Série mettant en scène la gestion de crise de l’accident nucléaire de Tchernobyl. J’ai bien aimé, même si le fait que les acteurs n’ont clairement pas des têtes de slaves est parfois un peu déstabilisant. Mais à part ce détail, c’était intéressant d’avoir une description de ce qui a été fait pour gérer un désastre de cette ampleur, quels ont été les différents acteurs en jeu et les problèmes rencontrés. Le premier épisode met bien en scène comment les premiers acteurs sur le terrain (« first responders« , je sais pas trop comment le traduire) ont été envoyés à la mort, avec aucune idée du danger qu’ils affrontaient et aucun matériel de protection adéquat. Le dernier épisode, qui explique comment la catastrophe a eu lieu est assez effarant aussi en terme d’accumulation d’erreurs humaines, de protocoles de sécurité contournés voire juste inexistants et d’erreurs de conception. La série insiste beaucoup sur le fait que la culture du secret de l’URSS a été responsable en bonne part ; sans nier que ça a aggravé les problèmes, y’a eu le même genre de désastre dans des environnements absolument pas liés à l’URSS ; Fukushima ça s’est passé en pays capitaliste, DeepWater Horizon aussi.
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Quiz, de James Graham
Mini-série documentaire anglaise en trois épisodes. On suit la création du programme télé Who wants to be a millionnaire (adapté en France comme Qui veut gagner des millions), énorme succès d’audience et qui est vendu par la télé anglaise au reste du monde et notamment aux américains (plutôt que l’inverse, ce qui était le cas habituel). On suit surtout l’engouement que le programme suscite, et comment une communauté de fans de pub quiz vont s’unir pour passer les étapes de présélection. Et surtout comment parmi ceux là, le cas d’une famille ou un frère, une sœur et son mari vont successivement se retrouver candidats du jeu, le mari devenant la seconde personne de l’histoire du programme à atteindre le million, mais d’une façon qui mènera à un procès pour fraude. On suit alors les arguments de l’accusation puis de la défense, la question de la médiatisation du procès et de la présentation des preuves (la chaine télé qui est partie au procès éditant le montage mettant en évidence les éléments de fraude).
J’ai bien aimé le côté fiction documentaire. La période couverte est à la fois proche de nous (le jeu est inventé en 1997, l’émission où le mari est soupçonné d’avoir triché est filmée le 09/09/2001, l’enquête se passe dans les jours qui suivent le Onze Septembre) et fort différente dans l’accès aux informations – internet existe mais n’est pas du tout omniprésent comme aujourd’hui. Les personnages sont très très anglais (la série en joue), c’est sympa à regarder sans être inoubliable.
Planètes, de Gorō Taniguchi
Adaptation en animé du manga éponyme de Makoto Yukimura. J’avais lu le manga ado, j’avais les DVDs des premiers épisodes depuis très longtemps, le second confinement a été l’occasion de s’y mettre. En 26 épisodes de 20 minutes, on suit le quotidien de la section Débris, une équipe d’éboueurs de l’espace dans les années 2070. L’histoire tourne principalement autour de deux membres de cette section, Tanabe, jeune novice idéaliste, et Hakimachi, un éboueur plus âgé qui a toujours rêvé de posséder son propre vaisseau et de participer à la conquête spatiale.
C’est très cool. L’univers montre une version relativement réaliste de l’exploration spatiale. Passée l’ère des premières fois épiques, l’espace est devenue une ressource comme une autre, exploitée par des firmes multinationales qui ont assez de capitaux pour se lancer dans des projets très coûteux mais très rentables. Le fait de centrer le point de vue sur la section Débris est très bien pensé : sans ce travail de récupération des déchets et débris, les voyages dans l’orbite terrestre serait impossible. Pour autant c’est un job sans prestige, les pilotes de navette sont ceux qui font rêver, pas les éboueurs. La Technora ne garde une section Débris, sous-financée et sous-staffée, que parce qu’elle reçoit des subventions de la Fédération (l’alliance des pays riches) pour ce faire. La géopolitique de l’univers est très réussie aussi : l’exploitation spatiale profite aux transnationales et aux pays riches, et un mouvement terroriste conteste la dépense énorme de ressources qu’engendrent les projets spatiaux et qui pourraient êtres alloués à la réduction des inégalités sur Terre. La série réussit très bien à balancer ces facteurs réalistes avec le pouvoir d’attraction que les mots « exploration spatiale » peuvent avoir. Elle montre aussi les risques pour la santé de la vie en dehors de la Terre, que ce soit les multiples accidents ou plus insidieusement les cancers liés aux radiations non-filtrées par l’atmosphère.
Concernant les personnages principaux, on a une focalisation d’abord sur le personnage de Tanabe, qui découvre cet univers, permettant de filer les clefs de compréhension aux spectateurs. Mais rapidement on comprend que le vrai héros de l’histoire est Hakimachi, prêt à sacrifier énormément de choses à sa passion de l’espace. Si Tanabe fait pas mal avancer l’histoire et est beaucoup mise en lumière, on est quand même sur une répartition très classique des rôles genrés dans ce couple de personnage, avec le mec taiseux qui veut être indépendant et aller explorer, et une fille idéaliste qui va apprendre à son contact mais lui faire découvrir la puissance de l’amour. De ce point de vue les personnages secondaires sont cependant plus réussis, notamment Fay Carmichael, la pilote de la section Débris colérique et prête à tout pour fumer tranquillement ses clopes. Tous les fils narratifs secondaires permettent de bien développer ces personnages et l’univers dans lequel ils évoluent.
Je recommande.
Patria, d’Aitor Gabilondo
Série espagnole de 2020. La série suit deux époques en parallèle : les semaines qui suivent l’annonce de 2011 de l’ETA de leur renoncement à la lutte armée, et les événements menant à et suivant le meurtre d’un petit patron et père de famille basque, Txato, 20 (checker) ans plus tôt.
J’ai été assez déçu. J’avais été alléché par le pitch, et le premier épisode posait plein de pistes intéressantes, avec la focalisation sur Bittori, la veuve obstinée de Txato qui décide d’obtenir la vérité sur le meurtre de son mari 20 ans plus tard. Avoir une femme de 70 ans comme personnage principal c’était intéressant, la faire enquêter sur un sujet politique sensible c’était super.
Mais en fait, Bittori n’enquête sur rien. La série montre les événements selon une narration non linéaire, mais l’histoire est très manichéenne. Bittori finira par avoir l’info qu’elle veut, mais après avoir écrit deux lettres. Quant à l’exposition d’une situation politique complexe, comment dire.
Je ne demandais pas à la série d’être une grande fresque pédagogique sur l’indépendantisme basque, mais là on n’a aucune idée de pourquoi l’ETA a pris les armes ni des enjeux du mouvement indépendantiste. Le mouvement est présenté surtout via des cellules d’actions composées de jeunes adultes un peu idiots. Il a du soutien dans la population, mais on sait pas trop pourquoi : visiblement les gens trouvent que la lutte armée c’est un peu abusée, mais quand même iels soutiennent. La violence de l’État espagnol n’est pas totalement occultée, mais elle est complètement disjointe de la question de l’indépendance : on a une scène où le GAL arrête la voiture de trois jeunes filles et où ils profitent de la fouille pour les agresser sexuellement, une autre scène de violence policières interminables quand un des ettara est arrêté. En fait on a l’impression que la situation politique est prise comme un état de fait et une toile de fond pour dérouler l’histoire. La série est clairement contre l’indépendantisme, mais je trouve que même dans cette optique elle dessert son propos : ne pas montrer pourquoi certaines personnes se retrouvent à considérer la lutte armée comme acceptable tout en les montrant comme insérées dans leur communauté, ça crée juste une dissonance, le terrorisme devient juste une tradition comme une autre.
Autre problème, les personnages sont pour la plupart totalement unidimensionnels. La famille de Txato ne se définit que par rapport à son meurtre, et Txato lui-même est un saint : après la présentation par les yeux de sa famille je m’attendais à un twist où on montrait que sur d’autres aspects il était moins parfait et que ça expliquait pourquoi il y avait du ressentiment contre lui, mais non, il est désigné comme cible de l’ETA juste parce que les gens sont jaloux et l’imaginent ultra-riche.
Bon qu’est-ce qu’il reste de positif, quand même ? Une série avec des moyens, qui montre des gens avec des têtes qui ne sont pas celles d’acteurs hollywoodiens. De beaux paysages du Pays Basque, on reconnaît les Pyrénées, on voit la côte. Un bon premier épisode, deux actrices principales âgées intéressantes qui jouent bien leurs rôles de mères de famille inflexibles (Bittori et Miren). Une caméra qui fait des plans intéressants (le recul progressif dans le train quand Nerea part pour l’Allemagne), le cadre qui se resserre progressivement sur Miren en excluant Joxian quand ils rendent visite à Joxe Mari en prison pour la première fois). Mais c’est assez frustrant de voir le potentiel qu’avait cette série et qui a été gâché.
Queen’s Gambit, de Scott Frank et Allan Scott
Série Netflix en 7 épisodes adaptée d’un bouquin de Walter Tevis. On suit la vie (imaginaire) d’Elizabeth Harmon, prodige des échecs, de son placement en orphelinat à son affrontement en 1968 à Moscou contre le champion du monde en titre.
C’était fort bien. L’actrice principale est très bonne dans son rôle, et plus largement tous le cast est réussi, avec des personnages secondaires très bien réalisés. Le côté série historique avec décors reconstitués fonctionne bien (petit bémol là-dessus sur le Moscou du dernier épisode, sur lequel les images de synthèse sonnent quand même un peu fausses sur certains plans d’ensemble). Il y a quelques rebondissements où l’on se dit quand même que tout le monde est très bienveillant dans ce monde (les gens perdent avec grâce, les anciens adversaires deviennent des mentors ou des amis – on croirait un shonen. Y’a zéro sexisme, l’alcoolisme et les addictions c’est possible d’en sortir juste avec de la volonté), mais bon ça fait du bien parfois aussi. On voit par contre très peu d’échecs dans la série, qui se concentre sur la psychologie des personnages et non pas les parties. Y’a aussi un petit côté didactique artificiel dans les premiers épisodes, ou Elizabeth se voit expliquer les règles d’une partie puis d’un tournoi une par une par différents personnages, mais c’est un défaut franchement mineur.

Lovecraft Country, de Misha Green et Jordan Peele
Adaptation en série télévisée du roman éponyme. J’ai eu un peu de mal à rentrer dedans. Comme le livre, ça part un peu dans tous les sens, il faut accepter que c’est une anthologie, avec des styles et genre qui varient assez fortement d’un épisode à l’autre malgré la trame globale. Mais au bout d’un moment (vers l’épisode 4 je dirais pour moi) la mayonnaise prend et c’est assez cool. Du coup c’est de l’horreur, pas du tout lovecraftienne par contre malgré le titre, et du pulp de façon plus générale, avec des héros racisés – principalement noirs – qui doivent composer avec les menaces horrifiques, et celles d’une société raciste en parallèle. Évidemment les détenteurs de pouvoirs magiques sont blanc.he.s, les dominations se recoupant. La série parle un peu de féminisme et d’intersectionnalité, mais le prisme des discriminations racistes reste prééminent.
Je suis un peu dubitatif des retournements de situation dans l’épisode final, mais sinon je recommande la saison.
The Third Day, de Dennis Kelly et Felix Barrett
Thriller psychologique diffusé par HBO, en 6+1 épisodes. 6 +1 parce que l’épisode central durait 12h et était diffusé en direct, une performance intéressante.
Les trois premiers épisodes se déroulent en été : Jude Law incarne un père de famille qui se retrouve sur Osea, une île au large des côtes anglaises avec des croyances païennes toujours d’actualité. Venu pour ramener une enfant insulaire perdu sur le continent, il se retrouve rapidement impliqué dans les secrets que recèle l’île.
La seconde partie se déroule 9 mois plus tard en hiver, quand Cass, l’épouse de Jude Law jouée par Naomie Harris vient sur l’île avec leurs deux filles. J’ai bien aimé la première partie, beaucoup moins la seconde : on s’attend à ce qu’elle résolve les questions mises en place durant la première, mais ce n’est pas le cas. Tout les éléments un peu mystiques sont ignorés – ce qui peut être intéressant si on considère qu’on avait le pt de vue de Sam, plus prompt à y croire et à se laisser influencer dans la première partie – mais sans être remplacé par des explications rationnelles : à la place on nous balance une nouvelle histoire – et qui perd en force du fait de se diviser entre les 3 points de vue de Cass, Lu et Ellie (ses deux filles) alors qu’on avait une focalisation sur un point de vue unique dans la première partie.
Bref, bon concept mais réalisation ratée.
Tiger King, d’Eric Goode et Rebecca Chaiklin
Série documentaire produite par Netflix. En 7 épisodes, le documentaire détaille le fonctionnement et les interactions de plusieurs zoos privés aux USA. Quand on dit zoos privés ça a l’air plutôt propre sur soi, mais on parle de gens qui possèdent à titre privé des centaines de tigres (et autres félins) et fonctionnent totalement à l’arrache, tout en brassant des quantités d’argent énorme. On suit plus particulièrement Joe Exotic, un directeur de zoo dont la vie part totalement en latte, notamment du fait de l’escalade de sa rivalité avec une autre propriétaire de zoo. On croise des fonctionnements sectaires, des arnaqueurs professionnels des mystérieuses disparitions, la contractualisation d’un tueur à gages, une candidature à la présidentielle, une enquête du FBI… Chaque épisode est encore plus improbable que le précédent, et on sort de là bien content de vivre dans un pays avec un minimum de régulations.
I May Destroy You, de Michaela Coel
Série anglaise en partie autobiographique sur la vie d’une jeune écrivaine noire et sur les conséquences que son viol a sur sa vie. On suit principalement la vie d’Arabella (et ses difficultés à écrire son second livre), et de deux ami·e·s les plus proches, Terry, aspirante actrice, et Kwame, prof de fitness en club.
La série décrit un milieu et des personnes rarement montrées à la télévision, et auquel je suis moi-même profondément étranger. C’était très interessant pour ça, pour cette défamiliarisation. Je me rends notamment compte que j’ai des réflexes classistes devant, genre « ralala ils consomment trop de drogues » ou « mais comment ils peuvent dire que le réchauffement climatique osef ? », c’est d’autant plus intéressant pour moi de pouvoir réfléchir à pourquoi c’est ça ma première réaction et comment faire pour l’éviter.
Les personnages sont intéressants parce qu’absolument pas manichéens. Arabella n’est pas la « bonne victime », Terry et Kwame tentent de la soutenir comme ils peuvent mais font des erreurs, les personnages secondaires sont nuancés aussi. L’impact psychique de l’agression sur Arabella est montré de façon détaillée, les mécanismes de coping qu’elle met en place aussi, qu’ils soient sains ou non. J’ai juste été déçu par la ligne narrative de Kwame ; le jeune gay qui se perd dans le sexe et qui est sauvé par une relation longue et pas centrée sur le sexe, c’est assez cliché et conservateur par rapport au reste de la série.
Point de vue bande-son, parfois la série verse un peu trop dans le côté « on va mettre des morceaux obscurs ou des reprises edgy pour montrer qu’on est une série hype », mais l’utilisation qu’ils font de la musique est sinon intéressante, notamment le fait de la couper abruptement pour montrer des changements d’ambiance.
Enfin, le dernier épisode est très réussi dans sa construction je trouve, alors que c’était loin d’être évident de réussir à conclure proprement une série comme ça.
Dark, de Baran bo Odar
Je recommande la saison 1, et ça vaut le coup de la regarder sans rien en savoir.
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