Archives de catégorie : Séries

Article invité : Lâcher prise

Série québécoise de 4 saisons, sorties entre 2017 et 2020 et accessible en streaming farpaitement légal sur TV5 Monde Plus.

Une série drôle, fine et émouvante sur le burn-out (et plein d’autres choses, notamment les relations familiales/filiales et on sait que j’aime ça), avec des personnages géniaux (du genre aussi insupportables qu’attachants, fortiches et vulnérables comme des bébés chats), mille punchlines hilarantes par épisode, des acteurices excellentissimes, une référence à Jean Leloup ♥, deux premières saisons formidables et deux suivantes certes un peu en dessous mais toujours un régal, bref, à gavisionner sans attendre.

Night Sky, de Holden Miller

Série télé de 2022, annulée après une saison. Les York, septuagénaires vivant dans l’Illinois, ont dans leur jardin un secret : un téléporteur qui les amène dans un poste d’observation sur une autre planète. Ils n’ont jamais osé sortir du poste d’observation, n’ayant pas de garanties que l’air extérieur est respirable. Mais un jour, Irène trouve un homme blessé dans le poste d’observation…

J’aime beaucoup les deux acteurs principaux et je trouve que faire une série de science fiction avec des personnages principaux âgés est bienvenu, mais bon il se passe quand même pas grand chose, la série passe son temps à donner des indices sur de plus grands mystères qu’on ne verra finalement jamais puisqu’elle a été annulée. Sympa pour les performances d’acteurs et ce qu’on devine des mystères généraux, mais ignorable dans l’ensemble.

Outer Range, de Brian Watkins

Série étatsunienne dont la première saison est sortie en 2022. Dans le Wyoming, la famille gère un ranch depuis des générations. Royal a été champion de rodéo, son fils Rhett est sur ses traces. Mais le ranch a connu des jours meilleurs, la femme de Perry (le second fils) a disparu du jour au lendemain, le ranch voisin réclame sur la fois de relevés cartographiques une énorme portion de terrain des Abbott. Oh et puis il y a le trou. Un trou immense qui est apparu sur le terrain, et qui mène quelques part. Et une hippie qui débarque un jour, avec des visions d’un ancien symbole indien qui apparait dans le paysage sur le ranch des Abbott.

Le trailer me faisait pas mal envie, et de fait c’est bien filmé. Le côté Amérique profonde, certains tropes de western réactualisés sont intéressants. Mais l’histoire ne fait pas grand sens ou n’avance pas : c’est joli mais ça n’a pas grand chose à dire. Dommage, parce qu’il y avait des éléments réussis : le personnage de Billy Tillerson, qui visiblement pense être dans une comédie musicale, les relations familiales des Abbott, certains cadrages et éclairages (la scène de duel dans le dernier épisode notamment marche très très bien). Mais bon, c’est noyé dans le gloubi-boulga général.

Extraordinary, d’Emma Moran

Série anglaise de 2023. Jen vit dans un monde où les gens acquièrent un super pouvoir autour de leur majorité. À 23 ans, le sien ne s’est toujours pas déclaré, ce qu’elle ne vit pas très bien. On voit sa vie entre ses colocs, le chat qu’elle vient de récupérer dans la rue, son PQR et son boulot dans une boutique de costumes.

J’ai beaucoup aimé. C’est un peu Misfits x Fleabag : une héroïne avec une vie chaotique dans un univers avec des superpouvoirs lowkey (mon headcanon est d’ailleurs qu’on est dans le futur de Misfits, où les superpouvoirs se sont généralisés). La série est bien écrite, les blagues fonctionnent bien, les personnages sont des désastres ambulants mais attachants.

Saison 2 [Edit 2024] :
More of the same, et ça fonctionne toujours aussi bien. La représentation de l’esprit de Jen en tant que librairie chaotique est très drôle. Pas mal d’émotions avec la résolution de la relation de Jen à son père. Je recommande toujours.

Bad Sisters, de Sharon Horgan

Série télé paru en 2022 et se déroulant en Irlande. On suit en parallèle les évènements ayant menés à la mort de John Paul Williams, personnage éminemment antipathique, et l’enquête mené par deux agents d’assurance après sa mort. John Paul est marié à Grace Garvey, que ses sœurs voient décliner de jour en jour. Elle décident donc, en toute logique, d’éliminer JP. Malheureusement, elles ne sont pas très douées pour le meurtre, et il va y avoir une série de tentatives ratées… La série montre l’ensemble de ces tentatives, ainsi que les raisons spécifiques que chacune a d’en vouloir à John Paul. C’est bien réalisé, super bande-son, des relations humaines globalement crédible (petit bémol sur la relation Becka/Matt qui est là je trouve surtout pour faire avancer l’intrigue). Excellente bande-son, avec une très bonne reprise de Who by fire par PJ Harvey en générique.

Une seule saison qui fait une histoire complète, recommandée si vous aimez bien les histoires de sœurs, les whodunnit, les mecs absolument atroce et l’accent irlandais.

Silo, de Graham Yost

Série télé adapté du roman éponyme, parue (pour la première saison) en 2023. On suit l’enquête de Juliet Nichols, ingénieure machine promue shérif du Silo, une structure abritant 10 000 personnes sous la surface d’un monde toxique.

Globalement c’est assez fidèle au bouquin, avec des moyens pour la production. J’ai bien aimé l’apparence qu’ils ont donné au Silo. Par contre après quelques bons épisodes, ça se met à traîner en longueur, et faut attendre l’épisode 8 pour qu’il se remette à se passer des trucs. Sentiment mitigé, donc, mais je recommande toujours le bouquin.

The Americans, de Joe Weisberg

Série américaine parue de 2013 à 2018, et se déroulant durant les années Reagan. Philip et Elizabeth Jennings, avec leur agence de voyage où ils bossent tous les deux, leur pavillon dans la banlieue de Washington et leurs deux enfants forment une famille américaine parfaite. Sauf que Philip et Elizabeth sont en fait deux agents russes sous couverture, exécutant les missions que le KGB leur confie.

La série joue sur la double vie des personnages principaux, devant à la fois gérer une couverture crédible (dont une vie de famille, qui avec deux enfants, n’est pas qu’une couverture : ils ont des sentiments et une relation réelle à leurs enfants. Pour le moment leur vie professionnelle a l’air de se gérer toute seule mais je me demande si les saisons suivantes ne vont pas creuser cet axe aussi) et des missions d’espionnage très exigeantes (un peu trop pour le réalisme, même ; certes les missions avec de gros enjeux, de l’infiltration, des kidnappings et des meurtres sont intéressantes à suivre, mais leur récurrence juste pour ces deux agents demande une certaine suspension d’incrédulité : on est plus chez James Bond que chez Le Carré. Toute la partie sur la gestion d’un réseau de sources dans diverses agences américaines et d’agents secondaires est moins flashy mais à la fois plus réaliste et plus satisfaisante en ce qu’elle permet de montrer le développement des relations entre personnages sur le long terme plutôt que de mettre en scène « la mission de la semaine ».

On voit comment la double journée des parents Jennings les épuise, ruine leur relation à leurs enfants, les fait vivre dans la parano permanente (la thématique parcourt toute la série mais est particulièrement exacerbée dans la saison 4 où les personnages semblent au bord du burn-out). La série met aussi en scène avec les personnages de Beeman et Nina le côté autocentré du monde de l’espionnage qui n’en finit pas de mettre en place des contre-contre-contre-mesures et d’envisager les fuites crédibles à livrer à l’adversaire pour lui faire penser que c’est lui qui un coup d’avance alors qu’en fait non.

Enfin, je trouve qu’un des attraits de la série est sa mise en scène d’un « monde caché » prosaïque. On n’est pas dans une histoire de magie ou de monde parallèle, mais la série montre un univers où tous les personnages jouent un rôle public et ont un agenda caché derrière. Le sort du monde est entre les mains de quelques individus qui dans l’ombre se livrent à une lutte sans merci, et doivent sans cesse interpréter des signes : savoir comprendre le sens caché d’un message, honorer un rendez-vous sur un parking à minuit, relever une boîte à message dissimulée derrière un panneau d’affichage. La série joue beaucoup sur cette idée qu’il y a plus dans le monde que ce qu’il donne à voir à première vue, un ressort narratif toujours efficace (en tous cas sur moi).

Si dans la première saison la relation entre les deux persos principaux est un peu cliché, elle devient plus satisfaisante après. Les dynamiques familiales avec Paige, la tension de l’amitié entre Stan et Philip, la difficulté plus généralement pour Philip de gérer les relations romantiques nécessaire aux développement des sources (aussi bien l’arc avec Martha, l’arc avec Kimmy que sa relation à Elizabeth sont très bien creusés, j’ai trouvé. En contrepoint, il aurait été intéressant d’avoir plus d’insights sur la relation entre Gregory et Elizabeth, pour voir comment de son côté elle gérait ces tensions). Au delà des deux persos principaux, j’ai trouvé qu’assez généralement les persos secondaires et leurs arcs étaient tous assez réussis.

On peut aussi signaler une grande réussite dans la reconstitution des États-Unis des années 80, et une excellente bande-son qui donne une large place à Peter Gabriel et Tears for Fears pour mettre dans l’ambiance de l’époque.

Un petit bémol sur le final. C’est toujours compliqué de conclure 6 saisons de série, et je trouve qu’ils s’en sortent globalement très bien, mais l’épisode aurait pu être un peu plus resserré : après quelques gut punchs en milieu d’épisode, on met du temps à arriver à la scène finale qui est juste une conv très statique et pas incroyable. Alors certes il y a un petit côté théâtre russe qui met dans l’ambiance, mais j’ai l’impression que d’autres éléments du même épisode auraient fait une meilleure dernière image.

Yellowjackets, d’Ashley Lyle et Bart Nickerson

Série de 2022. En 1996, une équipe de football féminin se crashe dans les Montagnes Rocheuses. Les adolescentes (enfin, certaines) vont survivre en autarcie pendant 19 mois avant de revenir au monde extérieur. Tout va pas super bien se passer, surtout quand il va falloir gérer l’hiver. On suit en parallèle les événements de ’96, quelques flashbacks sur leurs vies avant le crash, et la vie de quatre survivantes en 2021.

Si vous pensez à Lost, vous avez raison, d’autant plus qu’il y a une petite dose de potentiellement surnaturel (pas tranché pour le moment). Mais les personnages sont clairement mieux écrits, et la dynamique de groupe est plus intéressante, à la fois avec le fait que les personnages se connaissaient avant le crash, et qu’elles sont adolescentes et donc encore en construction (y’a du coup aussi une vibe Lord of the Flies en version féminine, surtout que le flash-forward de la scène d’ouverture annonce clairement que tout va fortement dégénérer).

Le casting est particulièrement réussi en ce qui concerne le fait d’avoir des actrices jouant les versions ado et adulte des personnages qui se ressemblent. J’ai trouvée bien construite toute la ligne narrative de ’96, moins celle de 2021 (excepté celle de Sarah dont les personnages secondaires sont très réussis). Le personnage de Misty est un succès sur les deux périodes aussi, je suis moins convaincu par les arcs des versions adultes de Taissa et Natalie.

Enfin, il faut citer la bande son, efficace et qui plonge bien dans les années 90, notamment la chanson du générique (qui reprend les codes des chansons de l’époque mais a été composée en 2021).

Globalement bonne série, sympa à regarder, accrocheuse, mais sans que ce soit non plus très profond ou révolutionnaire. La saison 1 ne résout absolument rien par contre, c’est visiblement prévu pour être une histoire au long cours.

Saison 2 :

More of the same, franchement. L’arc de 1996 se déroule entièrement en hiver. On n’a pas plus de réponses, mais quelques mort.es en plus, qui réduisent le cast, et un bon cliffhanger de fin de saison. En 2023, on retrouve deux Yellowjackets de plus, mais y’a toujours rien de plus qui est résolu. Le setup de l’espèce de secte new age est intéressant. Le personnage de Misty continue sa vibe de psychopathe unhinged, franchement bravo aux deux actrices qui la porte et donnent tout. Vraiment pas fan du perso de Nathalie (adulte) dans cette saison, qui a juste l’air bourré/high la plupart du temps, je suis perplexe de la direction d’acteur. On a plus de cannibalisme mais pas plus d’explication. Y’a potentiellement une vibe à la Lost « en fait elles sont toutes mortes dans le crash » mais c’est pas du tout clair (y’a même une espèce de flash-aside à un moment, l’hommage à Lost est de plus en plus explicite). La bande son continue d’être très bonne, les variations sur le thème principal, les reprises et les chansons d’époques sont bien utilisées.

Je vais continuer à regarder je pense, mais plus pour l’ambiance que pour l’intrigue qui ne semble pas aller où que ce soit. J’avais mis le tag recommandé sur la première saison, je vais le laisser mais je ne sais pas si je recommande vraiment, en tous cas pas du tout avec la même intensité que d’autres séries. Mais je pense que ce sera une série qui va en inspirer d’autres.

White Wall, d’Aleksi Salmenperä, Mikko Pöllä et Roope Lehtinen

Série finlandaise de 2020. Dans une ancienne mine en passe d’être reconvertie en site de stockage de déchets radioactifs, une équipe de forage tombe sur un gigantesque objet blanc incrusté dans le sol. Le directeur du site va décider d’investiguer l’objet sans en référer à sa hiérarchie, alors que l’ouverture du site est par ailleurs menacée par des activistes anti-nucléaires.

J’ai bien aimé. C’est relativement court (8 épisodes de 40 minutes), avec beaucoup de passages filmés dans la mine. On a à la fois les interrogations sur ce qu’est l’objet trouvé (qui restent non résolues jusqu’à la fin, avec un final sur un cliffhanger alors qu’il n’y aura pas de saison 2), et les relations des personnages, qui se positionnent vis-à-vis de l’ouverture de la mine (on suit beaucoup le directeur du site et son équipe, donc on a un point de vue pro-nucléaire, mais la série laisse la place à pas mal de voix dissidentes, avec les activistes et la DJ). Si la série ne fait pas de l’acceptabilité du nucléaire son point central, c’est quand même largement présent. On a aussi les relations des personnages sur le site entre eux et avec la hiérarchie plus distante, ce qui fait des relations intéressantes.

Recommandé si vous aimez bien les trucs dans les mines, les dialogues en finlandais au milieu de paysages enneigés et les mystères métaphysiques non-résolus.

The Last of Us, de Neil Druckmann et Craig Mazin

Série HBO sortie en 2023, adaptation du jeu vidéo éponyme. Dans un monde dévasté en 2003 par une pandémie zombie causée par un champignon, Joël, un mercenaire fatigué, doit faire traverser les États-Unis à Ellie, une adolescente qui semble être immunisée au champignon.

J’ai pas été fan des deux premiers épisodes, mais la série décolle après, je trouve. L’univers est beau dans le style post-apo (même si pas toujours ultra-convaincant sur certains petits détails). La mise en scène des paysages du centres des USA est réussie. La relation entre Joel et Ellie fonctionne relativement bien, avec le côté ours bourru de Joël qui se dégèle peu à peu et est finalement près à tout pour protéger sa fille adoptive. Les moments de flash-back fonctionnent plutôt bien. Si la vie de Joel en 2003 lors du premier ep m’a laissé relativement froid, la série décolle avec les 45 minutes de flash-back sur le personnage de Nick Offerman durant l’ep 3, puis le récit de la dernière journée d’Ellie parmi les FEDRA ou sa naissance fonctionnent bien pour sortir du cadre du récit principal et rajouter de l’épaisseur aux relations entre les personnages et du lore à l’univers. J’ai par contre été agacé à chaque fois par les séquences « recréons de façon ultra artificielle des éléments de gameplay » à base de « Oh, Ellie, toi seule peut passer à travers ce mur puis m’ouvrir la porte depuis l’autre côté » ou « on est séparé par cette voiture, retrouvons nous de l’autre côté du niveau de la rue ! ». Le niveau de noirceur des épisodes varie pas mal de l’un à l’autre (bon c’est jamais ultra-joyeux), avec un déchaînement de violence dans les deux derniers, mais ça fonctionne bien.

Je recommande si vous aimez les zombies et Pedro Pascal (who doesn’t?).