Préquel/remake de 2011 au film éponyme de John Carpenter. En 1982 des scientifiques norvégiens découvrent le corps d’un alien dans un vaisseau spatial en Antarctique. L’alien en question s’avère hostile et métamorphe, et tue peu à peu les membres de la base, en se faisant passer pour eux. Le pitch est vraiment le même que celui du film de Carpenter. La créature peut déformer son corps, le séparer en plusieurs parties, muter à volonté, on est en plein dans le body horror. Je n’ai pas vu l’original, mais j’ai bien aimé celui là. Les effets spéciaux de la créature sont plutôt réussi, le côté huis-clos en Antarctique aussi. Le scénario n’est pas très épais et la caractérisation des personnages bien mince, mais c’est pas vraiment ce que je venais chercher dans le film donc je m’en fiche un peu.
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Le Bateau-Usine, de Takiji Kobayashi
Livre japonais de 1929, qui raconte la vie sur un bateau usine qui va pêcher et mettre en conserve des crabes au large du Kamtchatka. La vie à bord est atroce, les marins, les pêcheurs et les ouvriers sont mis en concurrence par le contremaître et l’intendant qui représentent la compagnie qui a affrété le bateau, qui se foutent éperdument de leur vie tant qu’ils peuvent gratter un peu plus de profits. Les journées durent 10 à 13h, les dortoirs collectifs sont immondes, les chaloupes sortent même par avis de tempête… Kobayashi dépeint dans son roman la réalité du travail de l’époque (une postface à l’édition française raconte comment il s’est documenté), et comment c’est l’action collective qui permettra aux exploités de réussir à faire ralentir la cadence, par une grève largement suivie (mais après plusieurs morts et de nombreux estropiés…).
Ca se lit vite et c’est un témoignage intéressant sur les conditions de vie des ouvriers japonais de l’époque (à rapprocher de La Scierie) et de comment les idées communistes tentent de se diffuser à l’époque.
The Green Knight, de David Lowery
Film états-unien de 2021, inspiré de la légende arthurienne de Gauvain. Le jour de Noël, le chevalier vert fait irruption à Camelot et défie les chevaliers de la table ronde : Gauvain répond à son défi de le frapper et de venir recevoir le même coup un an plus tard, et décapite le chevalier. Celui-ci emporte sa tête sous son bras et dit à Gauvain qu’il attend sa visite.
Le film va suivre Gauvain, qui n’aspirait visiblement pas plus que ça à rentrer dans la légende (un petit écho du dilemme d’Achille ici) mais qui se résigne à tenir sa parole et se lancer dans sa quête. On le voit quitter Camelot et passer par plusieurs péripéties sur sa route, avant de finalement retrouver le chevalier vert et se préparer à recevoir son coup. Il a l’air assez fidèle dans son déroulement à la légende dont il s’inspire, en détaillant plus largement des péripéties seulement évoquées dans le texte.
J’ai bien aimé. Il y avait un côté assez psychédélique, avec des visions que reçoit Gauvain, des événements dont on ne sait pas trop s’ils sont imaginés ou s’ils arrivent parce qu’il y a de la magie dans l’univers. Certains aspects de mise en scène et décors font un peu penser à The Favourite. On retrouve aussi logiquement pas mal de tropes des films de chevalier, notamment les scènes où le héros avance à cheval (ou à pied, Gauvain perd rapidement son cheval dans ce film) dans un paysage désolé, style le Septième Sceau. Visuellement le film était assez beau, avec le paquet mis sur les décors.
Anima, de Wajdi Mouawad
Pour le point de vue d’OC sur le même roman, allez voir ici.
Roman de 2012. Au Québec, une femme est assassinée de façon sordide. Son mari va se mettre à la recherche du meurtrier, à travers le Québec, les réserves indiennes d’Amérique du Nord, les États-Unis. Toute la narration va être faite du point de vue d’animaux présents sur les lieux où le mari se rend.
Le concept est intéressant, mais j’ai été assez déçu par la réalisation. D’une part, le fil narratif à base de femme assassinée pour que des mecs puissent faire des affaires de bonhommes, bof. Surtout que le motif est réitéré plus loin. Y’a d’autres occurrences de violence assez gratuite par ailleurs, et clairement décrites avec trop de détails pour mon goût.
Et de plus, le côté « voix animales » est assez mal rendu je trouve : on passe par plein de narrateurs et d’espèces, mais à part pour quelques unes, le côté préoccupation et perceptions spécifiques à une espèces sont peu rendues : les animaux se préoccupent avant tout de la présence de cet humain spécifique dans leur environnement. Le style est par moment beaucoup trop ampoulé pour moi aussi.
Concept intéressant mais thème et réalisation décevante, je ne recommande pas. Lisez plutôt du Morizot pour des points de vue animaux.
Quinzinzinzili, de Régis Messac
Nouvelle de post-apo française de 1935. Régis Messac imagine en 1935 une seconde guerre mondiale qui éclate l’année même, opposant Allemagne, Japon et Angleterre à la France, l’URSS et les USA. Peu importent les détails du conflit, l’usage d’une arme secrète vient bientôt éradiquer les deux camps entièrement, en répandant du gaz hilarant en quantité mortelle sur tous le globe.
Le narrateur survit parce qu’il était en train de faire de la spéléo dans une grotte en tant que moniteur d’une sortie d’un sanatorium pour enfants. De ce qu’il en sait, l’Humanité se réduit désormais à lui et une demi-douzaine d’enfants, qui régresse à un stade d’intelligence inférieur, s’inventent une espèce de patois pour communiquer et s’encombrent de toute une superstition qui prend de plus en plus de place.
C’est un texte assez misanthrope, avec un narrateur sévèrement déprimé qui méprise totalement les gamins qui constituent les derniers représentants de l’Humanité. La nouvelle décrit leur vie dans ce monde bouleversé, et les relations violentes entre les membres de la communauté, jusqu’à la mort du narrateur. C’était intéressant comme exemple d’une SF post apocalyptique d’époque, mais c’était pas un texte incroyable en soi.
Tomboy, de Céline Sciamma
Mickaël, 10 ans déménage avec toute sa famille dans une nouvelle résidence en raison de la grossesse de sa mère. Il rencontre Lisa, une fille qu’il aime, bien et commence à fréquenter les autres enfants du quartier pendant les dernières semaines d’été avant la rentrée. Mais à la maison, ses parents appelent Mickaël Laure, et sa mère n’est pas très ok avec le fait qu’il ne se reconnaisse pas dans le genre qui lui a été assigné.
J’ai beaucoup aimé. La plupart des acteurs sont des enfants, mais ils jouent super juste. La performance de Zoé Héran dans le rôle principal est très réussie. La petite soeur de Mickaël, Jeanne (6 ans), est un super personnage aussi. Il ne se passe pas énormément de choses dans le film, on voit l’évolution de la relation de Mickaël avec son entourage et ses astuces pour changer sa présentation de genre, mais ça rend très bien.
Je recommande.
The Test, de Sylvain Neuvel
Nouvelle canadienne d’anticipation. Dans le futur proche, un homme qui aspire à être naturalisé citoyen britannique passe le test de citoyenneté pour l’ensemble de sa famille, mais l’examen écrit va être hijacké par un groupe armé. Spoilers ci-dessous.
Continuer la lecture de The Test, de Sylvain NeuvelComment je suis devenu super-héros, de Douglas Attal
Film français produit par Netflix et sorti en 2020. Une France alternative où certaines personnes ont des super-pouvoirs. On suit un policier, ancien agent de liaison d’une équipe de super-héros, désormais flic ordinaire et dépressif, qui est affecté à une enquête sur une drogue qui donne des super-pouvoirs temporaires à des gens ordinaires.
Ça a les qualités et défauts habituels d’un film Netflix : y’a de bons éléments, le côté « super-héros dans un contexte franchouillard » est assez attirant, l’installation de l’univers plutôt réussie. Y’a de bons acteurs (Poelvoorde qui joue un ancien super-héros avec Parkinson est très réussi et très touchant), mais clairement il aurait fallu quelqu’un pour relire le scénario. On n’est pas au clair sur le statut des gens avec super-pouvoirs : on voit que peu deviennent des héros et que ça pose beaucoup de questions psychologiques aux gens avec des pouvoirs qui se sentent surtout différents, mais on ne sait pas pourquoi certains cachent leurs pouvoirs, on sait pas pourquoi les vilains veulent écouler une drogue qui donne des super-pouvoirs, on a une romance qui sert totalement à rien, des gens qui se relèvent magiquement de blessures ultra graves… On a vraiment l’impression qu’ils ont totalement rushé l’écriture, avec des trucs pas résolus dans tous les sens parce que la flemme.
Sur la façon dont c’est filmé, pas de recherche de style particulière, le film est vraiment là pour raconter une histoire. Quelques jolis décors dans un centre commercial abandonnés, pour le reste c’est Paris, filmé à hauteur de passant, ce qui marche bien avec le côté « vie ordinaire mais y’a des pouvoirs ».
Sympa à regarder mais loin d’être inoubliable.
Slalom, de Charlène Favier
Film franco-belge de 2020. Lyz, 15 ans, intègre une classe de ski-études. L’entraineur est cassant avec les élèves, mais quand Lyz se révèle d’un niveau permettant de concourir en coupe d’Europe voire aux JOs, la relation entre l’entraineur et l’élève devient de plus en plus intense et sort largement du cadre professionnel.
C’était bien. Le sujet est dur, mais c’est très bien filmé. Gros travail sur la lumière, avec des contrastes entre les scènes d’extérieur enneigés, les scènes intérieurs, plusieurs plans éclairés avec différentes couleurs. Des jeux de cadrage et de flou assez réussis aussi (la scène où Fred propose au proviseur que Lyz vienne habiter chez lui et où sa réponse à elle est donnée avec son corps à lui qui la surplombe en arrière plan, notamment).
Le film met en scène une relation malsaine mais de façon assez subtile : l’entraineur est cassant et exigeant avec les élèves, mais il n’est pas abusif comme le personnage du professeur dans Whiplash par exemple. La relation qu’il développe avec Lyz est clairement plus que problématique et en tant qu’adulte il aurait dû y mettre un stop très tôt, mais le film montre un intérêt et des avances de la part de Lyz – et montre aussi qu’au moment où les choses se concrétisent elle est totalement sous le choc : elle n’avait aucune envie que ça se réalise de la façon dont ça s’est réalisé. Les deux scènes de sexe sont d’ailleurs très très bien filmées, et dures à regarder, on voit de façon explicite l’absence totale de consentement de Lyz, tétanisée par ce qui se passe.
On montre aussi comment Fred, l’entraineur, se projette aussi dans les succès de Lyz, y voyant visiblement une façon d’avoir une deuxième chance, sa propre trajectoire de sportif ayant été coupée courte par une blessure : il s’approprie le corps de Lyz, sexuellement mais aussi sportivement. Il y a quelques longueurs dans le film, mais globalement très bon premier film, je recommande.
Franchise John Wick, de Chad Stahelski
Trois films pour le moment. John Wick, un tueur à gages qui a changé de vie, replonge dans le milieu du crime contre son gré à la mort de sa femme, quand un mafieux tue son chien. Son retour va le lancer dans une fuite en avant où il sera forcé de s’attaquer à ou de se défendre contre des organisations de plus en plus puissantes, et donc contre des hordes de tueurs.
J’ai bien aimé la franchise. Le premier film est un peu poussif : une belle séquence de combat dans une discothèques, quelques autres séquences de combat sympa, mais sinon ça installe surtout l’univers. Les deux et trois sont plus réussis : les enjeux et le contexte sont posés, l’univers et sa mécanique peuvent se dérouler.
Plusieurs points intéressants :
- l’univers lui-même, où il existe un monde parallèle du crime organisé, avec des règles, une hiérarchie, des lieux secrets et des services spécifique, même une monnaie et toute une bureaucratie qui tient à jour les registres et communique les infos (les communique notamment par texto aux milliers de tueurs à gages qui ont l’air d’exister un peu partout dans cet univers, genre une personne sur deux bosse pour une mafia).
- une certaine recherche formelle sur l’image. C’est pas le cas tous le temps, et assez peu dans le 1 à part dans la discothèque, mais il y a des plans intéressants pour un film d’action. Le film est fait pour mettre en valeur les cascades perpétuelles, et je pense que c’est ce qui pousse à ces moments intéressants : je pense notamment à la séquence dans l’exposition « reflections of the self » dans le II et dans l’espèce d’espace d’exposition chelou dans le III. Dans les deux cas on a une disparition ou une abstraction du décor, qui laisse toute la place dans l’image aux personnages et à leurs affrontements. Dans un autre style, dans le trois la séquence de combat dans les vitrines d’arme dans le III, la fin du I sur les docks, les combats à motos, sont très travaillés et les séquences très fluides. Dans les deux cas on a une esthétique qui se rapproche de celles de jeux vidéos. Il y a dans le trois une belle inventivité sur les séquences de combat d’ailleurs (là ou I et II c’est plus « des guns des guns des guns », le III varie largement les armes). Les films sont par ailleurs fractionnés en séquences assez différentes les unes des autres, notamment le II qui fait très film anthologique : on a un début qui rappelle le I en autoparodique, une séquence de préparation de heist movie, un combat dans des catacombes éclairées de manière très laide, la séquence expérimentale du musée, puis la monte de la parano de la fin. C’est intéressant mais en même temps ça fait un film avec disjoint et dont des passages pourraient être retirés sans peine.
- une certaine épure de l’histoire : c’est pas le cas tout le temps et je trouve qu’il y a des passages qui sont trop longs, mais globalement les films posent les enjeux rapidement et même s’il y a un univers riche, il reste en arrière plan et on se concentre sur ce que le film vend : la bagarre la bagarre la bagarre. De ce point de vue d’ailleurs le crescendo d’un film à l’autre est très réussi : il n’y a finalement jamais de résolution en fin de film, on empile les enjeux au fur et à mesure (en contrepoint, toute la séquence avec « the elder » dans le III ne sert franchement à rien et aurait dû être coupée à mon sens). Le côté paranoïaque de la fin du II et l’isolation générale de John Wick dans un univers hostile permettent de faire fonctionner cette mécanique, mais je ne sais pas sur combien de film encore ce sera tenable.
Globalement j’ai bien aimé malgré des longueurs ; c’est un pur film d’action et de cascade, mais avec une volonté de pousser son sujet à fond qui marche bien et donne un résultat intéressant.
Une vidéo de Bolchegeek sur ce que la franchise dit du contrat social et comment elle le met en scène : John Wick et le contrat social.