Archives par mot-clé : recommandé

Klaus, de Sergio Pablos

Film d’animation de 2019. Jesper, un fils de bonne famille qui n’aspire à rien d’autre qu’à être rentier est envoyé par son père, directeur du service des Postes de Norvège, sur une petite île isolée où les habitants sont divisés en deux factions qui se détestent et se pourrissent la vie perpétuellement. Là, il doit reprendre le bureau de poste à l’abandon et réussir à faire fonctionner le service à hauteur de 6000 lettres envoyées dans l’année s’il veut espérer revenir sur le continent et reprendre sa vie oisive. Évidemment, les habitants vivant en circuit fermé et se détestant n’ont aucune raison d’envoyer du courrier. Mais Jesper va découvrir un habitant qui n’appartient à aucun des deux clans, un bûcheron qui vit isolé en ermite dans une maison remplie de jouets en bois. Il va élaborer un stratagème pour persuader les enfants d’envoyer des lettres au bûcheron pour leur demander des jouets, et peu à peu, les actions de Jesper vont donner forme au mythe du père Noël.

J’ai beaucoup aimé. C’est très bien animé, l’histoire est originale, les rebondissements réussis, les personnages principaux comme secondaires attachants. Les crasses que se font les deux clans marchent très bien en tant que gags visuels, la relation entre Jesper et Klaus (et plus anecdotiquement entre Jesper et le marin) est bien caractérisée avec juste quelques éléments.

Je recommande.

Baltimore, de Mike Mignola

Durant la première guerre mondiale, Henry Baltimore, un soldat anglais, blesse un vampire qui se nourrissait d’un soldat agonisant sur le champ de bataille. Cet événement déclenche une guerre entre l’Humanité et les forces surnaturelles, réveillées d’un long sommeil. Le comics va suivre les tribulations de Baltimore et de ses alliés à travers l’Europe pour tente de mettre fin aux différentes manifestations du surnaturel qui se déclenchent ici et là, alors que les vampires et des congrégations de sorcières préparent le retour du Roi Rouge, un Grand Ancien.

J’ai beaucoup aimé. J’ai les premiers tomes chez moi mais je n’avais jamais eu l’occasion de lire la seconde partie du comics, là j’ai tout relu d’un seul coup. J’aime beaucoup l’ambiance du comics et le dessin de Mignola. Le setup de la fin de la première guerre mondiale marche bien pour une histoire surnaturelle, et j’aime beaucoup le dessin de Ben Stenbeck, qui reprend bien le style de Mignola mais le rend plus lisible à mon sens (j’ai été moins convaincu par le dessin des autres dessinateurs mais je pense que c’est aussi une question d’habitude). Et les couleurs de Dave Stewart fonctionnent super bien avec l’ambiance de l’histoire.

Je recommande chaudement si vous aimez les trucs horrifiques.

Pour l’autodéfense féministe de Mathilde Blézat

Essai féministe de 2022. L’autrice a rencontré des formatrices et des participantes à des stages d’autodéfense féministe dans différents pays (principalement francophones) et se réclamant de différentes méthodes. Elle retrace l’histoire de ces formations, leur relation à d’autres courants du féminisme, la difficulté d’obtenir des subventions pour ces actions qui relèvent pourtant de la prévention contre les violences sexistes – difficulté qui existe partout mais est encore plus présente en France avec son obsession de l’universalisme et les cris d’horreurs dès qu’on évoque une activité en non-mixité.

Elle s’attarde sur l’impact de ces stages sur les participantes, comment le stage change leur relation à leur corps, à l’espace public, aux autres. Elle détaille aussi comment les formatrices sont en réflexion sur les modalités permettant d’organiser des stages spécifiquement à destination de certains publics : femmes mineures, âgées, handicapées, trans… pour permettre une plus grande inclusivité de ces stages.

C’était fort intéressant et sur un sujet que je ne connaissais pas, je recommande.

Glass Onion, de Rian Johnson

Film étatsunien sorti en 2022, et suite de Knives Out (les deux peuvent se voir indépendamment, ce sont deux enquêtes du même détective).

Durant le confinement, le magnat de la tech Miles Bron invite ses plus proches amis sur son île privée, pour une murder party. Mais le détective Benoit Blanc a aussi reçu une invitation, non-envoyée par Miles Bron. Il va enquêter pour comprendre les relations entre les membres du groupe et découvrir si l’un d’entre eux veut profiter de la murder party pour commettre un meurtre tout ce qu’il y a de plus réel.

J’ai bien aimé. L’esprit de Knives Out est bien conservé, mais le récit, au lieu de rester confiné au cadre d’une famille, prend une portée plus large, à la fois dans les décors (île grecque magnifique qui fait penser à Mamma Mia, avec une maison totalement délirante dessus) et dans le commentaire social sur les «  »élites » » mondiales. Le film met longtemps à mettre les choses en place avant de vraiment nous révéler les suspicions de Benoît Blanc. Y’a pas mal de mislead plutôt réussi, ça fait de nouveau un fort bon film policier.

Je recommande.

Enchanted, de Kevin Lima

Film des studios Disney paru en 2007. Une princesse de conte de fées se retrouve projetée à New York par le pouvoir d’un sortilège. Son prince va tenter de la retrouver, pendant ce temps elle découvre le fonctionnement d’un monde fortement différent du sien, et rencontre un charmant avocat qui élève seul sa fille.

J’étais agréablement surpris ; pour un film Disney qui mélange comédie romantique et pseudos conte de fée, l’œuvre connaît très bien ses tropes et joue très bien avec. J’ai quelques questions sur pourquoi la magie fonctionne dans notre univers pour les personnages de l’univers des contes de fée, mais rien qui n’empêche de profiter du film. Les personnages ont aussi une tendance à se téléporter et à se débrouiller pour être au bon endroit au bon moment pour mettre en place leurs plans (surtout l’homme de main de la grande méchante), mais c’est assez assumé je pense en termes de conventions narratives. Pour le reste, c’était sympa, peut-être qu’il y aurait eu moyen de subvertir davantage le concept de True Love’s Kiss, mais sinon ça réussit bien son trip de comédie romantique.

Bonne surprise.

It’s Lonely At the Centre of the Earth, de Zoe Thorogood

Comic autobiographique d’une dessinatrice anglaise, parlant de sa dépression, des attentes (les siennes et celles des autres) sur ce que vont être sa vie et son œuvre maintenant que son premier comic a connu du succès.

J’ai pas mal aimé. C’est assez méta, avec plusieurs styles de dessins qui s’entremêlent, plusieurs incarnation de Zoe qui s’interpellent les unes les autres, une tentative de rebooter la bédé de façon plus positive et linéaire à mi-chemin. Le côté introspectif (et dépressif) m’a fait penser à du Carrère, d’une certaine façon. La mise en récit graphique d’une dépression m’a aussi fait penser à C’est comme ça que je disparais, de Mirion Malle, mais j’ai préféré It’s lonely… dans sa mise en forme.

Plan 75, de Chie Hayakawa

Film japonais paru en 2022. À 20 secondes dans le futur, le Japon a adopté une loi, le Plan 75, permettant aux personnes de plus de 75 ans de se faire euthanasier, pour lutter contre le vieillissement de la population. En échange de cet acte citoyen, les volontaires reçoivent 100 000 yens (~800€), leur permettant de financer leurs obsèques, de s’offrir un restau ou un hôtel pour leurs dernier jours. On suit plusieurs point de vue, un jeune cadre du Plan 75, deux travailleuses, une dans un centre d’euthanasie et une à la hotline du Plan, et quelques candidat.e.s au Plan.

J’ai beaucoup aimé. Le film montre très bien comment il s’agit d’une politique classiste, visant à littéralement tuer les plus pauvres (le Japon ayant un système de retraite merdique, on suit notamment un groupe de femmes de ménage qui travaillent encore à 75 ans révolus), avec des incitations à s’inscrire au plan dans les soupes populaires, les agences d’aide sociale… C’est aussi très bien filmé en terme de mise en scène des plans, jeux sur la profondeur de champ, scènes qui s’attardent sur des détails comme une branche d’arbre ou de la neige qui fond sur un pare-brise. Très bonne surprise.

L’Astronaute, de Nicolas Giraud

Film français de 2023, vu en avant-première au festival des Œillades. Jim Desforges est un ingénieur en aéronautique chez Ariane. Il a candidaté pour être astronaute en 2009, mais a été classé 3e : non sélectionné. Il est cependant resté obsédé par l’idée d’aller dans l’espace, et détourne des pièces au boulot pour construire dans une grange sa propre fusée, avec l’objectif de réaliser le premier vol spatial amateur. Une reproduction du vol de Leonov, un tour de la terre et une sortie extra-véhiculaire. Pour ce faire, il va s’entourer d’un ami chimiste, d’un ancien astronaute, d’une mathématicienne et de sa grand-mère.

Sans être révolutionnaire, c’était plutôt sympa. Les rôles féminins ne sont pas très développés, c’est un film qui se concentre sur les personnages masculins, en mode « des mecs à l’ancienne », ie des ingénieurs ou geeks taiseux, obsédés par un projet particulier. Mais dans ce créneau ça marche bien. On a plein de plans sur les pièces de la fusée en train d’être construite, un convoi exceptionnel, le lever de la fusée à la grue : plein de scène bien filmées qui parlent totalement aux amateurs de grosses machines (oui, j’étais pas mal dans le cœur de cible, je pense). La photographie, notamment des scènes de nuit ou dans la montagne est bien réussie.

Nickel Boys, de Colson Whitehead

Roman états-unien publié en 2019, inspiré de faits réels. On suit la vie d’Elwood Curtis durant son enfance à Tallahassee (Floride), durant son incarcération à la maison de redressement Nickel et durant sa vie d’adulte à New York des années plus tard. Nickel est un endroit atroce, où les enfants sont battus, et inspiré d’une maison de redressement réelle, Dozier. Le roman est court mais prenant (et secouant).

Je le rapproche de Delicious Foods pour le sujet traité, mais ce n’est pas la même période temporelle – et pas le même style d’écriture.

Le Génie Lesbien, d’Alice Coffin

Essai politique sur le féminisme, le lesbianisme militant et le journalisme situé, dans le contexte de la France contemporaine.

Je n’ai pas appris grand chose dans la première partie sur l’importance de la représentation et les questions de « neutralité journalistique » vs « point de vue situé », mais si vous ne connaissez rien au sujet je pense que c’est une bonne introduction.
Par contre j’ai été très intéressé par les éléments sur la participation des militantes lesbiennes dans plein de combats politiques qui les concernait parfois mais parfois pas – j’avais entendu parlé de certains points de loin et d’autres pas du tout, c’était intéressant d’avoir une synthèse du sujet.

Je recommande.