Archives de catégorie : Longs métrages

The Neon Demon, de Nicolas Refn

Film d’horreur étatsunien de 2016. Jesse, adolescente de 16 ans, arrive à Los Angeles avec des rêves de star-system plein la tête. Sa beauté et sa jeunesse vont faire qu’elle va effectivement rapidement percer dans le milieu. Passant de shooting photo en défilé de mode, elle va croiser la route de trois autres femmes (deux modèles et une maquilleuse) qui jalouse d’elles vont finir par la tuer.

Bon. Ça n’avait pas grand chose à dire. Plein de plan avec des lumières stromboscopiques, les hommes sont attirés par la beauté de Jesse, les femmes en sont jalouse et attirées aussi, les directeurs artistiques se comportent comme des connards. C’est un peu l’enfant raté de Death Becomes Her et La La land. En soit je n’ai rien contre les films d’horreur un peu expérimental avec pasz beaucoup de scénario, mais là c’est juste  » ouuuuh, attention à la jalousie féminine » et « le star-system c’est un peu creux » ? Merci on avait vraiment besoin d’un autre film sur ces sujets peu explorés. Sans parler des plans voyeuristes à base de meuf à poil ou en talons et sous-vêtements complètement gratuits.

The Exorcist, de William Friedkin

Film d’horreur états-unien paru en 1973. Regan McNeill est la fille d’une actrice célèbre.
Venue avec sa mère sur la côte Est des États-Unis pour un tournage, elle commence à avoir des sautes d’humeur. Examinée par des médecins et des psychiatres et soumises à une batterie de tests médicaux, elle ne réagit à aucun traitement et ne présente pas de lésion cérébrales qui pourrait expliquer son changement de comportement. Face à des manifestations de plus en plus impressionnantes et malgré son athéisme, sa mère finit en désespoir de cause par se tourner vers l’Église catholique pour demander un exorcisme.

J’ai bien aimé mais le rythme est assez étrange. On sent que c’est l’adaptation d’un bouquin et qu’ils ont voulu rester fidèle au texte même à des moments où ce n’était pas la meilleure idée.
Le prologue sur les fouilles en Irak est assez long et on n’entendra ensuite plus parler de Merrin pendant les 3/4 du film ; les histoires de profanation dans l’église du quartier sont évoquées puis disparaissent, le tournage du film de la mère de Regan a le droit à une scène puis disparaît.
A côté de ces défaut, il y a des scènes assez impressionnantes et des effets spéciaux très réussis : la scène de lévitation, la scène d’angiographie, la chambre glaciale en permanence.
Le personnage du père Karras, psy et jésuite en crise de foi, qui fait de la boxe et s’occupe de sa mère vieillissante est inattendu mais donne largement plus de relief au film qu’un archétype plus classique comme l’est Merrin.

Je recommande – si vous aimez les films d’horreur (après il n’est pas très effrayant pour les standards actuels).

To be or not to be, d’Ernst Lubitsch

Film étatsunien de 1942. Dans Varsovie occupée par l’Allemagne nazie, une troupe de théâtre va se retrouver en position d’empêcher un agent double de dénoncer à la Gestapo ses contacts dans la Résistance. Équipé d’une flopée de costumes issus d’une pièce sur le nazisme qu’ils n’ont jamais pu jouer, ils vont élaborer une série de mises en scène pour tromper et la Gestapo et l’agent double et récupérer les documents compromettants. Le tout alors que l’acteur principal de la troupe est obsédé par sa renommée et le fait que sa femme ait des contacts avec un aviateur polonais de la Royal Air Force anglaise.

J’ai beaucoup aimé. Tout le côté quiproquos et double jeu est très réussis, les setups/payoffs et le comique de répétition fonctionnent très bien, les nazis sont minables exactement comme il faut. J’ai trouvé intéressant d’avoir une structure où le personnage de Tura, crucial pour toute l’opération et qui se met en danger n’est pas pour autant héroïque et apparait même franchement ridicule avec son égo surdimensionné.

Je recommande.

Victoria, de Justine Triet

Film français de 2016. Victoria est une avocate à la vie un peu chaotique. Élevant seule ses deux filles, son ex est un écrivain qui a eu un certain succès en mettant en scène sa vie à elle sur son blog d’autofiction en déguisant très peu les éléments. Elle accepte de défendre un de ses amis qui est accusé d’avoir poignardé sa compagne lors d’un mariage ; un ancien client à elle et ancien dealer vit chez elle et l’assiste pour préparer le procès et babysitter ses filles. Elle est en permanence à la limite du burn-out voire de l’autre côté et enchaîne les clopes.

J’ai beaucoup aimé. C’est bien filmé, les acteurs jouent bien, y’a un très bon usage de la musique (notamment sur le montage des six mois de suspension) et globalement une bonne bande son. On détecte une petite tendance aux films de procès avec des chiens comme acteurs-clefs chez Justine Triet (une tendance assez niche). On voit largement venir la romance qui était dispensable, mais ça reste un défaut mineur (et une romance assez originale).

Bref, recommandé.

Shin Godzilla, de Hideaki Anno et Shinji Higuchi

Film de kaiju sorti en 2016, qui reboote la franchise Godzilla. Une créature gigantesque est repérée dans la baie de Tokyo et commence à entre dans la ville et à la détruire. On suit les efforts du gouvernement japonais pour comprendre la situation puis lutter contre la créature, tout en étant paralysé par sa bureaucratie et son inféodation aux États-Unis.

J’ai beaucoup aimé. Le design de la créature qui utilise des effets spéciaux manuels est très cool, les plans sont originaux, le point de vue sur/depuis la machine bureaucratique qu’est le gouvernement aussi, comme le fait de centrer les enjeux sur la menace de la radioactivité et de l’ingérence des autres pays plutôt que sur la menace que fait peser le kaiju sur la ville. Très bonne surprise, grosse reco.

Zalava, d’Arsalan Amiri

Film iranien de 2021. Dans un village reculé de l’Iran de 1978, les habitants pensent être victime d’une malédiction. Une fois l’an un démon vient posséder une personne du village. Si les exorcistes arrivent à temps, ils peuvent maîtriser le démon.
Le sergent qui dirige le poste de garde local ne croit pas à ces superstitions. Il confisque les fusils des villageois et fait arrêter l’exorciste. Commence une longue nuit où aucun démon ne se manifestera, mais la peur des villageois fera partir la situation hors de contrôle.

Pas totalement convaincu. Les décors sont beaux et il y a des scènes très bien composées (la fin notamment avec la célébration des villageois qui contraste avec les trucs dramatiques qui viennent de se passer), mais je n’ai pas trouvé ça très bien joué ni très bien rythmé, ce qui est dommage parce que le pitch était alléchant.

Article invité : Un métier sérieux, de Thomas Lilti

Film de 2023, dans la lignée des autres films de Thomas Lilti : une comédie dramatique réaliste humaniste chorale (ça va, vous suivez ?) dans un milieu professionnel connu-mais-méconnu (précédemment : la médecine, ici : les profs de collège), avec une galerie de personnages (joués par ses acteurs habituels, ie Louise Bourgoin, François Cluzet et Vincent Lacoste) humains et attachants avec leurs défauts et leurs fêlures (tous les profs parents sont pas oufs avec leur enfants). Dans la forme, ça ressemble à beaucoup d’autres films sur l’école (La vie scolaire, Entre les murs) : chronologique, du début à la fin de l’année scolaire, alternant des moments anodins type tranches de vie (pour le côté documentaire / attachement aux personnages) avec une série d’épisodes forts « incontournables » (la rentrée, le conseil de discipline, la sortie scolaire, le craquage en classe…) pour le côté dramatique. Moi, c’est ma came : j’ai passé un bon moment, les acteurices sont top, j’ai rigolé et frémi. Mais ça reste aussi assez lisse, sans discours très politique ou radical sur ce qu’est l’école comme institution – sauf lors d’un débat sur la pertinence du conseil de discipline et de l’exclusion. Tous les collègues s’adorent, les tensions interindividuelles n’existent pas – sauf lors du débat sus-mentionné. Mention râlage pour les ébauches de romance, forcément hétéro, qui certes montrent que, comme partout, les gens se chopent au travail, mais étaient aussi largement évitables à mon sens.

Anatomie d’une chute, de Justine Triet

Palme d’or 2023. Sandra, écrivaine, vit dans un chalet alpin avec son mari Samuel et son fils Daniel. Un jour, Samuel est retrouvé mort. Le film va montrer le déroulé du procès visant à établir si Sandra est responsable de la mort de Samuel.

J’ai beaucoup aimé. J’avais peur que 2h30 de film de procès ce soit un peu long, mais à part les 10 dernières minutes (après l’annonce du verdict, en gros), on ne les voit pas passer. Le film prend le temps d’installer les éléments de l’intrigue au début, et d’un coup ça décolle et on est dans un tunnel, la Palme est totalement méritée. Le film montre la perception de la relation de Sandra et Samuel à travers les yeux de Sandra, de Daniel, et via un discours rapporté et des enregistrements, à travers les yeux de Samuel – ainsi que la perception de leur relation par le grand public. C’est très bien joué (sauf peut-être les rôles de la présidente de la cour d’assise et celui de l’avocat général, qui semblent être là pour faire les antagonistes, et je ne suis pas convaincu non plus par le personnage de Marge) – même le chien joue bien. Les enjeux de plurilinguisme (même si on peut regretter de ne pas entendre un mot d’allemand alors que le personnage principal est allemande, pourquoi elle parle en anglais et pas en allemand au procès ?) et d’écriture/création sont réussis.

C’est un peu un retournement du trope de la femme dans le réfrigérateur : la mort d’un homme donne le point de départ de toute l’intrigue, il y a des enjeux de tension dans le couple mais c’est Samuel qui se plaint d’être enfermé à la maison pendant que sa compagne à une carrière brillante – je fais un peu un rapprochement avec Revolutionary Road aussi.

Grosse reco.

Nimona, de Troy Quane and Nick Bruno

Film d’animation adapté du comic éponyme de ND Stevenson. Dans un royaume de fantasy futuriste, les chevaliers protègent la population de toutes sortes de menaces. Pour la première fois, la reine va sacrer chevalier un roturier en plus de la promotion habituelle de nobles. Mais lors de la cérémonie, Ballister Blackheart tue la reine. Poursuivi par l’ensemble des chevaliers dont son petit ami, il va se découvrir un.e allié.e inattendu.e (et indésiré.e) sous la forme de Nimona, qui va se proposer spontanément pour être son sidekick et l’aider à se venger des chevaliers.

Je ne suis pas fan du design de Ballister et Ambrosius (les cheveux longs du comics marchaient mieux pour moi), mais sinon fort bonne adaptation, qui n’hésite pas à s’éloigner du matériel source pour raconter l’histoire un peu différemment en assumant que le changement de medium offre des possibilités différentes. Bonne bande-son, bonnes punchlines, bonne animation (du numérique très classique mais très bien maitrisé).

Je recommande.