Seconde visite : le musée Toulouse-Lautrec
Journées du Patrimoine : Vermicellerie
Quelques visites à Albi à l’occasion des journées du Patrimoine. Pour commencer, la salle des machines de l’ancienne vermicellerie :
La Longue Route, de Bernard Moitessier
Livre français de 1971. Il s’agit du journal de bord de Bernard Moitessier lors du trajet en solitaire qu’il effectuera de Plymouth à Tahiti en passant par les caps de Bonne-Espérance, Leeuwin, Horn, Bonne Espérance et Leeuwin. Pas d’erreur de copier-coller, il s’agissait bien d’1,5 tour du monde. Parti pour un tour du monde à la base (la première édition du Golden Globe), Moitessier décide de ne pas remonter vers Plymouth mais de continuer à naviguer, puisqu’il se sent bien sur la mer et qu’il a des provisions en quantité suffisante. Une décision assez radicale puisque femme et enfants l’attendaient à terre, et qu’il n’avait aucune nouvelle d’eux (ni de grand monde, sa radio étant visiblement assez peu disserte).
J’ai beaucoup aimé le récit. C’est accessible même sans rien connaître aux bateaux, Moitessier raconte la succession des jours, les conditions météos variables, son état d’esprit et sa santé physique et mentale, le quotidien de la veille sur un bateau, l’entretien qu’il en fait, les accidents qui surviennent, les interactions avec les animaux marins. Perso ça me donne envie d’aller parcourir le GR10, mais votre réaction peut varier selon relation personnelle à la Nature et à l’appel des grands espaces.
Randonnée aux étangs de Bassiès, 2e jour
Seconde journée de la randonnée aux étangs de Bassiès. Départ du refuge, montée sur les crêtes pour une boucle jusqu’à la voiture. On a croisé un troupeau avec deux bergers, trois patous et deux chiens rabatteurs vers la fin de journée, on est restés loin. Retour à la voiture à 18h et quelque, puis retour sur Albi.
Randonnée aux étangs de Bassiès, 1er jour
Randonnée avec bivouac aux étangs de Bassiès, en Ariège près d’Aulus-les-Bains. Un endroit où j’ai réalisé être déjà allé, mais pas dans la même configuration. Là on était 3, P. et C. et moi. Départ du plateau de la Coumebière. Première journée assez courte car on a mis énormément de temps à se mettre en route, nuit sous tente, seconde journée bien longue. Très beau temps tout du long.
The Bone Shard Daughter, d’Andrea Stewart
Roman de fantasy publié en 2020, premier tome de la série The Drowning Empire. L’histoire se passe sur un archipel composé d’îles mouvantes. L’Empire des Sukais règne sur cet archipel. Il y a longtemps, la magie du premier Sukai a permis de vaincre les Alangas, des créatures mythiques qui régnaient sur les humains. Les Alanga ne sont plus qu’un lointain souvenir, mais l’Empire collecte toujours un éclat d’os du crane de chaque sujet : ces éclats d’os sont utilisés pour animer des constructs, des machines magiques qui gèrent l’Empire, et qui seraient théoriquement une ligne de défense contre le retour des Alangas. On suit 4 points de vue : Jovis, un contrebandier qui va se découvrir d’étranges pouvoirs, Sand, une esclave sur une île isolée, Phalue, la fille du gouverneur d’une île opulente, et Lin, la fille de l’empereur.
Je n’ai pas été enthousiasmé. La prémisse est intéressante, mais les personnages ne sont pas passionnants, on voit venir pas mal de révélations de loin, et le style n’est pas fou. On passe pas un mauvais moment à le lire, mais c’est un roman de fantasy tout à fait quelconque.
Théorie du drone, de Grégoire Chamayou
Un bouquin qui part d’une approche philosophique pour réfléchir à comment l’usage des drones de combat transforme la notion de guerre, de combats et de soldats.
L’idée principale est que les drones transforment la guerre, d’une guerre asymétrique à une guerre unilatérale. Or le principe de la guerre, ce qui la fonde en droit comme un espace particulier où l’homicide est légal, c’est qu’il y a une relation de réciprocité : on peut tuer parce qu’on peut être tué. Si un des côtés est inatteignable, ce n’est plus la guerre, c’est des assassinats ciblés. On ne peut pas se réclamer du droit de la guerre dans ces conditions, ni même s’en réclamer moralement.
Du coup, l’usage des drones vient avec toute une modification de ce qui est vu comme les valeurs de l’armée : Ce qui est considéré comme la bravoure ce n’est plus de mettre en tant que soldat son intégrité physique en jeu, c’est d’accepter les troubles psychiques que l’activité de tuer à la chaîne peut provoquer. Ce qui était à l’époque de la guerre du Viet-nam vu comme un argument contre les conflits militaires devient un élément réclamé par l’armée comme la preuve de la valeur des troupes.
Une autre modification, pas forcément causée par les drones mais qu’ils accompagnent, est l’intolérabilité pour les pays occidentaux de voir des morts dans leur camp. Le corolaire, c’est que l’usage de drones ou d’une force disproportionnée, s’ils permettent d’éviter les morts occidentaux, deviennent acceptables même s’ils s’accompagnent d’un plus grand risque de tuer des civils du camp adverse. Alors que la protection des civils est dans le droit normal de la guerre primordial, la division ne se fait plus entre civils et militaires mais entre les nôtres et les autres, selon un prisme bien nationaliste. Pour le justifier moralement, on en vient à considérer que tous les civils participent finalement un peu au combat, comme appui plus ou moins lointain des combattants adverses.
Le traitement automatisé des quantités astronomiques de données issues des drones de renseignement change aussi la facon dont le renseignement est effectué : il ne s’agit plus d’identifier formellement untel et untel comme étant des combattants ennemis, il s’agit d’identifier des patterns correspondant au profil-type du combattant ennemi, avec une notion assez lâche de combattant puisqu’il n’y a plus à proprement parler de combat ou de zone de combat. C’est donc des réseaux de relation, des endroits visités, des conversations interceptées qui vont servir à monter un dossier identifiant tel personne suivi comme suffisamment impliquée pour être considérée comme un ennemi et déclencher une frappe. Peu importe l’identification de la cible par un nom si le comportement correspond aux marqueurs.
Globalement c’était dense mais intéressant comme lecture.
Maus, d’Art Spiegelman
Bande-dessinée étatsunienne publiée entre 1980 et 1991. L’auteur met en scène le témoignage de son père, rescapé de la Shoah. Dans le livre, les polonais sont représentés par des cochons, les nazis par des chats et les juifs par des souris. On alterne entre le récit du père d’Art et le contexte de l’enregistrement de son témoignage par Art aux États-Unis dans les années 80.
Le livre entremêle l’Histoire de l’Europe nazie, la vie personnelle d’Art et de son père (en Europe et en Amérique), la difficulté de la relation père/fils dans ce contexte, et l’impact de la parution de la bande dessinée sur son auteur.
C’est très puissant et un Pulitzer bien mérité, je recommande fortement (par contre, obvious TW racisme, antisémitisme et génocide).
The Time-Traveler’s Wife, de Steven Moffat
Doctor Who : the secret Moffat season
Série télévisée de 2022, adapté du roman éponyme. Henry est atteint d’une maladie qui le fait voyager dans le temps sans contrôle sur la durée et la destination de ses sauts. A 28 ans, il rencontre Clare, une femme qui lui déclare qu’ils vont se marier. De son point de vue, elle a connu Henry depuis son enfance, un Henry plus âgé ayant voyagé 150 fois dans son enfance. Mais le Henry qu’elle rencontre à 20 ans la déçoit : il est immature et égoïste, pas le prince charmant de son enfance.
J’ai bien aimé. La série est dirigée par Steven Moffat, qui aime bien raconter des histoires de voyage dans le temps et écrit très mal ses persos féminins ; là le matériau-source le contraint un peu et ça marche mieux que d’habitude. On dirait une V2 plus réussie de ce qu’il avait fait avec les personnages de River Song et Amy Pond dans Doctor Who. Malheureusement la série n’aura pas de saison 2 donc on reste sur une absence de conclusion, mais je pense que ça vaut le coup de la regarder néanmoins. Par contre en dehors des deux personnages principaux, les seconds rôles sont assez anecdotiques.
In universe, la façon dont fonctionne la relation entre les deux personnages est assez étrange : in fine ils sont ensemble parce qu’ils savent qu’ils seront ensemble. L’attraction que Clare éprouve pour Henry est totalement liée au fait qu’il a été une part de son enfance, un référent adulte toujours bienveillant ; c’est quand même assez creepy comme base de relation, les personnages le reconnaissent (mais présentent par contre une fausse équivalence : le Henry idéal de l’enfance de Clare est comme ça parce qu’il s’est adapté à elle tout au long de leur mariage : certes, mais ce n’est pas la même chose de s’adapter à l’autre une fois que tu es adulte et mature vs quand tu connais l’autre à 6 ans et qu’il en a 40). Les interactions d’Henry avec lui même sont intéressantes, ainsi que sa tendance à revisiter involontairement certains moments en boucle.
Bref, je recommande si vous voulez une comédie romantique sans trop d’enjeu et avec du voyage temporel.
Nope, de Jordan Peele
Film étatsunien de 2022. OJ et Emerald Haywood vivent sur le ranch familial, où ils dressent des chevaux qui sont utilisés dans des films. Suite à la mort de leur père, l’entreprise est en mauvaise posture. Mais OJ découvre qu’une créature mystérieuse (et dangereuse) rode dans le désert. Les deux adelphes décident de filmer la créature et de vendre le film pour renflouer leurs finances.
J’ai beaucoup aimé. Le scénario est assez minimaliste, mais il mêle pas mal de thèmes : le cinéma, la relation aux animaux, les relations familiales… de façon réussie. L’extraterrestre est original (avec un design assez low-fi mais qui fonctionne bien), le rapport qu’ont les humains avec lui aussi. C’est très bien filmé et très beau, les personnages sont très réussis. Mêmes les digressions sur le passé de Jupe qui n’ont à première vue pas grand chose à voir avec l’intrigue originale (même si en fait un peu) sont réussies. C’est un peu l’anti-Prey.
Je recommande fortement.