Archives de catégorie : Screens, thousands of them

Ape Out, du studio Devolver

Jeu vidéo paru en 2019. On joue un gorille qui s’échappe de différents environnements : un laboratoire, un gratte-ciel, une zone de guerre, un bateau. Pour ça, il faut traverser le niveau sans se faire tuer par les humains, potentiellement en les tuant en premier. On a globalement deux mouvements : balancer les humains ou les prendre pour s’en faire un bouclier (puis les balancer), et l’intelligence d’être stealthy malgré le fait d’être un gorille massif.

C’était cool. C’est un jeu court qui se fait en quelques heures, avec une très belle DA (on voit tout de dessus mais pas de façon omnipotente, le champ de vision est obscurci par les obstacles. Et surtout il y a une bande son composée de percussion de jazz, qui réagit à l’action du jeu (s’accélère en fonction du nombre d’ennemis, cymbale lorsqu’on tue qq, autres éléments contextuels). Je recommande.

Une affaire de famille, de Hirokazu Kore-eda

Film japonais paru en 2018. Un soir d’hiver, une famille trouve la fille de leurs voisins en t-shirt sur le balcon. Ils recueillent l’enfant et lui donnent à manger. Révoltés par les mauvais traitement subis par l’enfant, ils décident de la garder avec eux. Cet enlèvement vient s’ajouter à un mode de vie déjà marginal : ils vivent à 4 adultes et un premier enfant dans une toute petite maison, vivent de vols à l’étalage, d’une pension de retraite et de petits boulots ; et les liens familiaux entre eux sont plus compliqués qu’il n’y parait au premier abord.

J’ai bien aimé, c’était assez posé, l’effet de découverte progressive des relations familiales fonctionne bien, les personnages sont à la fois assez attentifs les uns aux autres et très wtf dans leur relation à la société en général dont ils ne suivent pas du tout les règles.

Recommandé.

Challengers, de Luca Guadagnino

Film états-unien paru en 2023. Art et Patrick sont deux tennismen junior. Élèves dans un internat pour sportifs prometteurs, ils sont extrêmement complices. Ils font la rencontre de Tashi Duncan, une tenniswoman de leur âge extrêmement talentueuse et très belle. Les deux vont tenter de la séduire, initialement de façon non compétitive (une jolie scène de baiser à trois). Mais Tashi est obsédée par le tennis et déclare aux deux amis qu’elle sortira avec celui des deux qui gagnera le match qu’ils ont le lendemain : ce sera Patrick. Mais Tashi se retrouve à Stanford avec Art, pendant que Patrick continue le tennis professionnel. Suite à une blessure grave de Tashi qui la force à arrêter le tennis, c’est Art qui est à ses côtés, et c’est avec lui qu’elle va construire sa vie, devenant sa femme et sa coach. Mais Art n’est pas aussi talentueux que ce que Tashi voudrait qu’il soit pour deux, et elle a encore des sentiments pour Patrick, …

Comme les précédents films de Guadagnico que j’ai vu, je ne suis pas très convaincu : il y a de bons passages, des idées de mise en scène intéressante, une partie de la psychologie des personnages développée est intéressante, mais c’est toujours partiel : finalement on est sur un triangle amoureux très classique, où si les persos masculins sont bien caractérisés, les motivations de Tashi elle-même reste une boîte noire (et l’obsession des deux amis pour elle est assez basique aussi). Le montage qui coupe l’histoire avec des A/R passé/présent la rend artificiellement mystérieuse, alors que c’est finalement assez classique. Certains effets (le cour filmé par en dessous du terrain transparent, le POV de la balle ou des joueurs par moment sont intéressant, mais deviennent rapidement gadget. La musique est beaucoup trop présente et insistante à mon goût.

Bref, du potentiel mal exploité.

Nosferatu, de Robert Eggers

Film fantastique de 2024, remake des deux versions précédentes (Murnau, 1922 et Werner Herzog, 1979). Dans la ville de Wisburg en 1838, Thomas Hutter est chargé par son patron d’aller faire signer à un client, le comte Orlok, le bail d’une propriété qu’il souhaite acquérir à Wisburg. Thomas s’embarque pour un voyage de 6 semaines jusqu’aux Carpathes, ou le comte l’accueille dans son château en ruine. Thomas ne réalise pas que son patron est en fait de mèche avec le comte et que le contrat qu’il fait signer le fait en réalité renoncer à ses droits maritaux au profit du comte, obsédé par sa femme depuis que celle-ci l’a fait revenir à la vie avec une prière dans sa jeunesse (parce que pourquoi pas).

Ça reprend fidèlement l’histoire du film de Murnau, qui est un décalque non-autorisé de celle de Dracula (ce qui explique les noms changés, mais sinon ce sont vraiment les mêmes ressorts). C’est assez long (2h10), mais j’ai bien aimé l’ambiance. Comme ça se base sur un vieux film, forcément c’est pas du tout le rythme d’un film moderne, mais les ambiances sont réussies, avec des espèces de nuit américaine qui baignent le film dans des ton grisâtres. Tous les effets qui jouent avec l’ombre du vampire marchent assez bien, la scène où l’ombre de sa main s’étend sur la ville entière notamment, très beau symbolisme et on voit bien l’hommage à l’expressionnisme allemand de l’original. L’apparence du vampire lui-même d’ailleurs, en espèce de cadavre répugnant (on n’est pas du tout dans le vampire sexy) est très réussie aussi.

Je recommande (si vous aimez les vampires dégueulasses).

Perfect Days, de Wim Wenders

Film germano-japonais de 2024. Hiramaya travaille en tant qu’agent d’entretien des toilettes publiques d’un quartier chic de Tokyo. Il a des semaines routinières, rythmées par son travail, la prise de photos sur la pause du midi, un repas dans une échoppe le soir, le développement de ses photos et un passage au bar le weekend. Il est solitaire mais heureux de sa vie, il lit des livres, écoute des cassettes sur l’autoradio de son van, et fait pousser des jeunes arbres. Le film le suit dans son quotidien où seuls quelques événements imprévus le fond dévier de sa routine : l’arrivée inattendue de sa nièce, une demande de son collègue…

J’ai bien aimé. C’est assez contemplatif, mais on se prend à accompagner Hirayama dans son quotidien et dans le bonheur qu’il prend dans les petites répétitions de la vie. C’est pas mal un film sur la maintenance et la répétition du même, des thèmes qui me parlent. Les séquences de rêve en noir et blanc sont assez réussies dans le fait de montrer des rêves à la fois non-figuratifs et qui reprennent des éléments de la journée ou de ce qu’on suppose être le reste de la vie d’Hirayama.

Russian Doll, de Natasha Lyonne, Amy Poehler et Leslye Headland

Saison 1 (vue en 2019) :

Une série Netflix où Natasha Lyonne reprend exactement le même personnage que dans Orange is the New Black (a-t-elle un unique style de jeu, ou essayent-ils de créer un Netflix Extended Universe ?). Fêtant son 36e anniversaire dans l’appart d’une de ses potes qui est un pinacle de concentré d’artistes bohèmes new-yorkais.e.s, elle décède lors de la soirée. Et se réincarne dans la salle de bain au début de la soirée. Encore et encore. Le premier épisode est un peu lent, mais globalement c’est cool. 8×30 minutes, ça se regarde comme un gros film plus que comme une série. Ça part dans pas mal de directions différentes, ce qui est intéressant. La série a le temps de bien explorer le caractère de Nadia et sa relation aux personnes dans sa vie. On sait pas trop où ça va mais un des plaisirs est de se laisser porter par le truc et de regarder Nadia investiguer diverses pistes qui pourraient expliquer ce qui lui arrive. La fin est intéressante dans le choix qu’elle fait de laisser les personnages ne pas avoir une histoire commune et devoir gérer chacun de leur côté la connaissance des boucles temporelles.

Le côté ‘scénario multiples’ fait un peu ce qu’aurait pu donner l’épisode Banddersnatch de Black Mirror avec un vrai scénario (même si là on ne file pas la main au spectateur sur quelles pistes explorer, mais ce serait adaptable).

En revenant quelques mois plus tard sur cette critique, je me dis que y’avait à la fois un côté plaisant à regarder et un côté quand même un peu vide (dont je trouve qu’il se retrouve dans beaucoup de séries Netflix) : Ca avait l’air vraiment cool sur le papier (merci les algorithmes), t’as passé un bon moment devant, mais ça te laisse pas d’impression de long terme, t’en retire pas quelque chose. Un peu de la junk food de série, agréable sur le moment mais que t’oublie vite (bon, sauf que ça te file pas des maladies cardiovasculaires).

Saison 2 (vue en 2025) :

J’ai préféré cette seconde saison à la première. Le personnage de Nadia est confrontée à un nouveau dispositif de voyage temporel : on quitte la boucle, cette fois-ci en prenant le train 6622 du métro new-yorkais elle se retrouve dans le corps de sa mère dans les années 80 (et enceinte d’elle-même), ou de sa grand-mère dans la Hongrie sous occupation nazie. Elle explore son histoire familiale, tente de changer des choses (mais le temps est figé), de réparer les traumas et les erreurs. Mais en parallèle le temps s’écoule dans le présent de ses 40 ans et elle y rate des événements importants. Le rapport à la famille et à l’Histoire est intéressant, la façon dont les paradoxes temporels sont juste acceptés sans explications compliquées fonctionne bien. Voir Natasha Lyonne se balader à travers les époques avec son attitude « Devil may care » c’est très rigolo.

Arcane, de Christian Linke et Alex Ye

Série télévisée en 2 saisons, parue en 2023 et 2024. L’animation est très belle mais l’histoire m’a laissé assez indifférent, une rivalité entre deux sœurs et deux cités jumelles, mais avec des éléments très peu caractérisés j’ai trouvé.

Si la première saison ça va encore, la deuxième c’est clairement le bazar avec 15 000 lignes narratives qui commencent on sait pas trop pourquoi et finissent pas vraiment. Tout les personnages deviennent overpowered, mais pour un truc qui commençait en mode lutte des classes, ça passe vite en mode « 5 individus peuvent changer l’Histoire et les masses les regardent faire », avec en plus un militarisme sous-jacent pas du tout remis en question.

Cool bande-son though.

Silo, de Graham Yost

Série télé adapté du roman éponyme, parue (pour la première saison) en 2023. On suit l’enquête de Juliet Nichols, ingénieure machine promue shérif du Silo, une structure abritant 10 000 personnes sous la surface d’un monde toxique.

Globalement c’est assez fidèle au bouquin, avec des moyens pour la production. J’ai bien aimé l’apparence qu’ils ont donné au Silo. Par contre après quelques bons épisodes, ça se met à traîner en longueur, et faut attendre l’épisode 8 pour qu’il se remette à se passer des trucs. Sentiment mitigé, donc, mais je recommande toujours le bouquin.

Saison 2 :

J’ai largement préféré le rythme de la saison 2, l’alternance des lignes narratives entre Juliet et la rébellion des étages machines fonctionnait bien, même si côté Juliet y’a beaucoup d’aller-retours. Le personnage de Solo est plutôt bien écrit, les péripéties de la rébellion me semblent s’éloigner de ce qu’il y avait dans le bouquin (mais je me rappelle pas très bien des détails du livre donc sans certitudes). Bernard fait un bon méchant, par contre je n’ai pas été très convaincu par le perso de Simms dont on ne sait pas trop ce qu’il veut. Camille est bien plus intéressante. Bon et à part la construction du pont au début, ça manquait un peu de grosses machines, vivement que dans la S3 ils remettent en route l’excavatrice.

L’esthétique du Silo déserté et en ruine est plutôt réussie aussi, bonne variation sur l’esthétique initiale.

The Penguin, de Lauren LeFranc

Série états-unienne sortie en 2024, qui se passe immédiatement après le film The Batman. On suit l’ascension dans le monde de la pègre d’Oswald « The Penguin » Cobb, un gangster affilié à la famille mafieuse des Falcone, qui va monter cette famille et celle des Maroni l’une contre l’autre pour avoir le champ libre pour régner sur le monde criminel de Gotham City. Pas de présence de Batman ou de supercriminels, on est sur une histoire de gangsters assez classique (nonobstant la place de la psychiatrie et d’une drogue dopée au scenarium). Dans son ascension, le Pingouin va prendre sous son aile (pun intended) Victor Aguilar, un jeune homme qui a perdu sa famille dans les attentats qui ont touché Gotham à la fin de The Batman

La performance de Colin Farrell dans le rôle titre est assez impressionnante, et le maquillage le rend assez méconnaissable. Toute la relation du Pingouin avec sa mère et avec Victor est très réussie et la partie la plus intéressante de la série, ce côté psychologique fonctionne bien et on se retrouve à être à fond pour ce personnage pourtant assez horrible.
J’ai globalement bien aimé la première moitié de la saison, ça perd un peu en rythme et en crédibilité après : la focale faite sur les personnages fait qu’on se retrouve avec la cheffe de la famille mafieuse qui va faire ses basses œuvres toute seule et qui se met en coloc avec le chef de la famille rivale, c’est pas franchement crédible. Toute l’histoire Sofia/Julian Rush était aussi assez accessoire.

Recommandé si vous avez aimé le film The Batman ou Colin Farrell avec beaucoup de maquillage.

Coco, de Lee Unkrich (studios Pixar)

Film d’animation états-unien de 2017. Miguel vient d’une famille de coordonièr·es mexicain·es qui rejettent tout ce qui est musical : l’ancêtre de la famille a été abandonné par son mari musicien qui voulait vivre de son art. Mais Miguel adore la musique. Pour participer à un tremplin, il va le jour de la fête des morts voler la guitare de son idole, Ernesto De La Cruz. Mais ce vol de la propriété d’un défunt va maudire Miguel : transporté dans le monde des morts, il va devoir demander la bénédiction de la partie défunte de sa famille pour revenir parmi les vivants. Sauf que sa famille morte déteste aussi la musique et ne veut lui donner sa bénédiction que contre un renoncement. Toute sa famille, sauf le mystérieux musicien qui a abandonné sa femme…

C’était visuellement très beau. L’histoire est réussie, avec de bons rebondissements et des personnages secondaires (le chien notamment) réussis. Petit bémol sur le fait que la critique de la famille que le film esquisse au début est finalement totalement effacée : il y avait juste un manque de communication, mais finalement tout le monde peut se retrouver autour de la musique, et tout le monde dans la famille était très gentil, les méchants sont à l’extérieur.