adaptables à leur problème plutôt que de demander d’adapter leur pratique à l’outil. Mais ce n’est pas sans écueils : ils citent Framasoft qui propose des outils libres pour dégoogliser internet, mais les utilisateurices veulent le même fonctionnement, la même qualité de service qu’avec des outils google, les gens restent dans une posture de consommateurs. La proposition de Framasoft est alors de minimiser l’usage plutôt que de proposer une alternative à l’identique.

C’était intéressant, ça fait une bonne synthèse, mais ce n’est pas assez creusé à mon sens : c’est du journalisme et pas des sciences sociales, donc je trouve que souvent ça survole un peu le sujet.

Physical, d’Annie Weisman

Série étatsunienne de 3 saisons, diffusée entre 2021 et 2023. Dans la Californie du Sud des années 80, Sheila Rubin, femme au foyer, va découvrir l’aérobic, ce qui va changer toute sa vie : elle va devenir financièrement indépendante, gérer sa santé mentale, faire exploser son couple.

C’était assez cool, surtout la première saison (qui est vraiment très bien, petite baisse de régime après, mais ça vaut le coup d’être regardé dans son entièreté même si la saison 3 rushe la fin). La série retranscrit bien le côté individualiste des années 80 : si on est derrière Sheila pour le côté émancipation de son arc narratif, pour autant plus ça va et plus elle devient (redevient ?) de droite. Le personnage de John Breem est très réussi aussi. Globalement tous les personnages de la série sont assez détestables, à des degrés divers, sauf peut-être Bunny et Tyler, qui sont les deux seuls persos de la série qui ne font pas partie de la bourgeoisie locale.

La série réussit bien la représentation des problèmes mentaux de Sheila, à la fois sa boulimie et sa self-hate, présente d’abord comme une voix intérieure puis comme des hallucinations de différentes personnes de son entourage. La façon dont l’aérobic lui permet d’en sortir (un peu) est bien mis en scène : c’est remplacer une obsession par une autre (et potentiellement mettre sa santé en danger avec, quand elle a un problème physique qu’elle ne traite pas pour ne pas apparaitre faible), et c’est une route compliquée, ou elle va avoir des rechutes, une progression épisodique : même si elle a une épiphanie sur l’aérobic, ça ne suffit pas pour que tout aille mieux dans sa vie d’un seul coup.

Je recommande, surtout la première saison qui arrive bien à mêler les enjeux environnementaux aux autres thématiques de la série.