Tous les articles par Machin

Picnic at Hanging Rock, de Peter Weir

Film australien de 1975. Lors d’une sortie scolaire dans le bush australien en 1900, trois pensionnaires et une enseignante d’un pensionnat pour jeunes filles disparaissent. On va suivre l’impact de cette disparition sur le pensionnat et la petite ville à proximité, entre rumeurs sur ce qui a pu se passer, fausses pistes, et évolutions immédiates pour le pensionnat (turns out que les parents, même quand ils sont anglais et distants, n’aiment pas que l’on égare les enfants qu’ils vous ont confiées).

Étrangement ça m’a un peu fait penser à Gone Girl pour un point très spécifique : j’ai l’impression que y’a des espèces de sauts dans l’évolution des personnages, de leur relation, qu’on a un peu du mal à suivre, et qui je pense font dans les deux cas plus sens dans le livre dont le film est adapté, avec des possibilités de narration interne (ou juste d’y passer plus de temps).

Sinon, j’aime bien l’ambiance outback australien et formation géologique random (+ pensionnat du tournant du siècle avec des décos anglaises très moches) et un peu onirique (visiblement pendant le tournage l’équipe mettait des voiles sur la caméra pour avoir ce rendu d’image un peu adouci/flouté, l’origine des filtres instagram enfin révélée). Dans la première partie du film (jusqu’à la disparition) tout le monde a l’air d’être sous drogue (mais c’est peut être juste le fait d’être des anglais.es réprimé.es et cuit.es par le soleil). Après ça se perd un peu je trouve, trop de trucs en parallèle (l’enquête des deux mecs, les conséquences dans le pensionnat, la battue de la ville) mais rien qui n’est exploré à fond (notamment le mystère de ce qui se passe avec le rocher, qui s’il n’a pas besoin d’être résolu, n’a en l’occurence l’air d’inquiéter personne plus que ça. Le côté ça devient un événement médiatique et les gens se font prendre en photo en souvenir de la battue par contre, très intéressant (et on retrouve des parallèles avec Gone Girl et le traitement médiatique des disparitions sensationnelles).

Les Oranges de Yalta, de Nicolas Saudray

Uchronie française parue en 1992. Durant la seconde guerre mondiale, Rudolph Hess convainc le Japon d’attaquer la Russie en même temps que l’Allemagne. Prise entre deux fronts, la Russie n’arrive pas à faire face, et la guerre tourne en faveur de l’Axe. On suit le point de vue de différents personnages – figures historiques ou anonymes pris dans les événements, de 1940 à la fin des années 50. Ça se lit bien, et la multiplicité des points de vue donne un roman choral qui marche bien pour une uchronie, mais ça n’a rien de révolutionnaire, ni dans l’uchronie décrite, ni dans le style d’écriture.

Protectorats, de Ray Nayler

Recueil de nouvelles, paru en 2023 au Bélial (les nouvelles ont originellement été publiées dans des magazines en anglais, mais il n’existe pas de recueil équivalent en anglais). Certaines des nouvelles partagent un univers uchronique commun, où les États-Unis ont exploité la technologie d’une soucoupe volante tombée sur leur territoire en 38 pour gagner une énorme avance technologique et à la fin de la seconde guerre mondiale, repousser les communistes jusqu’en Russie, gardant toute l’Europe et une partie de l’Asie Mineure sous la forme de « protectorats », d’où le titre du recueil.

J’ai bien aimé l’écriture, l’auteur installe ses univers uchroniques ou science-fictif avec efficacité. Les uchronies sont l’occasion d’une SF « à la papa » avec des voitures volantes, des espions russes et des robots qui jouent au baseball, qui fonctionne très bien (surtout qu’il y a quand même un élément plus moderne dans le fait que les US ne sont pas vraiment pour autant présentés comme l’empire du Bien (que fait notre administration avec toute cette puissance ?), et que les personnages sont hantés par des PTSD liés à ce qu’ils ont fait pendant la guerre. Les nouvelles plus futuristes parlent pas mal de ce qu’est la conscience, surtout si elle devient transférable dans d’autres corps, identiques ou différents, de ce qu’est la frontière de l’Humanité avec des androïdes qui luttent pour leur droits et des IA qui élèvent des enfants.

Je recommande pour de la SF classique et efficace.

Les derniers jours du parti socialiste, d’Aurélien Bellanger

Roman français paru en 2024. Aurélien Bellanger retrace une version fictionnalisée de la création du Printemps Républicain, renommé le mouvement du 9 décembre dans son ouvrage. On suit en parallèle les vies de Grémond (inspiré de Laurent Bouvet), Taillevent (Enthoven) et Frayère (Onfray). On croise pas mal d’autres personnages plus ou moins fictifs (le Président de la République, Sauveterre – avatar de Bellanger, Belgrand (anciennement apparu dans Le Grand Paris – ça me réjouit qu’il existe officiellement un Bellanger Extended Universe).

C’est intéressant de lire un truc qui parle du Printemps Républicain et j’attendais la sortie avec impatience, mais vu que le roman est raconté du pt de vue intérieur de personnages assez peu sympathiques (y’a de la distanciation évidemment, mais c’est du 4e degré), faut quand même s’accrocher. C’était intéressant à lire, mais pas forcément son plus réussi, on est un peu trop le nez sur des événements (et les envolés lyriques de Bouvet ou Blanquer sur la laïcité, c’est quand même pas le sujet le plus passionnant du monde).

Après ce qui est trippant c’est évidemment la réception du bouquin, notamment avec Enthoven qui dit que c’est n’importe quoi parce que la date donnée dans le bouquin pour sa rencontre avec Onfray c’est la date à laquelle ils ont arrêté de se parler, ce qui prouve bien que Bellanger a tout inventé – il est à deux doigts de découvrir le concept de fiction, c’est touchant.

Un passage assez marrant où Sauveterre est invité à l’Élysée pour s’entretenir avec le président et envisage de le tuer avec la fourchette du dîner, avant de s’apercevoir que vu l’heure il n’est pas invité à dîner et que la pièce est donc « dépouillée de tout ces imaginatifs couverts ».

Pour celleux qui aiment déjà Bellanger (ou qui détestent déjà le Printemps Républicain, ça marche aussi).

Kaos, de Charlie Covell

Série télé sortie en 2024. L’histoire se passe dans un monde où les dieux de l’Olympe existent, et sont toujours vénérés de nos jours. L’histoire, racontée par Prométhée qui est à la fois protagoniste et narrateur omniscient, met en scène le début de la révolte des Humains contre ce panthéon, et particulièrement contre Zeus, dont la paranoïa le conduit à vouloir faire s’abattre des catastrophes naturelles sur l’Humanité pour les forcer à l’adoration.

Ca commence très bien, le côté mythologie modernisée fonctionne, Jeff Goldblum est très bon en tant que tyran domestiques aux capacités divines, mais ça s’essouffle un peu à partir de la moitié de la série. L’Olympe fait quand même très vide, avec une famille divine réduite à 6 personnes – même si les autres dieux et déesses sont évoqués on ne les voit jamais – et à part Zeus, ceux qu’on voit ne font pas grand chose de divin… De la même façon, le monde se réduit à la Crète, et même à sa capitale d’Heraklion, le reste n’est jamais évoqué. Il aurait fallu plus de dieux, moins de scènes filler dans les Enfers, et une ligne narrative + inspirante que celle d’Orphée (même si le twist dessus est intéressant). Ah et un point tout à fait mineur mais qui m’a personnellement agacé, c’est les petits bouts de latin. Oui ça fait antique, mais il s’avère que la langue grecque existe ? Et que c’est plus cohérent avec le panthéon grec et une histoire située en Crète ?

Bref, un gros potentiel pas totalement réalisé (+ une saison qui n’est que la moitié d’une histoire qui devrait se continuer dans la saison 2), mais si vous aimez de base la mythologie (et/ou Jeff Goldblum), vous apprécierez la série.

Jusant, du studio Don’t Nod

Jeu vidéo sorti en 2023. Un.e jeune muet traverse un désert parsemé de carcasses de bateaux et arrive au pied d’une tour gigantesque. Au fur et à mesure de son ascension de la tour, iel va découvrir l’histoire de ses ancien.nes habitant.es. Ça pourrait être Chants of Sennaar, c’est Jusant. Pas d’énigmes sur la construction du langage, mais de l’escalade pour arriver au sommet de la tour, en parcourant des zones avec des cultures/écologies distinctes.

C’était joli, l’univers est sympa, par contre c’est vraiment un walking simulator. Il n’y a pas de difficulté dans les énigmes, ni dans l’escalade. Si c’est intéressant d’avoir un mécanisme bras droit/bras gauche, pour le reste ça n’a pas du tout un rendu d’escalade. Pas de grimpe avec les jambes, pas de vraie gestion de la fatigue (pourquoi on ne peut pas se reposer sur ses pitons ? Ça m’a grandement perturbé). Si les mouvements du corps du perso sont assez réalistes en termes d’escalade (en imaginant qu’iel soit surmusclé.e et fort.e en technique), par contre point de vue contrôle on n’a jamais de variations.

Sympa pour l’univers et pour faire un jeu détente, mais manque d’un vrai rapport à l’escalade – en d’enjeux qui ne soient pas juste ce qu’on lit dans des éléments ramassés dans le paysage.

Inside, de Bo Burnham

Film sorti en 2021. Il s’agit d’un seul en scène, tourné pendant la pandémie de covid. Pour le background, Bo Burnham était une star d’internet qui a commencé à faire des spectacles sur scène, puis des crises de panique pendant ces spectacles. Du coup il a quitté la scène, suivi une thérapie, puis il s’est dit en janvier 2020 que c’était le moment de revenir sur scène, ce qui était Pas Le Meilleur Timing™. (Ce contexte n’est pas du tout nécessaire à avoir avant de lancer le film – perso je ne l’avais pas, il rajoute une couche au tout, mais c’est de toute façon évoqué pendant le spectacle). Du coup, il décide de tourner ce « comedy special » entièrement dans la (grande) chambre d’amis de sa maison. Il a masse matos et masse technique de son passé en tant que youTubeur, et il les exploite très bien.

Le spectacle est fait de pas mal de non-sequitur et de petites séquences séparées, Bo Burnham parle de son rapport à la mise en scène de soi, à la pertinence de faire des blagues quand le monde s’effondre, aux trucs merdiques qu’il a pu faire plus jeune (des blagues racistes, au hasard), de sa santé mentale… C’est pas mal méta, techniquement impressionnant, assez inclassable, et plus ou moins la seule œuvre (à l’exception de la saison 2 de Work in progress) qui donne un sentiment réaliste de ce que ça a été de vivre le confinement et ses conséquences.

Je recommande.

La Fabrique des lendemains, de Rich Larson

Recueil de nouvelles de science-fiction d’un auteur canadien, paru en 2020. Les longueurs des nouvelles sont variables. Globalement le recueil est intéressant, les nouvelles installent toutes rapidement des univers bien caractérisés (ce qui est un challenge à faire dans un format nouvelles). Les nouvelles ne proposent pas des styles ou des traitements super originaux – il y a pas mal de cyberpunk/biopunk assez classique notamment, mais c’est bien écrit et prenant. Une nouvelle était au dessus du lot par son originalité, pour moi : En cas de désastre sur la lune. J’ai aussi bien aimé L’Homme Vert s’en vient, plus classique, mais qui est assez longue et a donc la place de raconter son histoire.

Randonnée au refuge d’En Beys

Répétition d’une randonnée faite en avril – mais en l’absence de neige, et avec des compagnon·nes différent·es. On a eu de la chance sur la météo (pluie annoncée mais qui n’est tombée que lorsque nous étions dans la tente). Pas mal de faune vue au cours de la rando : marmottes, isards, vaches, chevaux, araignées, lézards, oiseaux divers.

Lac des Bésines depuis son extrémité ouest
Lac des Bésines depuis son extrémité Est
Montée à la coume d’Anyell
Depuis la coume d’Anyell
Lichen sur rochers
Depuis le lac d’en Beys, dans la brume matinale
Redescente dans la vallée d’Orlu

Arcane, du studio Fortiche

Série d’animation dont la première saison est sortie en 2021, et prenant place dans l’univers de League of Legends. On suit l’enfance puis la fin de l’adolescence de deux sœurs, Violet et Powder, dans les villes jumelles de Zaun et Piltover. Nées à Zaun, cité pauvre et souterraine aux pieds de la riche Piltover, les deux sœurs ont été témoins de la mort de leur parents lors d’une tentative de révolte des zaunites contre l’autorité de Piltover. Recueillies par un des leaders de la révolte, elle grandissent à Zaun avant d’être séparées, et de se retrouver des deux côtés d’un conflit à la fois entre les deux cités et les différentes factions qui s’agitent au sein de chacune des deux, alors que l’invention de l’HexTech, une façon d’exploiter les énergies magiques, démultiplie la richesse de Piltover – et les appétits.

L’animation est très belle, avec des décors dans un style peinture à l’huile, et une esthétique steampunk/Belle Époque pour les deux villes, et des trucs un peu plus audacieux en termes de rendu sur la seconde partie de la série. Par contre j’ai trouvé l’ensemble des personnages assez clichés, on est énormément sur des archétypes, même pour les deux persos principales, y’a pas une grande profondeur psychologique.