Archives de catégorie : Screens, thousands of them.

Dune, de Denis Villeneuve

Film de science fiction de 2021, adapté de la première partie du roman éponyme. Dans un empire galactique, l’empereur charge la famille Atréide de la gestion de la planète désertique Arrakis, où se récolte une matière première des plus précieuses. Mais l’ancienne famille qui gérait Arrakis, les Harkonnen, ne l’entendent pas de cette oreille. Et c’est sans compter l’opinion du peuple natif d’Arrakis, les Fremen, ni celle de l’ordre religieux des Bene Gesserit…

Dune est de base un univers dense, le film prend le temps de retranscrire ça, en passant 2h30 pour ne montrer que la moitié du roman. Pour autant c’est assez dense en événements, sans aller à un rythme survolté en terme de montage : on prend le temps d’avoir des plans d’ensemble qui montrent les paysages et les décors, ce qui est bienvenu vu l’énorme travail qu’il y a visiblement eu dessus ; en termes de style visuel c’est totalement ma came, grosse satisfaction sur l’architecture brutaliste, les palais aux murs épais, les tunnels spatiaux en béton. Le film fait vraiment ressentir l’échelle interplanétaire des événements (contrairement à Star Wars qui donne souvent l’impression de se passer dans un territoire de la taille d’un département français).

Le film évite globalement le manichéisme : si la maison Harkonnen a un look de grands méchants très méchants, les « gentils » Atréides ont quand même une structure militaire et des uniformes d’apparats tout noirs qui évoquent l’Empire dans Star Wars : je pense que c’est une référence voulue pour dire que c’est pas si simple que le Bien vs le Mal. Ils sont aussi tout à fait ok avec la structure féodale dans laquelle ils ont une bonne place et assument leur rôle de colonisateurs d’Arrakis (même s’ils parlent de mieux traiter les Fremen, ils ne font pas non plus la Révolution). Au passage j’ai d’ailleurs beaucoup aimé le petit détail de l’aigle des armoiries atréides stylisée à l’ancienne sur le sceau familial et de façon beaucoup plus moderne sur leurs bannières militaires et uniformes, ça rentre bien dans toute l’esthétique mélange d’ancien et de moderne du film.

Le film évite aussi le rythme global des blockbusters du conglomérat marvel/disney/starwars : on a les moyens d’un blockbuster, mais le fait de coller à la structure du livre plutôt que de tailler un scénario sur mesure pour le film donne un rythme différent : à part l’espèce de petite souris du désert mignonne on échappe aux sidekicks attachants faits pour la vente de produits dérivés, on reste concentré sur les personnages principaux (et globalement l’ambiance n’est pas trop à l’humour qui brise la tension, c’est plutôt de nouvelles tensions qui viennent s’ajouter aux précédentes).

Bref, j’ai globalement beaucoup aimé, j’ai pas trop vu passer mes 2h30, j’espère que le second volet sera tout autant satisfaisant.

EDIT 2024 : La deuxième partie était moins satisfaisante, on voit un peu plus le temps passer. Mais ça reste cool. Par contre comme c’est seulement le premier roman de Dune, on a une fin qui ouvre largement l’univers et laisse la place à 4 ou 5 autres films de 2h30. Les décors sont toujours très beaux, les acteurs jouent très bien, mais on n’a plus l’effet de découverte de l’univers (et on est plus resserré sur la vie des Fremen sur Dune, là où le premier volet était plus diversifié)

Drive my car, de Ryusuke Hamaguchi

Film japonais de 2021. Yūsuke Kakufu, metteur en scène de théâtre reconnu, perd sa femme dans un accident cérébral quelques semaines après avoir découvert qu’elle le trompait avec un acteur de série télé. Deux ans après ces événements dont il ne s’est toujours pas remis, Yūsuke est invité à diriger une mise en scène d’Oncle Vania dans le cadre du festival de théâtre d’Hiroshima. L’organisation du festival lui assigne une chauffeure, avec qui il va peu à peu se mettre à parler au fil des trajets entre sa résidence et les répétitions de la pièce.

J’ai bien aimé sans être complétement bouleversé. Le film dure trois heures, il prend le temps d’installer les situations. Le prologue lorsqu’Oto, la femme de Yūsuke, est toujours vivante, dure 40 minutes, par exemple. Il y a de très beaux plans (la scène d’introduction avec Oto à contrejour sur la baie de Tokyo, la scène de répétition en extérieur, la scène où Yūsuke et Misaki fument une cigarette sur un quai en béton), il y a aussi beaucoup de scènes tournées dans la voiture (logiquement) ou qui montrent la voiture, rouler, et c’est toujours un dispositif qui me convainc assez peu au cinéma : en intérieur il n’y a qu’une quantité d’angles limités, et en extérieur ça donne surtout l’impression qu’Hiroshima est constituée à 80% d’échangeurs autoroutiers. Après le film prend le temps de laisser les personnages raconter des histoires – que ce soit dans la voiture ou ailleurs, et ça rend très bien (alors que pourtant filmer des gens qui racontent totalement autre chose, c’était pas forcément gagné d’avance comme mise en scène).

En plus de la relation entre Yūsuke et Misaki (et du poids de la relation qu’avait Yūsuke avec Oto), il y a tout un axe sur les répétitions d’Oncle Vania. Yūsuke travaille avec des pièces multilingues, où chaque acteur dit le texte dans sa propre langue, ce qui est un concept assez intéressant dans la vie réelle, et bien mis en scène dans le film. Yūsuke refuse de jouer Oncle Vania lui-même (c’était la pièce qu’il jouait à la mort d’Oto et il trouve que le texte force trop les acteurs à se confronter à eux-mêmes), mais il fait travailler ses acteurs dessus, et notamment Kōji qui interprète le personnage d’Oncle Vania lui-même, un jeune acteur impulsif qui saborde sa propre vie et était , l’amant d’Oto. On ne comprend pas trop le choix de Yūsuke, mais ce n’est pas dit qu’il le comprenne lui-même : il réprime énormément ses sentiments tout au long du film et il adopte une posture mi-paternelle mi-agacée vis-à-vis de Kōji. Pour autant ce n’est pas un film où une femme (Misika) va aider un homme (Yūsuke) à reprendre contact avec ses sentiments : Misika aussi est laconique et peu sentimentale, les deux vont s’épauler mutuellement dans cette tâche.

Comme je le disais, j’ai bien aimé, on se laisse emporter par l’histoire et les relations entre les personnages. Pour autant je trouve que la façon de filmer est souvent assez factuelle : « voici une voiture qui roule » ; « voici une répétition de théâtre dans une salle éclairée au néon », alors que certains plan et certains éclairages montrent qu’il était possible de faire autrement.

The Chair, d’Amanda Peet et Annie Julia Wyman

Série US de 2021. A 46 ans, Ji-Yoon vient d’être nommée directrice du département d’anglais de son université, première femme et première personne racisée à accéder au poste. Mais le poste en question est un enfer, elle doit gérer crise sur crise alors que la direction générale essaie de mettre à la retraite trois de ses enseignants, que ceux-ci n’ont plus d’étudiants dans leurs cours, que son professeur star (qui est aussi son crush) décide soudain de faire un salut nazi en cours et refuse de s’excuser au nom de la liberté d’expression… Et par dessus tout ça, elle doit gérer sa vie personnelle qu’elle case dans les trous qui restent dans son emploi du temps, sa fille étant compliquée, son père peu aidant et ses amis limités à son idiot de crush.

J’ai beaucoup aimé. J’ai trouvé tous les personnages et toutes les lignes narratives réussis : côté vie privée, le personnage de Ju-Hee est très réussi, le côté gamine précoce et vindicative qui est très cool quand on interagit avec elle de loin ou qu’on la voit en temps que spectateur, mais qui est infernale à élever. La relation que Bill a avec elle, en mode « je te parle comme à une adulte » = exactement ma façon d’interagir avec des enfants. L’ensemble de la communauté coréenne est très drôle, dommage qu’on ne les voit que dans un épisode à part le père de Ji-Yoon.

Côté professionnel, les différents collègues sont très bien caractérisés. Pour commencer par un personnage mineur, le Dean en personnage visqueux et secrètement méprisé par les enseignants qui le considèrent comme un bureaucrate parvenu est très bien mis en scène. David Duchovny et tout l’arc autour de lui est très réussi aussi, mais impacte peu l’histoire générale. Dans les enseignants du département d’anglais, Joan vole la vedette avec son side-plot sur son bureau et son enquête sous couverture pour trouver son élève nemesis. Le côté ultra intense du personnage fonctionne très bien en tant que ressort comique. Les autres collègues âgés sont plus effacés. Yaz est un personnage super intéressant mais qui aurait mérité plus de temps d’écran, elle fonctionne surtout comme un miroir plus jeune de Ji-Yoon, mais sinon elle agit peu. Le personnage de Bill est à mon sens une très grande réussite. Le côté chien battu, professeur-star-mais-qui-a-été-marqué-par-la-vie et décide plus ou moins consciemment de tout saborder marche très bien. Il a objectivement des côtés attachants (il fait bien la cuisine, il sait donner des cours passionnants, il est drôle), et en même temps il est près à se comporter comme un connard total et refuser d’assumer, quelles que soient les conséquences, pour lui ou pour les gens autour de lui. Il est persuadé d’être dans son bon droit et qu’il lui suffit d’attendre pour que le monde se rallie à son point de vue. Et du coup même s’il aime beaucoup Ji-Yoon, il est la source de 90% de ses emmerdes et ne fait strictement rien pour les prendre en charge (après Ji-Yoon arrive à générer une partie de ses propres emmerdes : elle n’arrive pas à choisir sa posture face au Doyen, alternant coups de pression et soumission, elle vole les notes de cours de Bill, elle abandonne le cas de Joan, elle ne soutient qu’à moitié Yaz et se lave les mains de la suite… Comme elle le dit, elle a récupéré le département dans un état de merde (et elle a zéro supporting crew), mais elle empire encore la situation (mais il n’est pas clair qu’elle avait des ressources et un environnement qui lui permettait de faire mieux). Globalement, tous les personnages sont attachants, mais tous les personnages font de la merde. Pour moi la fin n’est pas un happy-end de romcom, mais une appeased end : les personnages n’ont plus de responsabilités, la pression est partie : oui c’est un échec – Ji-Yoon a été démissionné de son poste ; Bill est viré, mais en même temps c’est une situation où Ji-Yoon n’a plus à stresser en permanence pour gérer 4000 trucs. Est-ce que c’est pas mieux pour elle ? On a l’impression que le poste à responsabilités, dans la configuration, ne pouvait juste pas bien se passer (the only winning move is not to play?), quelle que soit la personne (et bonne chance à Joan d’ailleurs). Alors on voit l’échec d’une femme de couleur, mais le tenant précédent du poste était Bill, est visiblement ça n’était pas la folie non plus, et rien n’est résolu au départ de Ji-Yoon en terme d’enjeux liés au poste.

The Thing, de Matthijs van Heijningen Jr.

Préquel/remake de 2011 au film éponyme de John Carpenter. En 1982 des scientifiques norvégiens découvrent le corps d’un alien dans un vaisseau spatial en Antarctique. L’alien en question s’avère hostile et métamorphe, et tue peu à peu les membres de la base, en se faisant passer pour eux. Le pitch est vraiment le même que celui du film de Carpenter. La créature peut déformer son corps, le séparer en plusieurs parties, muter à volonté, on est en plein dans le body horror. Je n’ai pas vu l’original, mais j’ai bien aimé celui là. Les effets spéciaux de la créature sont plutôt réussi, le côté huis-clos en Antarctique aussi. Le scénario n’est pas très épais et la caractérisation des personnages bien mince, mais c’est pas vraiment ce que je venais chercher dans le film donc je m’en fiche un peu.

The Green Knight, de David Lowery

Film états-unien de 2021, inspiré de la légende arthurienne de Gauvain. Le jour de Noël, le chevalier vert fait irruption à Camelot et défie les chevaliers de la table ronde : Gauvain répond à son défi de le frapper et de venir recevoir le même coup un an plus tard, et décapite le chevalier. Celui-ci emporte sa tête sous son bras et dit à Gauvain qu’il attend sa visite.

Le film va suivre Gauvain, qui n’aspirait visiblement pas plus que ça à rentrer dans la légende (un petit écho du dilemme d’Achille ici) mais qui se résigne à tenir sa parole et se lancer dans sa quête. On le voit quitter Camelot et passer par plusieurs péripéties sur sa route, avant de finalement retrouver le chevalier vert et se préparer à recevoir son coup. Il a l’air assez fidèle dans son déroulement à la légende dont il s’inspire, en détaillant plus largement des péripéties seulement évoquées dans le texte.

J’ai bien aimé. Il y avait un côté assez psychédélique, avec des visions que reçoit Gauvain, des événements dont on ne sait pas trop s’ils sont imaginés ou s’ils arrivent parce qu’il y a de la magie dans l’univers. Certains aspects de mise en scène et décors font un peu penser à The Favourite. On retrouve aussi logiquement pas mal de tropes des films de chevalier, notamment les scènes où le héros avance à cheval (ou à pied, Gauvain perd rapidement son cheval dans ce film) dans un paysage désolé, style le Septième Sceau. Visuellement le film était assez beau, avec le paquet mis sur les décors.

Tomboy, de Céline Sciamma

Mickaël, 10 ans déménage avec toute sa famille dans une nouvelle résidence en raison de la grossesse de sa mère. Il rencontre Lisa, une fille qu’il aime, bien et commence à fréquenter les autres enfants du quartier pendant les dernières semaines d’été avant la rentrée. Mais à la maison, ses parents appelent Mickaël Laure, et sa mère n’est pas très ok avec le fait qu’il ne se reconnaisse pas dans le genre qui lui a été assigné.

J’ai beaucoup aimé. La plupart des acteurs sont des enfants, mais ils jouent super juste. La performance de Zoé Héran dans le rôle principal est très réussie. La petite soeur de Mickaël, Jeanne (6 ans), est un super personnage aussi. Il ne se passe pas énormément de choses dans le film, on voit l’évolution de la relation de Mickaël avec son entourage et ses astuces pour changer sa présentation de genre, mais ça rend très bien.

Je recommande.

Comment je suis devenu super-héros, de Douglas Attal

Film français produit par Netflix et sorti en 2020. Une France alternative où certaines personnes ont des super-pouvoirs. On suit un policier, ancien agent de liaison d’une équipe de super-héros, désormais flic ordinaire et dépressif, qui est affecté à une enquête sur une drogue qui donne des super-pouvoirs temporaires à des gens ordinaires.

Ça a les qualités et défauts habituels d’un film Netflix : y’a de bons éléments, le côté « super-héros dans un contexte franchouillard » est assez attirant, l’installation de l’univers plutôt réussie. Y’a de bons acteurs (Poelvoorde qui joue un ancien super-héros avec Parkinson est très réussi et très touchant), mais clairement il aurait fallu quelqu’un pour relire le scénario. On n’est pas au clair sur le statut des gens avec super-pouvoirs : on voit que peu deviennent des héros et que ça pose beaucoup de questions psychologiques aux gens avec des pouvoirs qui se sentent surtout différents, mais on ne sait pas pourquoi certains cachent leurs pouvoirs, on sait pas pourquoi les vilains veulent écouler une drogue qui donne des super-pouvoirs, on a une romance qui sert totalement à rien, des gens qui se relèvent magiquement de blessures ultra graves… On a vraiment l’impression qu’ils ont totalement rushé l’écriture, avec des trucs pas résolus dans tous les sens parce que la flemme.
Sur la façon dont c’est filmé, pas de recherche de style particulière, le film est vraiment là pour raconter une histoire. Quelques jolis décors dans un centre commercial abandonnés, pour le reste c’est Paris, filmé à hauteur de passant, ce qui marche bien avec le côté « vie ordinaire mais y’a des pouvoirs ».

Sympa à regarder mais loin d’être inoubliable.

Slalom, de Charlène Favier

Film franco-belge de 2020. Lyz, 15 ans, intègre une classe de ski-études. L’entraineur est cassant avec les élèves, mais quand Lyz se révèle d’un niveau permettant de concourir en coupe d’Europe voire aux JOs, la relation entre l’entraineur et l’élève devient de plus en plus intense et sort largement du cadre professionnel.

C’était bien. Le sujet est dur, mais c’est très bien filmé. Gros travail sur la lumière, avec des contrastes entre les scènes d’extérieur enneigés, les scènes intérieurs, plusieurs plans éclairés avec différentes couleurs. Des jeux de cadrage et de flou assez réussis aussi (la scène où Fred propose au proviseur que Lyz vienne habiter chez lui et où sa réponse à elle est donnée avec son corps à lui qui la surplombe en arrière plan, notamment).

Le film met en scène une relation malsaine mais de façon assez subtile : l’entraineur est cassant et exigeant avec les élèves, mais il n’est pas abusif comme le personnage du professeur dans Whiplash par exemple. La relation qu’il développe avec Lyz est clairement plus que problématique et en tant qu’adulte il aurait dû y mettre un stop très tôt, mais le film montre un intérêt et des avances de la part de Lyz – et montre aussi qu’au moment où les choses se concrétisent elle est totalement sous le choc : elle n’avait aucune envie que ça se réalise de la façon dont ça s’est réalisé. Les deux scènes de sexe sont d’ailleurs très très bien filmées, et dures à regarder, on voit de façon explicite l’absence totale de consentement de Lyz, tétanisée par ce qui se passe.

On montre aussi comment Fred, l’entraineur, se projette aussi dans les succès de Lyz, y voyant visiblement une façon d’avoir une deuxième chance, sa propre trajectoire de sportif ayant été coupée courte par une blessure : il s’approprie le corps de Lyz, sexuellement mais aussi sportivement. Il y a quelques longueurs dans le film, mais globalement très bon premier film, je recommande.

Franchise John Wick, de Chad Stahelski

Trois films pour le moment. John Wick, un tueur à gages qui a changé de vie, replonge dans le milieu du crime contre son gré à la mort de sa femme, quand un mafieux tue son chien. Son retour va le lancer dans une fuite en avant où il sera forcé de s’attaquer à ou de se défendre contre des organisations de plus en plus puissantes, et donc contre des hordes de tueurs.

J’ai bien aimé la franchise. Le premier film est un peu poussif : une belle séquence de combat dans une discothèques, quelques autres séquences de combat sympa, mais sinon ça installe surtout l’univers. Les deux et trois sont plus réussis : les enjeux et le contexte sont posés, l’univers et sa mécanique peuvent se dérouler.

Plusieurs points intéressants :

  • l’univers lui-même, où il existe un monde parallèle du crime organisé, avec des règles, une hiérarchie, des lieux secrets et des services spécifique, même une monnaie et toute une bureaucratie qui tient à jour les registres et communique les infos (les communique notamment par texto aux milliers de tueurs à gages qui ont l’air d’exister un peu partout dans cet univers, genre une personne sur deux bosse pour une mafia).
  • une certaine recherche formelle sur l’image. C’est pas le cas tous le temps, et assez peu dans le 1 à part dans la discothèque, mais il y a des plans intéressants pour un film d’action. Le film est fait pour mettre en valeur les cascades perpétuelles, et je pense que c’est ce qui pousse à ces moments intéressants : je pense notamment à la séquence dans l’exposition « reflections of the self » dans le II et dans l’espèce d’espace d’exposition chelou dans le III. Dans les deux cas on a une disparition ou une abstraction du décor, qui laisse toute la place dans l’image aux personnages et à leurs affrontements. Dans un autre style, dans le trois la séquence de combat dans les vitrines d’arme dans le III, la fin du I sur les docks, les combats à motos, sont très travaillés et les séquences très fluides. Dans les deux cas on a une esthétique qui se rapproche de celles de jeux vidéos. Il y a dans le trois une belle inventivité sur les séquences de combat d’ailleurs (là ou I et II c’est plus « des guns des guns des guns », le III varie largement les armes). Les films sont par ailleurs fractionnés en séquences assez différentes les unes des autres, notamment le II qui fait très film anthologique : on a un début qui rappelle le I en autoparodique, une séquence de préparation de heist movie, un combat dans des catacombes éclairées de manière très laide, la séquence expérimentale du musée, puis la monte de la parano de la fin. C’est intéressant mais en même temps ça fait un film avec disjoint et dont des passages pourraient être retirés sans peine.
  • une certaine épure de l’histoire : c’est pas le cas tout le temps et je trouve qu’il y a des passages qui sont trop longs, mais globalement les films posent les enjeux rapidement et même s’il y a un univers riche, il reste en arrière plan et on se concentre sur ce que le film vend : la bagarre la bagarre la bagarre. De ce point de vue d’ailleurs le crescendo d’un film à l’autre est très réussi : il n’y a finalement jamais de résolution en fin de film, on empile les enjeux au fur et à mesure (en contrepoint, toute la séquence avec « the elder » dans le III ne sert franchement à rien et aurait dû être coupée à mon sens). Le côté paranoïaque de la fin du II et l’isolation générale de John Wick dans un univers hostile permettent de faire fonctionner cette mécanique, mais je ne sais pas sur combien de film encore ce sera tenable.

Globalement j’ai bien aimé malgré des longueurs ; c’est un pur film d’action et de cascade, mais avec une volonté de pousser son sujet à fond qui marche bien et donne un résultat intéressant.

Une vidéo de Bolchegeek sur ce que la franchise dit du contrat social et comment elle le met en scène : John Wick et le contrat social.