Archives de catégorie : Culture/Procrastination

U are the universe, de Pavlo Ostrikov

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Film de science-fiction ukrainien paru en 2024. Andriy est pilote de vaisseau pour le compte d’une société qui envoie les déchets nucléaires terrestres sur Callisto. Il effectue des voyages de 4 ans dans l’espace, avec pour seul compagnon un robot archaïque, Max-5. Lors d’un de ces voyages, il assiste à l’explosion de la Terre. Désormais dernier représentant de l’espèce humaine, il est confronté à un vertige existentiel.

J’ai beaucoup aimé l’esthétique, en mode vaisseaux bringuebalants. Le design de Max-5, qui est un gros terminal avec un bras articulé qui se déplace sur un rail au plafond du vaisseau fonctionne très bien. L’histoire globale par contre est logiquement assez déprimante vu le point de départ, surtout la fin. On n’est pas sur de la SF réaliste, y’a pas mal de suspensions d’incrédulité (sans que ce soit du pseudo métaphysique à la Interstellar, ça reste avec une certaine dose de réalisme).

Bon et puis évidemment en terme de contexte de production du film, un film ukrainien qui parle de la fin du monde produit depuis le début de la guerre en Ukraine, c’est assez marquant.

Den stygge stesøsteren, d’Emilie Blichfeldt

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Film norvégo-polonais sorti en 2025, qui raconte le conte de Cendrillon du point de vue de sa belle sœur, qui espère épouser le prince du royaume mais est considéré par tous, et notamment par sa mère, comme laide. Pour avoir une chance de séduire le prince (et de sortir sa famille de la misère), elle va accepter une série d’opérations de chirurgie esthétique d’époque et se conformer de plus en plus à des standards de beauté impossibles.

C’était pas mal. Du body horror par moment assez trash, donnant une relecture du conte intéressante (avec une protagoniste matrixée par l’imaginaire des contes de fées et le recueil de poèmes du prince alors que le vrai prince est un sacré connard, et très fleur bleue là où Cendrillon est plus pragmatique et délurée. Les personnages sont tous assez archétypaux, sauf peut-être la petite soeur de la protagoniste (la 2e belle-soeur, donc, mais qui ne rentre pas du tout dans le délire familial d’épouser le prince, cache ses règles à sa mère pour ne pas encore être considérée comme mariable et globalement à une vibe Rebelle assez réussie).

TW body horror, mais intéressant.

Hellboy: The Crooked Man, de Brian Taylor

Film fantastico-horrifique sorti en 2024. Adaptation d’un comics sur les pérégrinations du jeune Hellboy qui rencontre plein de créatures maléfiques. En l’occurrence c’est une incarnation du diable dans les Appalaches, en mode folk horror.

J’avais bien aimé la série de comics sur les jeunes années d’Hellboy, mais j’ai été très peu convaincu par cette adaptation en film. D’une part je pense que y’a des choses qui passent en comics qui marchent beaucoup moins en live action (la pelle bénite notamment), d’autre part c’était assez léger en scénario, dans le mythe général d’Hellboy c’est une histoire parmi d’autre, mais ça tient assez mal debout en tant que standalone.

Rumours, de Guy Maddin

Film canadien de 2024. Lors d’un sommet du G7, les dirigeants réalisent soudain qu’il n’y a plus personne autour d’eux. Ils vont tenter de rejoindre la civilisation tout en continuant de travailler sur un « provisional statement » résumant leurs discussions concernant une crise géopolitique jamais explicitée. En réalité, ils vont surtout marcher dans les bois, se remémorer d’autres sommets du G7, discuter de leurs émotions, et se demander si la fin du monde est arrivée.

C’était… étrange. Il y avait un côté très soap opéra (y’a environ 9 acteurs, qui se baladent dans des bois éclairés à la lumière rouge, ça a pas dû être très coûteux comme tournage), mais avec un casting de stars (Cate Blanchett comme chancelière allemande), globalement c’est trippant mais il se passe pas grand chose, plein de pistes ouvertes mais pas refermées (l’origine de l’apocalypse en cours notamment, qui est attribuée successivement à plein de causes possibles mais rien n’est jamais établi). Un petit côté Mélancholia dans la conclusion où les chefs d’État lisent leur discours devant personne alors que le monde touche à sa fin.

The VVitch, de Robert Eggers

Film étatsunien de 2015. Dans l’Amérique des tous débuts de la colonisation, une famille de Puritains part vivre loin de tous les autres colons suite à des différents religieux. Tentant de subsister sur une ferme isolée où les récoltes sont mauvaises, la famille fait face à la disparition inexpliquée du plus jeune enfant, et suite à plusieurs phénomènes potentiellement paranormaux, va se déchirer, s’accusant mutuellement d’avoir pactisé avec le diable et perdu la foi.

Le côté reconstitution d’époque était intéressant. Il y a effectivement des événements paranormaux dans le film, mais vu l’environnement de la famille et ses croyances, il n’y avait pas besoin qu’ils soient là pour qu’ils se déchirent. Les deux jumeaux qui courent dans tous les sens et rendent dingue leur grande sœur suffisent bien. Après c’est quand même assez lent, il ne se passe pas grand chose pendant une bonne partie du film, mais l’ambiance est bien posé, bande-son bien discordante qui fonctionne bien pour plonger dans le côté angoissant.

Heretic, de Scott Beck et Bryan Woods

Film d’horreur états-unien paru en 2024. Deux missionnaires mormones arrivent à la porte de M. Reed, un potentiel prospect pour une conversion. Mais si Reed a bien demandé à être recontacté par des missionnaires, ce n’est pas pour une conversion. Il prétend avoir une preuve de ce qu’est la religion originelle dont toutes les autres seraient des dérivées, les missionnaires ont juste à aller au fond de sa maison pour la découvrir.

J’ai beaucoup aimé. Reed est joué par un acteur connu totalement à contre-emploi par rapport à ses rôles habituels, et ça marche très bien. Il joue bien le psychopathe qui sait charmer son auditoire et jouer sur la sidération. Globalement la dynamique du film qui repose sur beaucoup de dialogues – d’abord Reed en roue libre devant son auditoire captif (avec une dynamique genrée évidente du mec plus âgé qui expose ses théories à deux jeunes femmes) puis les réponses de missionnaires qui arrivent à sortir de la dynamique qu’il cherche à imposer – est réussie. Le côté maison fucked up qui est un de mes petpeeves de film d’horreur est bien rendu, avec la thématique de la descente progressive.

Recommandé.

Children of Memory, d’Adrian Tchaikovsky

Troisième tome dans la trilogie Children of, après Children of Time et Children of Ruin. On retrouve notre civilisation interespèces composée d’Humain.es, de Portides, de Céphalopodes et de microbiote Nodien (si vous ne comprenez rien, lisez les deux tomes précédents !), ou plutôt l’équipage d’un vaisseau d’exploration issue de cette civilisation (globalement ce roman va resserrer le cadre à quelques personnages, on est loin de la dimension space opera des deux tomes précédents), qui va visiter deux planètes qui faisaient partie des projets de terraformation de l’Ancien Empire Terrien : Rourke, puis Imir. Sur la première, une nouvelle espèce dont l’intelligence fonctionne seulement par paires d’individus hyperspécialisés, sur la seconde une colonie d’humain.es isolés, issu.es d’un vaisseau-arche mais dont la technologie a régressé et dont le monde est au bord de l’effondrement écologique (voire, l’a franchi et court dans le vide) et aux abois. Une mission d’observation va s’infiltrer dans la colonie pour déterminer selon quelles modalités le premier contact serait possible avec cette civilisation post-spatiale qui s’imagine un ennemi de l’intérieur au fur et à mesure que ses conditions de vie empirent. Dans cette situation on suit notamment Liff, enfant dont les souvenirs semblent contradictoires entre eux ou directement sortis de son livre de contes, ce qui laisse planer quelques interrogations sur les mécanismes de ce qui se trame sur Imir…

J’ai vu pas mal de critiques négatives sur internet, mais perso j’ai bien aimé. C’est pas au niveau de Children of Time, mais pour moi ça vaut Children of Ruin, juste pas du tout dans le même style space opera. Il y a quelques longueurs, mais la narration avec des aller-retours dans le temps fonctionne bien pour moi. Le côté conte de Grimm et la perception de certains membres de la civilisation interespèces par le regard d’une enfant humaine « à l’ancienne » marche plutôt bien (Avrana Kern en sorcière ou « Paul et ses enfants », c’est limite une fanfic de l’univers déployé jusqu’ici par l’auteur), et rejoint ce que Tchaikovsky avait fait dans Elder Race. Les questionnements sur l’identité déployés par l’auteur avec les différentes versions de Miranda (et de Kern dans une moindre mesure) fonctionnent bien pour moi (ceux sur la conscience aussi, mais c’était déjà le cœur des deux tomes précédents, c’est pas la nouveauté ici).

Recommandé.

Survivre, de Frédéric Jardin

Film français paru en 2024. Une famille est en croisière sur un bateau au large de Cuba lorsque l’inversion des pôles fait disparaitre la mer sous le bateau (l’océan part sur les continents (???) pendant que le bateau reste sur place (????)). Bon, on va accepter cette prémisse. Depuis leur bateau échoué sur le désert, les 4 protagonistes vont devoir atteindre un bathyscaphe à quelques jours de marche, pour y trouver refuge en prévision du retour de la mer à son emplacement originel quand les pôles vont se réinverser.

J’aime bien regarder des films de genre français, et le côté « randonnée dans un désert parsemé de poissons morts et de bateaux échoués » est trippant (mention spéciale au porte-conteneurs), mais l’histoire de la famille Ricoré était quand même très peu intéressante. C’était pas non plus Abigail en termes de personnages nuls, mais c’était pas passionnant.

J’ignore comment tout cela va finir, de Barry Graham

Recueil de nouvelles paru en 2023 (en France, mais il n’a pas d’équivalent en VO). Des Écosssais, adultes ou enfants, ont des histoires de vie. J’ai beaucoup aimé les nouvelles Elle ressemblait à Tom Hanks et Une chanson d’amour, peut-être, toutes les deux sur une relation amoureuse. Les autres m’ont un peu moins parlé mais globalement j’aime bien le sentiment qui se dégage du recueil.

L’Origine des Larmes, de Jean-Paul Dubois

Roman français de 2024. Lors de sessions de psychothérapie prescrites dans le cadre d’une obligation de soins, Paul raconte à son psy sa relation avec son père, qu’il considère comme l’incarnation du mal, et comment les actes de ce père l’on conduit à lui tirer dessus… après sa mort. Le livre se passe en 2031, dans un Toulouse où le changement climatique a mené à des pluies persistantes, mais ce n’est pas de la SF pour autant, les pluies sont plus le reflet de l’état intérieur du personnage. On suit la jeunesse, l’adolescence et l’âge adulte de Paul, et les diverses actions de son père, qui sont à chaque fois d’une méchanceté mesquine : ce n’est jamais en mode génie du mal, mais c’est toujours de la cruauté gratuite envers Paul, sa mère ou des gens randoms, une vie au service de la banalité du mal et à se faire du fric avec des combines minables à base de médicaments périmés revendus sous le manteau. Paul en ressort bien dysfonctionnel mais attachant, travaillant dans l’entreprise maternelle de housses mortuaires et ayant pour seules relations affectives des chiens.

Le roman était sympa, mais je n’ai pas été transporté non plus.