Roman français paru en 2025. Après le kiff que j’avais eu en lisant Fantaisies guérillères, j’ai voulu lire le suivant de l’auteur. On est sur la fin de l’empire romain, Héliogabale accède au pouvoir. On va suivre son ascension et sa chute à travers les yeux d’Aquila, vestale qui va l’épouser, les siens et (brièvement) ceux d’Hiéroclès, un de ses amants. C’était pas désagréable à lire mais j’ai pas du tout apprécié au même niveau que Fantaisies, mais le dispositif est assez différent, pas d’Histoire secrète et de paranormal, pas 15 000 références à la pop culture.
Archives de catégorie : Des livres et nous
A little life, de Hanya Yanagihara
ALL THE TRIGGER WARNINGS
Roman étatsunien paru en 2015. Willem, JB, Malcom et Jude sont cothurnes à l’Université. JB et Malcolm viennent de famille relativement aisées et aimantes, le passé de Willem et Jude est plus troublé. Après une première partie où le livre va décrire la vingtaine des trois premiers, leur caractère, leur relation, le livre va de plus en plus se focaliser sur la vie de Jude, de sa rencontre des trois autres à sa mort, avec des flashbacks sur son enfance. C’est bien écrit, c’est prenant (j’ai lu les 700 pages en anglais en moins de 5 soirs), mais c’est fucking dark. On comprend rapidement que l’enfance de Jude a été l’enfer sur Terre (et si au départ le livre l’évoque à mot couvert, on finit par en savoir beaucoup plus – sans que ce soit du tout graphique, mais on est mis dans la peau de Jude à cette époque), et que la perception qu’il a de lui-même, de ce qu’il peut attendre des relations avec les autres en a été a jamais affecté. Et même si sa vie adulte est globalement très confortable (même s’il y aura aussi des trucs atroces, parce que ce roman, l’ai-je mentionné, est super sombre), il est incapable de sortir de ses schémas de pensée. J’ai tendance à être émotionnellement impliqué dans mes lectures, mais j’ai lâché le bouquin plusieurs fois pour pleurer.
Au delà du sujet donc, le livre est globalement très bien, quelques faiblesses cependant : on voit venir l’outcome de la relation Harold/Jude d’assez loin (mais tout le reste du roman était largement moins prévisible), et globalement à l’âge adulte l’ensemble des personnages et des gens qu’iels fréquentent vivent quand même dans un monde enchanté où tout le monde est upper-class (ils ont lâché tous leurs potes pauvres ou quoi ?) et sans préjudice (ni racisme ni homophobie, alleluia), ce qui clashe un peu avec l’horreur du reste.
Bref, c’était un bon roman, mais du rare genre « bon mais jamais je recommande à personne de lire ça ».
Journal pauvre, de Frédérique Germanaud
Roman? français de 2018, qui couvre l’année scolaire 2014-2015. L’autrice raconte son quotidien durant une année où elle a pris un congé sabbatique (qui débouchera sur une rupture conventionnelle) pour avoir plus de temps à consacrer à elle-même et à son activité d’écrivaine. Divisé en 12 chapitres qui couvrent autant de mois, l’autrice raconte son quotidien par fragments, le temps qu’elle a pour se consacrer davantage à l’écriture et à d’autres projets, ou pour faire des activités liés à la frugalité : glaner des fruits, marcher au lieu de prendre les transports en commun…
Lorraine brûle, de Jeanne Rivière
Roman français de 2025. La narratrice vit à Metz, joue dans des groupes de punk et d’autres styles non commerciaux, élève son fils de 12 ans – Tarzan – et deux cochons d’Inde, travaille à Nancy et se tape 2h de TER par jour, vole dans les supermarchés et bois des coups avec ses copines.
C’est la chronique d’une vie précaire et par moment bien merdique (suicides et cancers d’ami.es notamment), mais aussi avec plein de bons moments. Sympa à lire mais pas renversant. Un style avec des chapitres courts conclut à chaque fois par un factoïde de la narratrice sur les piscines qu’elle fréquente, où la nage est un moyen de s’échapper temporairement du monde.
The Ten Thousand Doors of January, d’Alix E. Harrow
Roman fantastique étatsunien paru en 2019. Années 1900. January Scaller est élevée par son tuteur dans une opulente propriété du Vermont et le respect d’une multitude de règles. Son père parcourt le monde pour trouver des curiosités archéologiques, elle ne le voit que rarement. Un jour, January découvre au milieu d’un champ au centre des États-Unis une porte qui mène à une falaise au dessus d’un océan. En parallèle, un livre qu’elle trouve par hasard dans sa maison va lui en apprendre davantage sur ces portes entre les mondes et sur deux de leurs utilisateurices.
C’était pas désastreux mais c’était clairement sous-exécuté par rapport au concept de départ. On voit venir certaines révélations à des kilomètres. Les personnages positifs sont attachants mais vraiment trop des goody-two-shoes, et les méchants sont entièrement maléfiques. Après l’autrice écrit bien donc on se laisse porter, mais de la même autrice lisez plutôt The Once and Future Witches, ou pour le même thème mieux traité lisez His Dark Materials.
Médée et ses enfants, de Ludmila Oulitskaïa
Roman russe paru en 1996. Médée Sinopli habite en Crimée. Dernière descendante d’une famille grecque de Tauride à habiter sur place, elle représente une forme de continuité pour les habitants du village où elle demeure, ainsi que pour sa famille éparpillée dans l’URSS. On suit à la fois un été des années 70 où (comme chaque été) ses neveux et nièces à des degrés divers viennent lui rendre visite, et l’histoire des différents membres de la famille depuis la mort des parents de Médée jusqu’à la mort de Médée elle-même.
C’était bien. Un côté portrait de famille plutôt réussi (avec en toile de fond les évolutions politiques de la région au cours du XXe siècle, mais comme la famille s’en tient le plus éloigné possible, c’est vraiment lointain).
Fantaisies guérillères, de Guillaume Lebrun
Roman fantastique français publié en 2022.
France, Guerre de 100 ans. Le camp français est dans la panade, et ça ne va guère à Yolande d’Aragon qui a fait un rêve prophétique. Il faut redonner foi à la soldatesque et à la noblesse. Pour ça, rien de tel qu’une figure charismatique, et on ne peut pas dire que le roi ou son héritier coche les cases pour ça. Yolande va donc devoir créer cette figure emblématique : c’est la genèse du Jehanne Project.
Gros banger. Le mythe de Jeanne d’Arc revisité avec de l’Histoire secrète, du fantastique, plein de références (Céline Dion en pseudo ancien français <3), un langage ultra inventif. La conclusion est peut-être un peu plus faible que le reste, mais vu le niveau de base ça reste très très bien.
Estoit belle et bionne recommandation.
The Octopus and I, d’Erin Hortle
Roman australien publié en 2020. Suite à un cancer du sein et une mastectomie puis chirurgie esthétique réparatrice, Lucy souffre de dysmorphie. Insatisfaite à la fois de son corps et du soutien du bout des lèvres de son partenaire, elle va se rapprocher de deux femmes plus âgées pour apprendre à pêcher les pieuvres. Mais si la sororité qu’elle y trouve la comble, elle se rend rapidement compte que son affect pour les pieuvres l’empêche de les tuer. Les pieuvres vont même devenir le symbole de la réappropriation de son corps. En parallèle, on suit les tensions autour des enjeux de l’écologie et de la pêche dans le sud de la Tasmanie où habite Lucy.
J’ai bien aimé, après quelques chapitres pour rentrer dedans. Les personnages masculins sont assez stéréotypés et la romance un peu téléphonée, mais pour le reste le roman est bien écrit, on se sent lié à la Tasmanie en le lisant. La description d’une communauté où tout le monde connait tout le monde et où le rythme de vie semble plus dicté par la nature que par le travail fait envie (même si la narration met aussi en avant les désavantages type commérage (et flic de petite ville totalement imbu de sa parcelle de pouvoir). Les chapitres écrit du point de vue des animaux fonctionne bien (peut-être un peu moins celui du point de vue du puffin). Les thématiques féminisme et écologie sont plutôt bien traitées (et le fait que le perso qui a raison du point de vue écologique ne soit pas pour autant parfait mais au contraire assez agaçant et hypocrite sur certains points (sans que ça ne lui donne tort pour autant) rend l’histoire plus intéressante que si c’était manichéen.
Recommandé si vous aimez bien l’Australie et les céphalopodes.
Ta promesse, de Camille Laurens
Roman français paru en 2025. Claire Lancel est une écrivaine connue. Elle commence ube relation amoureuse avec Gilles Fabian, metteur en scène de théâtre de marionnettes. Ce qui commence comme une romance parfaite se révèle être du lovebombing : Claire est tombée sur un pervers narcissique, et la mécanique de l’emprise va se mettre en place progressivement, jusqu’à un évènement qui va conduire à un procès, durant les préparatifs duquel la narration se déroule : on assisté aux échanges de Claire avec son avocate et de plusieurs témoins avec le juge ou le substitut du procureur.
C’était pas mal. Ya un petit côté « l’emprise chez les riches » parce que tous les personnages ont un gros capital culturel et pour certains un gros capital financier aussi, mais l’histoire est prenante et bien racontée, le côté autofiction et mise en abyme par Claire de sa situation rajoute une couche de meta.
Le Dahlia Noir, de James Ellroy
Roman policier étatsunien paru en 1987 et dont l’action a lieu en 1947 et dans les 3 années qui suivent. Suite à un meurtre particulièrement horrible, une grosse partie de l’effectif du LAPD est affectée à l’enquête subséquente, au détriment de d’autres cas. On suit le point de vue de Bucky Bleichert, un détective qui va, tout comme son partenaire, devenir obsédé par l’affaire, malgré son exaspération initiale pour les moyens qui y sont alloués. En suivant les différentes pistes potentielles, Bleichert va découvrir des cas de corruption policière, lui même dissimuler des preuves, voir son partenaire se perdre dans l’affaire…
Un classique du roman noir, inspiré d’un meurtre réel. Les personnages sont tous antipathiques (avec du racisme et de la violence policière d’époque) mais on voit comment les policiers se laissent totalement absorber par cette enquête (et comment le duo d’enquêteurs que l’on suit plus spécifiquement lutte contre le procureur qui veut fabriquer un coupable pour pouvoir déclarer l’affaire résolue).