Archives de catégorie : Longs métrages

Suspiria, de Luca Guadagnino

Remake de 2018 du film de Dario Argento de 1977. L’action prend place dans le Berlin de 1977. La ville est divisée par le Mur, la bande à Baader a pris un vol de la Lufthansa en otage, l’agitation politique est intense. Au milieu de tout ça, l’action gravite autour de l’école de danse Markos : une nouvelle élève américaine très douée vient d’arriver, une autre élève est portée manquante, elle a confié à son psy qu’elle pense que les professeures de l’école sont des sorcières. La pratique de la danse dans l’école viserait à accomplir des rituels, notamment la régénération de la fondatrice de l’école, gravement malade.

Avis mitigé. Déjà, le film est clairement trop long. 2h26 c’est au moins 26 minutes de trop, voire 1h. Toutes les allusions au contexte politique n’apportent absolument rien à l’histoire, il est sous-entendu que Patrizia (l’élève disparue) était impliquée dans des groupes d’extrême-gauche, mais ça n’a jamais d’impact. Toute la ligne narrative autour du psy est aussi sans intérêt à mes yeux. J’ai l’impression qu’elle sert uniquement à montrer le budget qui a pu être mis dans la reconstitution du décor du Berlin de l’époque. Ce qui est certes très bien, mais si ça ne sert aucun propos dans le film…

Sur l’aspect horrifique, on a très vite des indications qu’il se passe effectivement des événements surnaturels dans l’école et que les profs sont effectivement des sorcières. C’est une variation par rapport au premier film, et qui marche bien avec les moyens qu’ils ont pour mettre en scène le surnaturel (et les scènes des sorcières qui discutent au restaurant ou dans leur cuisine collective sont assez cools en termes de dynamique de groupe), mais derrière le film met quand même beaucoup de temps à monter, avec des persos qui enquêtent sur ce qui se passe alors que le spectateur a déjà les infos. J’ai bien aimé le final qui part totalement en latte, mais le crescendo aurait pu être plus réussi.

Dans les éléments que j’ai beaucoup aimé, il y a le cast. Dakota Johnson et Tilda Swinton réussissent très bien leur rôle, et plus généralement le casting de toutes les élèves et profs fonctionne bien. Le côté béguinage maléfique de l’école de danse, avec quasi exclusivement des rôles féminins marche très bien. L’architecture de l’école de danse est intéressante dans les grands espaces, mais n’est pas aussi réussie que celle de l’originale. Les costumes (la grande robe de Tilda Swinton notamment) et les scènes de danse sont très bien, le fait de voir vraiment de la danse par rapport à l’original est un gros plus. Par contre la musique de Thom Yorke ne vaut pas celle de Goblin dans l’ambiance qu’elle installe.

En résumé, je pense que je recommande le visionnage, surtout pour comparer la proposition par rapport à l’original, mais sans être totalement convaincu par le film.

Coupez !, de Michel Hazvanicus

Film français sorti en 2022, divisé en trois parties : Une demie-heure présentant un film de zombies méta où pendant un tournage de film de zombie, l’équipe de tournage est attaquée par de vrais zombies ; les trois mois avant le tournage de ce film où l’on voit Rémy Bouillon, petit réalisateur de films publicitaires et de clips accepter de le tourner pour une nouvelle plate-forme de streaming japonaise, en un plan séquence diffusé en direct ; puis enfin le tournage du film initial vu depuis les coulisses, les conditions plus que chaotiques du tournage en direct expliquant les incohérences de tout ce qui était montré au spectateurs dans la première partie du film.

J’ai bien aimé. Après Immortality (et dans une certaine mesure I’m thinking of ending things) je suis dans une petite phase « cinéma et méta ». Coupez ! est visiblement l’adaptation d’un film japonais, Ne coupez pas !, le côté portage du film du Japon à la France est repris en interne, avec des conséquences absurdes, comme le fait que tous les personnages portent des noms japonais et parlent d’expériences réalisées sur place par l’armée japonaise alors qu’ils sont clairement dans un centre commercial en Île-de-France. Le film donne un peu envie d’en tourner soi-même, avec un côté bordélique du tournage, la satisfaction de la fin du film (accentuée ici par le côté « plan-séquence en direct qu’il faut réussir à tenir une demi-heure », où la fin du tournage intense correspond à la fin du travail sur le film) et du travail collectif étant bien mis en scène dans la pyramide humaine de la fin.

Le côté plan-séquence d’une demi-heure m’a un peu fait penser à l’expérience de l’épisode final de The Third Day, performance diffusée en direct à la télévision pendant 8h, et qui avait effectivement des problèmes de faux raccord, évidemment les hommages

Je recommande.

I’m thinking of ending things, de Charlie Kaufman

Eternal Shining of the Spotless Mind

Film étatsunien paru en 2020. Lucy part rencontrer les parents agriculteurs de son petit ami Jake. Dans la voiture qui les emmène dans la ferme isolée, elle réfléchit à sa volonté de mettre fin à la relation avec Jake. Intéressant mais déprimant. (spoilers ensuite).

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Nope, de Jordan Peele

Film étatsunien de 2022. OJ et Emerald Haywood vivent sur le ranch familial, où ils dressent des chevaux qui sont utilisés dans des films. Suite à la mort de leur père, l’entreprise est en mauvaise posture. Mais OJ découvre qu’une créature mystérieuse (et dangereuse) rode dans le désert. Les deux adelphes décident de filmer la créature et de vendre le film pour renflouer leurs finances.

J’ai beaucoup aimé. Le scénario est assez minimaliste, mais il mêle pas mal de thèmes : le cinéma, la relation aux animaux, les relations familiales… de façon réussie. L’extraterrestre est original (avec un design assez low-fi mais qui fonctionne bien), le rapport qu’ont les humains avec lui aussi. C’est très bien filmé et très beau, les personnages sont très réussis. Mêmes les digressions sur le passé de Jupe qui n’ont à première vue pas grand chose à voir avec l’intrigue originale (même si en fait un peu) sont réussies. C’est un peu l’anti-Prey.

Je recommande fortement.

Megamind, du studio Dreamworks

Film d’animation étatsunien sorti en 2010. Deux bébés extraterrestres sont envoyés sur Terre à la destruction de leur planète. L’un a des superpouvoirs et devient le défenseur de Metrocity sous le pseudonyme de MetroMan ; l’autre, forcé par les circonstances, décide de devenir sa némésis, le supervilain MegaMind. Un jour, contre toutes attentes, un des plans de MegaMind fonctionne et il vainc MetroMan. Devenu le maitre de MetroCity, il réalise vite que la vie sans challenge lui est bien fade. Il décide de se créer un nouvel antagoniste, et au même moment se rapproche de la journaliste qu’il avait l’habitude de kidnapper pour inciter MetroMan à venir le combattre.

C’était sympa. Sans être le film du siècle, c’est une subversion réussie des tropes du super-héros et du super-villain. Les plans de MegaMind sont juste ce qu’il faut de convolus, foireux et malins pour être rigolos. Un certain nombre de retournements de situations se voient venir d’un peu trop loin, mais globalement on reste bien accroché dans l’histoire (peut-être un bémol sur le perso de la journaliste qui est essentiellement là pour servir d’intérêt amoureux et qui est moins creusé que les autres).

A Serious Man, des frères Coen

Film étatsunien sorti en 2009 et réalisé par les frères Coen. On suit quelques semaines de la vie de Larry Gopnik, un professeur de physique membre de la communauté juive américaine, alors que tout semble s’effondrer autour de lui : un de ses élèves tente de le soudoyer, sa femme lui demande le divorce, son frère squatte son canapé, ses deux enfants n’arrêtent pas de le submerger de demandes.

J’ai beaucoup aimé. Sans surprise puisque ça parle de la vie dans une communauté juive étatsunienne, ça m’a rappelé certains romans de Philip Roth. Il y a un humour très pince-sans-rire. C’est très bien filmé, très bien reconstitué. C’est difficile de dire en quoi c’est un bon film parce qu’il a l’air très basique, très resserré sur une histoire particulière, mais ça l’est.

L’Été meurtrier, de Jean Becker

Film français de 1983, adapté du roman éponyme de Sébastien Japrisot. Dans un village du Sud-Est de la France, une nouvelle famille s’installe. Le père est hémiplégique, la mère d’origine allemande et taiseuse, et la fille, « Elle », (jouée par Isabelle Adjani) fait tourner la tête de tous les garçons du village. Mais elle jette son dévolu sur Pimpon (Alain Souchon, très bon), mécanicien auto et pompier volontaire. Pimpon l’aime aussi, mais il ne comprend pas ses soudaines sautes d’humeur, ses absences inexpliquées et sa fureur à l’évocation de certains détails. A travers une narration qui saute d’un personnage à l’autre, on va découvrir les secrets du passé d’Elle et de sa famille, en passant par plusieurs fausses pistes.

Sentiment mitigé. L’intrigue globale est intéressante mais le film met longtemps à démarrer, les acteurs ne jouent pas toujours très bien et les rôles féminins sont quand même assez caricaturaux. Après on se laisse prendre au film a partir du moment où on commence à avoir quelques révélations.

Je pense que je recommanderais plus le livre que le film, mais il faudrait que je lise le livre pour confirmer cette impression.

Suspiria, de Dario Argento

Film italien de 1977. Susie, une danseuse new-yorkaise, arrive à Freiburg pour intégrer une académie de danse prestigieuse. Le soir de son arrivée elle croise une élève terrifiée qui meurt dans la nuit. Alors qu’elle voulait être externe, elle se retrouve poussée très fortement à être interne. Sa cothurne lui fait par de ses suspicions qu’il se passe des événements paranormaux dans le bâtiment, et une série de morts vient appuyer cette thèse, jusqu’à un affrontement final entre Susie et l’équipe enseignante.

J’ai beaucoup aimé. Le scénario, n’est pas très élaboré, mais les visuels sont incroyables. Il y a des couleurs dans tous les sens, l’architecture de l’école est magnifique. Les meurtres et plus généralement la mise en scène sont assez outrés, mais ça marche bien dans l’ambiance du film. Mention spéciale à la bande-son, très présente et qui porte énormément l’ambiance du film.

Je recommande, on voit pourquoi c’est un classique du genre.

J’ai depuis vu le remake de 2018, qui présente des défauts (la longueur, des arcs narratifs sans intérêt) mais vaut le coup d’être regardé pour la comparaison.

Point Break, de Kathryn Bigelow

Film étatsunien de 1991. Keanu Reeves dans un de ses premiers rôles interprète Johny Utah, un agent du FBI sur sa première affectation à Los Angeles. Sur la piste d’un gang de braqueurs que son partenaire (plus vieux et plus grognon) pense être composé de surfeurs, Utah va infiltrer le milieu du surf. La philosophie des surfeurs qui vivent dans le moment présent et pour leur dose d’adrénaline va le fasciner, mais il ne va cependant pas perdre de vue son objectif premier, démanteler le gang de braqueurs.

J’ai beaucoup aimé, ce n’est pas une référence pour rien, mais par certains côtés c’est assez daté. C’est pas toujours bien joué, les rôles féminins sont assez nuls (et beaucoup là pour l’eye candy, même si le rôle de Tyler est un peu plus intéressant), mais par ailleurs Bigelow met très bien en scène la fascination que Bodhi (magnifiquement joué par Patrick Swayze) exerce sur son entourage et notamment sur Johnny, et donne vraiment envie d’aller tout plaquer pour faire du surf. Même si le film est pas mal 50 shades of toxic masculinity, il y a aussi un réel attrait dans la vie de rebelle solitaire mise en scène dans le personnage de Bodhi et plus généralement dans le côté impulsif et décisionnaire des personnages masculins mis en scène.

Recommandé, avec un peu de recul sur l’intrigue.

L’Été de Kikujiro, de Takeshi Kitano

Film japonais de 1999. Masao, un enfant de 10 qui habite chez sa grand-mère, se retrouve seul pour passer l’été quand tous ses amis partent en vacances. Une amie de sa grand-mère propose que son compagnon l’emmène chez sa mère pour une semaine. Le compagnon en question s’avère plus intéressé par dépenser l’argent du voyage aux courses de vélo, puis embarque avec regret le gamin vers la ville de sa mère. Ils vont faire un certain nombre de rencontres randoms tout au long du voyage. L’anti-héros qui accompagne Masao se révèle totalement désastreux comme personne, sa première idée pour communiquer avec les gens consiste généralement à les insulter. Malgré ça il arrive souvent à ses fins, et décide au bout d’un moment qu’il a la mission de divertir Masao, recrutant pour se faire un écrivain qui voyage en van et deux bikers qui exécutent sans broncher tous ses ordres.

Globalement j’ai beaucoup aimé le film. Il dégage une ambiance fort estivale, un côté « journées qui s’étendent à l’infini » et chaleur qui pousse à ne pas faire grand chose. Recommandé pour un visionnage estival.