Une Ombre qui marche, de Tiphaine Le Gall

Roman français sorti en 2020. L’oeuvre prend la forme d’un essai sur un roman publié en dans les années 2030 et qui révolutionne radicalement la littérature et au delà le rapport des humain.e.s au monde. Particularité de cette œuvre révolutionnaire, elle est composée de 283 pages blanches, jouant avec le blanc de la page et donnant une place centrale au silence et à la subjectivité du lecteur.

L’autrice signe une forme de parodie référencée d’analyse littéraire, comparant le texte de Timothy Grall à ses références (Montaigne, Nietzsche), à ses œuvres précédentes (L’ouverture de la porte, Ethique et Métaphysique du gros orteil droit), à sa vie en tant qu’écrivain ayant grandi dans le tumulte du début du XXIe siècle. Elle parle de l’écriture fragmentaire, de l’importance des blancs autour du texte dans les poèmes, du genre auquel rattacher un roman entièrement blanc, de la mise en avant de la matérialité de l’objet livre, et de l’impossibilité d’épuiser les interprétations. Faut avoir un penchant pour la théorie littéraire à la base mais c’est trippant à lire.

Article invité : Flipette & Vénère, de Lucrèce Andreae

Déjà, c’est une histoire de sœurs : cette BD de 340 pages d’une autrice qui est aussi réalisatrice de films d’animation partait avec une longueur d’avance dans mon cœur.

Ensuite, c’est une histoire qui incarne les atermoiements politico-existentiels qui sont les miens et ceux des milieux que je fréquente : Flipette-Clara est l’artiste intello, photographe prometteuse et/mais flippée de s’engager politiquement, découvrant avec maladresse et pas mal de narcissisme les milieux anarcho-associativo-militants que fréquente sa petite sœur, Vénère-Axelle.

Après plusieurs années d’éloignement, les deux jeunes femmes se (re)trouvent mutuellement à la faveur d’un accident d’Axelle. Clara découvre la galerie de personnages haut·es en couleurs (ce qui n’est pas qu’une expression, l’utilisation des couleurs dans la BD est travaillée de façon très frappante, avec un dessin très « clair » et pêchu qui attrape les postures, les gestes, les expressions avec beaucoup d’élégance) entourant sa frangine et confronte ses grands principes, souvent hors-sol, à la « réalité du terrain » parfois pragmatique à rebours des idéaux politiques.

Les sœurs râlent, gueulent, s’engueulent, chialent, s’aiment fort (évidemment) sans trop bien savoir comment se le dire (évidemment) ; il y aurait sans doute des choses à redire, mais ça sera pour vous qui commenterez après avoir lu cette BD que, évidemment, je recommande !

Lovecraft Country, de Misha Green et Jordan Peele

Adaptation en série télévisée du roman éponyme. J’ai eu un peu de mal à rentrer dedans. Comme le livre, ça part un peu dans tous les sens, il faut accepter que c’est une anthologie, avec des styles et genre qui varient assez fortement d’un épisode à l’autre malgré la trame globale. Mais au bout d’un moment (vers l’épisode 4 je dirais pour moi) la mayonnaise prend et c’est assez cool. Du coup c’est de l’horreur, pas du tout lovecraftienne par contre malgré le titre, et du pulp de façon plus générale, avec des héros racisés – principalement noirs – qui doivent composer avec les menaces horrifiques, et celles d’une société raciste en parallèle. Évidemment les détenteurs de pouvoirs magiques sont blanc.he.s, les dominations se recoupant. La série parle un peu de féminisme et d’intersectionnalité, mais le prisme des discriminations racistes reste prééminent.

Je suis un peu dubitatif des retournements de situation dans l’épisode final, mais sinon je recommande la saison.

Hocus Pocus, de Kenny Ortega

Film d’Halloween de Disney de 1994. EN 1693, trois sorcières sont exécutées à Salem. Elle réussissent à placer un sort loophole : si qq allume une bougie dans leur maison un soir d’Halloween, elles pourront revenir pour la nuit.
300 ans plus tard, un gamin idiot qui ne croit pas aux sorcières fait exactement ça. Les sorcières tentent alors de créer en 2-2 une potion magique de jeunesse éternelle pour vivre plus longtemps que juste la nuit. Pour ça elles ont besoin de leur livre de sorts et de l’âme d’enfants. Les héros (le gamin idiot, son love interest et sa petite sœur + un chat qui parle) vont tenter de les en empêcher.

C’était étrange. Ça n’a pas super bien vieilli, avec des personnages lourdement dragueurs.
Le trio de sorcières est très réussi par contre (les actrices cabotinent à mort), avec une cheffe implacable et deux sidekicks idiotes. Des gags réussis sur le fait qu’elles ont du mal avec la modernité, un peu ruinées dans leur cohérence par le fait qu’à la moitié du film ça leur pose plus de problèmes et que les persos font des blagues basées sur de la culture G d’aujourd’hui. L’intrigue est classique pour un film pour enfant mais un peu dark (pendaison, vol d’âmes, chat écrasé…), avec les habituels adultes inutiles et des antagonistes stéréotypés.

Pic d’Anéou

Dernière randonnée avant le confinement, dernière randonnée de l’année du coup. Montée avec G. au pic d’Anéou. Très beau temps, rando pas très longue parce que je devais récupérer un train le soir. Départ du col du Pourtalet, passage par Cuyalaret, le col d’Anéou, puis le pic, redescente depuis le col vers les plateaux et le Pourtalet. On a vu quelques chocards, et des bouquetins/isards.

Les quadrupèdes non identifiés
Pic du midi d’Ossau
Pic du midi d’Ossau, zoom
Vers l’Espagne
Espagne depuis la frontière
Espagne encore
Crête frontière
Plateau

Les derniers Parfaits, de Paul Béorn

Roman de fantasy occitane. L’histoire se passe dans un univers assez sombre où la magie existe. Suite à un cataclysme qui a touché l’Empire Romain, la carte de l’Europe a été remodelée. Des siècles plus tard, l’Occitania est indépendante du royaume de France, la religion cathare y est officielle, et les légion catharis montent à l’assaut du royaume de France, aidée d’alliés surnaturels. Au milieu du conflit, un groupe de 4 prisonniers de guerre réussissent à s’évader et décident de descendre au cœur du territoire occitan…

C’était intéressant d’avoir de la fantasy avec des prémices françaises, y’a matière à. C’est de la dark fantasy, pas mon genre favori, mais c’est plutôt bien fait, l’univers est cohérent et réussi. C’est pas le bouquin de fantasy du siècle mais c’était une bonne lecture.

Potentiel du Sinistre, de Thomas Coppey

Un jeune cadre dynamique prometteur est engagé dans Le Groupe, n°2 du secteur bancaire. Intégré à une équipe de R&D pour imaginer et gérer de nouveaux produits financiers exotiques, il développe l’idée de titriser la réassurance des catastrophes naturelles. On suit sur plusieurs années son évolution dans Le Groupe, son adhérence initiale puis sa dissociation d’avec les valeurs corporate.

On sent que l’auteur a travaillé en entreprise, il rend à merveille le vocabulaire et l’ambiance corporate, la façon de parler par éléments de langage qui permettent de se raccrocher à ce qui est dicible, dans des rapports qui sont très largement hiérarchiques même si on a un vernis de cool dessus.

C’est un roman assez peu joyeux du coup, on sent bien toute la puissance du néolibéralisme qui pèse sur les personnages qui veulent dévier du credo. Mais c’est un roman réussi dans ce qu’il montre.

Bliss, de Joe Begos

Film de vampires de 2019. Dezz’, une peintre de la scène punk de ce qui a l’air d’être Los Angeles dans les années 90s tombe sur une nouvelle drogue, le Diablo, puis sur une de ses amies qu’elle n’a pas vu depuis longtemps et qui la transforme en vampire. Sous l’influence combinée de ces deux facteurs, Dezz retrouve l’inspiration qui lui manquait et peint le tableau qu’elle avait en chantier lors de long blackout où elle fait apparaître une divinité maléfique comme sujet central du tableau.

C’était assez mauvais. D’un point de vue image et cinéma y’a des trucs intéressants, la pellicule est grainée, y’a des couleurs artificielles qui éclairent la plupart des scènes pour faire ressentir le côté vie nocturne et enfermement. Mais par contre niveau scénario… Je sais pas, peut-être que ça aurait été transgressif si ça avait vraiment été tourné dans les années 90’s, là c’est juste grand guignolesque. La peintre s’isole dans sa folie créatrice et dans son addiction à la drogue et au sang. Elle tue des gens, elle est odieuse avec ses proches. Bon et puis comme le personnage principale est une femme, on va la faire coucher avec sa pote et un mec, et puis la grande scène où elle peint à la fin, elle peint pas vraiment, elle danse en culotte devant la toile et se frotte contre. Bref, elle n’est pas créatrice mais vecteur d’une force supérieure qui crée à travers elle (on la voit très peu peindre dans le film, la plupart de la peinture est faite hors champ et lors de ses blackouts), et évidemment sexualisée parce que pourquoi se priver ?

Bref c’était un film de vampires très peu original et sexiste.