Archives de catégorie : Longs métrages

Else, de Thibault Emin

Film fantastique français de 2025. Suite à l’annonce de l’apparition d’une nouvelle pandémie, le gouvernement annonce un confinement. Anx et Cass viennent de se rencontrer pendant une soirée, mais elle décide de venir se confiner chez lui. Malgré leurs tempéraments qui s’oppose sur pas mal de points, la romance entre eux se développe. Pendant ce temps, dehors, l’épidémie transmise par le regard continue de progresser : les gens fusionnent avec les éléments de leur entourage. La maladie finit par rentrer dans le cocon des deux amoureux : Cass est contaminée, elle commence à se fondre dans les draps de son lit, puis dans l’immeuble tout entier.

C’était original dans le traitement de l’image, avec pas mal de flou, un passage réussi en noir et blanc, des effets spéciaux analogiques (bon et des images en IA pas top dont on aurait pu se passer). Un petit côté Cronenberg dans la soudaine porosité des limites corporelles (et matérielles, les objets se mettant à fusionner entre eux, l’immeuble bourgeonnant, rendant plus étroit l’intérieur de l’appartement…) mais traité sur un mode plus poétique.

Dupont-Lajoie, d’Yves Boisset

Film français de 1975. Les Dupont-Lajoie, cafetiers parisiens, partent pour leurs traditionnelles vacances dans le Midi. Au camping du soleil, ils retrouvent leurs amis des années précédents, avec lesquels ils déroulent les mêmes platitudes que d’habitude.

Divulgâchage et TW ci-dessous

Rapidement il apparait que le père Lajoie est attiré par Brigitte, la fille des Colin. A l’occasion d’une promenade où il la surprend en train de bronzer seule, il la viole et accidentellement, la tue. Pour brouiller les pistes, il amène le corps près du baraquement où vivent les ouvriers algériens qui sont en train de construire de nouveaux logements. Le racisme ambiant va faire le reste : les hommes du camping organisent une ratonnade, pour « rendre justice à la petite », rajoutant un nouveau meurtre au premier…

C’était intense. C’est un film avec des personnages assez détestables, les trois couples au centre du film (surtout les hommes, les femmes parlant largement moins) représentent une petite bourgeoisie française sûre d’elle et de ses privilèges, sortant des horreurs racistes dans le plus grand calme (et projetant sur les étrangers ses propres comportements) avant de chercher des passe-droits à la première occasion. Le film est plutôt drôle dans sa première partie qui fait vraiment cliché de vacances où tout le monde part à la même heure et s’entasse sur les mêmes plages, et où on attend le présentateur d’Intervilles comme le messie. Puis il prend une tournure beaucoup plus tragique dans la seconde moitié. Le choix de faire du personnage principal, qui se présente comme un bon père de famille, le violeur qui s’en prend à une connaissance (plutôt d’avoir mis en scène une agression sexuelle par un étranger) est assez novateur pour l’époque je trouve (bon en même temps ça n’en fait pas un film féministe, les femmes ont trois à 5 répliques en tout, et l’histoire tourne autour de trope de la femme dans le frigo). Mais la dénonciation du racisme ambiant en France est assez forte.

Recommandé sous réserves d’être dans un bon état mental et de checker les TW.

The Florida Project, de Sean Baker

Film états-unien de 2017. On suit la vie de Moonee, gamine de 7-8 ans, qui vit dans un motel en bordure de Disney World, en Floride. Elle passe ses journées à faire les 400 coups avec ses amis, à explorer les hôtels abandonnés, à réclamer de l’argent aux touristes pour s’acheter des glaces, et à faire tourner les adultes en bourrique. Elle vit seule avec sa mère, Halley, qui galère à rassembler l’argent pour payer leur loyer, et vit de combines.

J’ai beaucoup aimé. C’est une chronique de la précarité à hauteur de regard d’enfant. C’est aussi une description de la vie dans les marges de l’Amérique, juste à côté d’une usine à rêve mais dans des conditions merdiques. Les acteurs jouent très bien notamment les enfants mais pas que. Il y a un petit côté Une affaire de famille ou les 400 Coups, mais avec les couleurs pastel de Disney World en toile de fond pour cacher la misère.

Sew Torn, de Freddy McDonald

Film suisso-étatsunien de 2024. Barbara est une couturière qui vit dans une petite vallée suisse &tranquille. Elle tombe par hasard sur un règlement de comptes entre vendeurs de drogue. Elle hésite entre appeler la police, partir sans rien dire ou récupérer la valise d’argent sale. Le film va explorer successivement les trois options et le destin qu’elles promettent à Barbara. À chaque fois, elle va construire un dispositif élaboré avec du fil et des aiguilles pour tenter de se sortir d’une situation épineuse. Si on suspend son incrédulité sur la solidité du fil, c’est rigolo de voir ces espèces de machines de Goldberg en action.

Le film est bien joué, le contraste vendeurs de drogue menaçants et paisibles paysages suisses fonctionne bien. Le scénario n’est pas révolutionnaire mais est bien mis en scène, les divergences qui explorent l’arbre des possibles révèlent un peu plus de background à chaque fois.

Sympa à regarder.

Your Monster, de Caroline Lindy

Film étatsunien paru en 2024. Laurie est une actrice de musicals. Atteinte d’un cancer, elle est larguée par son partenaire, qui avait écrit une pièce dans laquelle elle devait avoir le rôle principal. Forcée de retourner vivre dans la maison de sa mère, elle découvre dans son placard un monstre, qu’elle avait connu dans son enfance. Une cohabitation va démarrer, Monstre poussant Laurie à ne pas accepter à sa situation et ne pas dire que tout est ok dans la façon dont Jacob l’a traitée.

C’était rigolo à regarder, mais sans être transcendant. Les acteurices jouent bien, le numéro musical est cool, mais le scénario est assez straightforward, on s’attend à une partie des retournements.

Azrael, de E. L. Katz

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise(festival de films de genre toulousain).

Film étatsunien de 2024. 200 ans après le Ravissement, Azraël et son partenaire tentent de s’échapper de la communauté dans laquelle ils vivaient, une communauté perdue dans les bois dont les membres se sont enlevés les cordes vocales pour ne pas succomber au péché de Parole. Mais les membres de la communauté veulent les retrouver et les sacrifier aux Brûlés, des créatures humanoïdes et anthropophages qui rodent dans les bois. Azraël va se confronter à la communauté, réalisant que la seule manière de gagner sa liberté est d’en éliminer tous les membres.

Le film est quasiment sans paroles (y’a un perso qui parle en espéranto non traduit pendant environ 1 minute), ce qui est un choix assez fort. Y’a un côté post-apo (littéral vu que c’est après l’Apocalypse au sens biblique) un peu crado qui est cool, mais aussi un côté « on court beaucoup dans les bois » qui est moins enthousiasmant. Y’a un de mes pet peeves dans les films post-apo : un indice très fort que « l’apocalypse » a en fait été très localisée et que le reste du monde continue de fonctionner très bien. Bonne perf de l’actrice principale, des décors sympa, des effets spéciaux réussis (surtout sur la fin et le design du « bébé » – j’ai été moins convaincu par les Brûlés), mais un scénario qui est quand même assez éthique (c’est des boucles dans les bois autour de la communauté, quoi)/

The Rule of Jenny Pen, de James Ashcroft

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Film néo-zélandais de 2024. Suite à un AVC, Stephan Mortensen, jusqu’ici juge, se retrouve dans une maison de retraite médicalisée. Elle est en dessous du standing qu’il voudrait, mais tous les établissements manquent de place en ce moment. Le juge se considère comme au dessus des autres résidents et interagit peu avec eux, considérant qu’il sera bientôt sorti, dès qu’il aura retrouvé l’usage de sa jambe droite (il est pour le moment en fauteuil roulant).
Stephan réalise rapidement qu’un des résidents terrorise tous les autres, et entend le faire lui aussi rentrer dans le rang. L’homme en question, Dave Crealy, se déplace toujours avec une marionnette thérapeutique – Jenny Pen – et force les gens à professer leur allégeance à la marionnette. Stephan tente de se rebeller contre Crealy, mais la dégradation de son état mental joue contre lui…

Très réussi. C’était assez intense étant donné que c’est de l’horreur « réaliste » : les forces inexorables contre lesquelles se bat le protagoniste c’est son déclin cognitif et le désintérêt de la société pour les personnes âgées (bon et puis Crealy en tant que local bully, mais c’est juste une surcouche finalement). Très bonne performance des deux acteurs principaux.

Recommandé avec un petit TW sur la violence psychologique et la vieillesse.

Dead mail, de Joe DeBoer et Kyle McConaghy

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Film étatsunien de 2024. Dans les années 80s, un homme s’échappe d’une maison et dépose un appel à l’aide dans une boîte aux lettres avant d’être rattrapé par son geôlier. On va suivre la tentative du service postal de retrouver l’origine de l’appel à l’aide avant de voir en flashback comment l’homme s’est retrouvé prisonnier.

J’ai bien aimé. Y’a un grain de l’image particulier, et tout le film fait très d’époque, avec ses enjeux de créations de carte-son pour synthétiseurs et de suivi du courrier.

Recommandé

The Assessment, de Fleur Fortuné

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Film étatsunien paru en 2024. Dans un futur indéterminé, un couple qui souhaite avoir un enfant se soumet à la procédure de l’Évaluation: ils vont héberger pendant une semaine une Évaluatrice qui va les soumettre à une batterie de tests et évaluer leur mode de vie pour estimer s’ils sont aptes à élever un enfant. La procédure est confidentielle, donc ils ne savent pas à quoi s’attendre, mais rapidement le comportement de l’évaluatrice va sembler relativement perturbant et sortir de ce qui permettrait d’évaluer leur capacité à avoir un enfant.

Je n’ai pas été très convaincu. Il y a des éléments intéressants dedans, notamment dans l’arrière-plan (un État vaguement fasciste dont les citoyens sont immortels, mais qui a un territoire tout petit, le reste de la planète étant inhabitable), mais l’histoire principale m’a laissé un peu froid : Le comportement de l’Évaluatrice est un peu trop random : si le début avec les différents tests et les simulations de comportement enfantin marche bien, ça part quand même très loin dans ce qu’elle se permet de faire, et j’ai trouvé la fin trop psychologisante avec l’explication des motivations de l’Évaluatrice. Le tout a un petit côté « les gens matrixés par le désir d’enfant. »

Dead Talents Society, de John C. Hsu

Film vu lors de l’édition 2025 du Grindhouse Paradise (festival de films de genre toulousain).

Comédie paranormale taïwanaise parue en 2024. Après leur mort, les gens deviennent des fantômes, qui continue d’exister tant que les vivants conservent des éléments matériels significatifs liés à eux (variation sur la prémisse de Coco). Une fois que ce n’est plus le cas, ils disparaissent au bout de 30 jours, sauf s’ils arrivent à se faire un nom en tant que légende urbaine. Le film suit une fantôme ordinaire qui va devoir devenir une légende urbaine, alors que le champ est bien concurrentiel, les légendes urbaines les plus connues étant des stars dans le monde des morts.

Le traitement était assez rigolo, avec gestion des légendes urbaines de la même façon que les influenceurs, besoin de se faire connaitre, d’avoir des vidéos qui deviennent virale… Le côté planification des manifestations surnaturelles avec la participation de plusieurs fantômes non visibles qui font les « effets spéciaux » : tenir une assiette dans les airs, appuyer sur le bouton d’arrêt d’urgence d’un ascenseur (idée assez brillante parce que du coup ça limite les effets spéciaux à mettre en œuvre dans le film (même si on a quelques scènes du point de vue des humains pour faire le parallèle), et un fantôme avec une « licence de hantise » qui peut se rendre visible aux humains. Le film met l’accent sur le boulot qu’est ce monde d’influenceurs, plusieurs personnages se plaignant que c’est plus de boulot maintenant qu’ils sont morts.

Recommandé.