Silo x Underground Railroad
Roman de science fiction. L’histoire prend place à bord du Matilda, un vaisseau spatial générationnel qui a quitté une Terre dévastée des centaines d’années auparavant en quête d’une nouvelle planète habitable. Le vaisseau est organisé en ponts, avec une stricte stratification sociale et raciale : la classe dirigeante blanche vit dans les ponts A, B, C… et les travailleurs noirs vivent dans les ponts N, O, P, Q…
L’héroïne, Aster, est une docteure noire et neurodivergente, qui cherche à percer le mystère de la disparition de sa mère, alors que l’agonie du Souverain est annonciatrice de changements (en pire) dans la politique du vaisseau…
C’est assez difficile à décrire parce que c’est très riche. J’ai trouvé ça très réussi en termes de description de l’univers : on rentre tout de suite dans le quotidien du vaisseau générationnel, y’a une foultitude de détails, l’univers semble dense et plein de détails, pas juste une toile de fond pour que l’histoire de l’héroïne se déroule. Le côté racisme futuriste et abus quotidiens est très réussi aussi (d’ailleurs trigger warnings sur de la violence physique, psychique et sexuelle) : on n’a aucun mal à croire à ce vaisseau aux principes physiques de fonctionnement ultra avancés mais avec des dynamiques sociales particulièrement réactionnaires. La résolution finale ne m’a pas entièrement convaincu, mais c’est un point assez mineur par rapport à la réussite du reste du roman.
Les personnages sont aussi très réussi : en premier lieu l’héroïne, dont Rivers Solomon retranscrit superbement le monologue intérieur, sa difficulté à appréhender certaines situations et certains indices comportementaux et les mécanismes qu’elle a mis en place pour suppléer à ces problèmes, ses demandes de confirmation à ses interlocuteurs, sa frustration devant les métaphores et les sous-entendus.
Mais ça ne s’arrête pas à l’héroïne, les personnages secondaires sont très réussis aussi. Je vais pas détailler chaque, mais le personnage de Giselle, ses comportements auto-destructeurs et abusifs sont vraiment très réussis. Sa relation à Aster est complexe et ultra intéressante, c’est un personnage devant lequel il est impossible de ne pas être ambivalent. Plus en retrait dans l’histoire, le personnage d’Aint Melusine est aussi pourtant très bien caractérisé, la présence maternelle dans la vie d’Aster et Giselle. Le point de vue de la narration adopte le sien pour un unique chapitre, et ça lui donne instantanément une profondeur supplémentaire.
Grosse recommandation.