L’Invention du colonialisme vert, de Guillaume Blanc

Essai d’histoire publié en 2020. L’auteur retrace comment les projets de parcs naturels en Afrique trouvent leurs origines dans la période coloniale, et dans une vision fausse de l’Histoire du continent africain. Globalement, contrairement aux parcs en Europe qui mettent en avant le façonnement des paysages par les activités agro-pastorales humaines, les parcs africains sont considérés comme menacés par les activités humaines, ce qui conduit à la recommandation renouvelées des années 50 à nos jours de les vider de leurs habitants. La conservation se fait donc contre les populations locales (mêmes si les discours actuels parlent de conservation communautaire qui inclut les populations locales, cette inclusion vise à transformer une partie d’entre elleux en gardien.nes et guides, et à sortir les autres du périmètre du parc, et en tous cas à arrêter les activités d’élevage et d’agriculture).

L’idée qui sous-tend cette recommandation vient d’une vision d’un « Éden africain » où la Nature qui a été détruite en Europe par l’industrialisation serait toujours existante en Afrique, mais menacée par les activités humaines qui n’auraient commencé que récemment à peser sur elle, et aurait notamment détruit de vastes zones forestières. L’auteur montre que dans le cas de l’Éthiopie – qui est son terrain d’étude principal, la forêt présente autour des villages d’altitude n’est pas une forêt subsidiaire d’une forêt primaire plus vaste, mais due aux activités humaines qui créent les conditions propices à un écosystème forestier là où le reste de la zone tend plus naturellement vers d’autres écosystèmes. L’auteur montre aussi comment les recommandations de gestion des parcs ne s’appuient pas sur la réalité observée sur le terrain mais sur des idées préconçues et dupliquées d’un pays africain à l’autre. Dans le cas de l’Éthiopie par exemple, la population de Walia ibex a augmenté (de 150 à 950) des années 60 à nos jours, en même temps que la population humaine dans le parc, mais les rapports scientifiques mentionnent toujours une population déclinante et menacée par l’anthropisation (alors que les habitants ne chassent pas ce bouquetin pour le manger hors période de famine, sa chair étant assez mauvaise et sa chasse difficile (il passe son temps sur des pentes abruptes en altitude).

L’auteur montre aussi comment les recommandations des institutions internationales et des associations peuvent servir les pouvoirs locaux pour mettre en place des politiques répressives et accentuer leur contrôle sur des zones défiantes du pouvoir central, avec la bénédiction de la communauté internationale.

C’était intéressant comme sujet et c’est très facile à lire pour un essai d’Histoire, je recommande.

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